Vivre, c’est aussi se sentir vivre. Avoir le sentiment profond d’exister. Ce sentiment essentiel est aujourd’hui rare. Notre conscience aliénée ou obnubilée ne parvient plus à générer ce sentiment de profonde plénitude, quelles que soient les conditions dans lesquelles nous serions.
C’est ce sentiment qui aujourd’hui manque et débouche, non pas sur une conscience de l’absurdité de notre existence, mais sur notre inconscience quant à notre présence au monde. Cette présence au monde, ne peut, toutefois, se suffire à elle-même pour se manifester pleinement, elle se doit de se nourrir de notre appartenance à une nature humaine, à notre condition humaine, à une même communauté de destin. Elle se doit de se nourrir de notre humanisme.
L’humanisme permet de recentrer la préoccupation première de toute existence, assurer solidairement à toutes et à tous, la meilleure vie possible. Un tel projet n’est nullement utopique, il est dans la nature du monde même, nous le voyons, par exemple, dans les conditions biologiques offertes à chaque être d’être en vie ou dans les différentes aptitudes, dont dispose chacun de nous.
L’humanisme permet aussi d’avoir en partage une identité indéniable, première et fondamentale, celle du genre humain. Cette approche peut nous permettre de dépasser les nombreux et différents clivages pouvant être ethniques, culturels, religieux, sociaux, économiques ou idéologiques.
Faire revenir l’humanisme à sa source, c’est-à-dire le relier à notre nature humaine, à notre humanité et non aux « Humanités », telles que posées comme propres à une seule civilisation, c’est l’aborder en dehors des conceptualisations favorables ou défavorables, qui sont libres d’être développées à son égard, c’est en élargir la portée à toute l’humanité.
Beaucoup de problèmes sont, aujourd’hui, dus à l’indifférence dont nous faisons montre vis-à-vis des autres, y compris dans nos activités quotidiennes, sans aller jusqu’à saisir la portée de nos gestes, qui ne sont pas, qui ne peuvent pas être seulement, comme on tend peu à peu à le faire penser une sorte de monnaie d’échange, mais bien un rôle dont on s’honore, aussi modeste soit-il, que chacun de nous joue vis-à-vis de la collectivité.
La notion de collectivité ne devrait plus, d’ailleurs, se restreindre à des groupes limités mais s’étendre à l’ensemble de l’humanité. C’est cette collectivité que, finalement, chacun de nous sert et se doit de servir.
Souvent, aujourd’hui, chacun de nous se sent comme dépassé par une fatalité, un état des choses qui nous empêcherait d’agir, non pas du découragement, mais une sorte de démission, qui fait que même ceux qui ont la capacité et parfois le devoir d’agir, de par les responsabilités dont ils sont investis par la communauté, ne le font pas efficacement. Par crainte, peut-être, de remettre en cause des équilibres qu’ils croient nécessaires.
Le monde d’aujourd’hui interpelle notre conscience, non pas tant par les phénomènes qui s’y observent, que par la résignation dont font preuve ceux qui y vivent, dont l’accommodation fait craindre la pérennisation des travers et, à Dieu ne plaise, leur aggravation progressive.