
– La bande frontalière d’Al-Tanf, occupée par l’armée américaine. Sa fonction est d’empêcher la libre circulation des biens et des hommes entre la Syrie et l’Irak d’un côté, et l’entrainement de terroristes pour déstabiliser l’État syrien et justifier la présence militaire américaine – illégale – en Syrie sous prétexte de « combattre le terrorisme »..
Il faut lire l’article qui suit, publié par le media russe RT, comme un coup de semonce et non comme une description de l’état des lieux. En raison de son extrême difficulté, il est peu probable que les occidentaux tentent de déclencher un « deuxième printemps » en Syrie. Malgré les conditions de vie horribles, consécutives à un régime de sanctions barbare et massif, personne n’a aujourd’hui envie de s’engager dans une énième rébellion suicidaire contre le pouvoir. La création par Israël et les Etats-Unis d’une formation combattante druze, à l’image des Forces démocratiques kurdes, amènerait l’armée syrienne et ses alliés à réagir militairement et à l’étouffer dans l’œuf. Par ailleurs il est peu probable que Washington soit tenté de rééditer le catastrophique scénario irakien de 2003. C’est hors de question puisque les forces russes et iraniennes sont déjà solidement implantées à l’intérieur de la Syrie. Les Etats-Unis sont même réticents à recourir à des frappes aérienne et balistique massives (comme l’envisageaient Obama et Hollande il y a dix ans). Les représailles à de telles frappes seront très coûteuses. Quant à la tentation jordanienne de vouloir « libérer » le sud syrien, ce serait un pas suicidaire qui pourrait remporter la monarchie hachémite et qui entrainerait les forces iraniennes à s’implanter durablement dans le royaume.
Douze ans plus tard, la guerre de l’Occident contre la Syrie se poursuit, avec des plans apparemment nouveaux pour déstabiliser le pays et renverser ses dirigeants. Et ce, après des années de sanctions brutales à l’encontre du peuple syrien.
Eva Bartlett*
Les « manifestations » de déstabilisation de la Syrie en 2011 reprennent-elles ?
La journaliste britannique Vanessa Beeley a récemment fait état de nouveaux efforts potentiels de l’Occident pour déstabiliser la Syrie, en fomentant des troubles comme en 2011. Mais cette fois-ci, les troubles sont fomentés dans la province de Sweida, Israël jouant un rôle déterminant.
Lors d’une interview ultérieure sur Redacted, Mme Beeley a déclaré que le nombre de militaires et de contracteurs (mercenaires) américains sur le terrain dans le nord-est de la Syrie se situe entre 2 000 et 3 000. Les États-Unis, a-t-elle ajouté, continuent d’utiliser al-Tanf, leur base militaire située dans le sud-est du pays, à la frontière avec l’Irak et la Jordanie, pour former encore plus de militants afin qu’ils finissent par prendre le contrôle d’une partie de la frontière syro-jordanienne et fermer ainsi une importante frontière terrestre pour la Syrie.
Pire encore, la perspective d’un retour à la Syrie de 2011, avec les Etats-Unis et leurs alliés, « entraînant 16 000 combattants druzes à Sweida », avec l’intention de semer le chaos comme en 2011. « Il y a une très petite minorité ici qui, avec le soutien d’Israël et des Etats-Unis, cherche à obtenir l’autonomie, très similaire au projet kurde dans le nord-est, et un projet fédéraliste pour les séparer de l’Etat syrien et créer un Etat indépendant », a déclaré M. Beeley. « Cela fait partie du plan américano-israélien visant à balkaniser la Syrie et à la diviser en États belligérants. Ce mouvement est en train d’être démultiplié par les Etats-Unis à Al-Tanf ».
Elle a également souligné la visite récente de trois membres du Congrès américain dans un district du nord de la Syrie contrôlé par des factions terroristes, soulignant qu’ils étaient entrés illégalement en Syrie (comme les politiciens et les médias occidentaux préfèrent le faire) pour fraterniser avec des groupes terroristes (comme les politiciens et les médias occidentaux préfèrent le faire).
L’économie syrienne est aujourd’hui en ruine, en grande partie à cause de la guerre menée par les États-Unis contre la Syrie et des années de sanctions occidentales de plus en plus brutales.
Bonnes questions : sur qui profite de la partition sectaire de la Syrie ? Le peuple syrien ? Non. Les États-Unis, Israël et leurs alliés ? Bingo.
Une résolution « antiterroriste » oubliée au profit d’un changement de régime
Dans son interview à Redacted, Mme Beeley a déclaré : « Ce que nous voyons essentiellement, c’est une résurgence du récit de 2011 sur les manifestations pacifiques dans le sud, le désir de renverser Bachar al-Assad ». Les responsables de l’ONU appellent à la résolution 2254, qui est en fait un changement de régime et une ingérence politique dans le processus politique en Syrie ». La résolution à laquelle elle fait référence, adoptée en 2015, appelait notamment à la tenue d' »élections libres et équitables » sous la supervision de l’ONU en Syrie dans un délai de 18 mois.
En 2016, j’ai interviewé le Dr Bouthaina Shaaban, conseillère politique et médiatique d’Assad. Lorsqu’elle a souligné que l’Occident attisait le terrorisme en Syrie, au lieu de le combattre, elle a évoqué les résolutions 2254 et 2253 du Conseil de sécurité de l’ONU, moins mentionnées, qui impliquent de mettre fin au terrorisme en Syrie et de poursuivre ceux qui soutiennent, facilitent ou participent au financement direct ou indirect des activités menées par ISIS, Al-Qaïda et les groupes associés.
Shaaban a déclaré : « Vous voulez mettre en œuvre 2254 ? Mettez d’abord en œuvre 2253, et ensuite il sera très facile de mettre en œuvre 2254. C’est le double langage de l’Occident : ils s’adressent à leur public en disant qu’ils ont une position contre le terrorisme et qu’ils veulent le combattre, alors qu’en réalité ils facilitent le terrorisme et ne mentionnent même pas une résolution du Conseil de sécurité au titre du 7e chapitre qui a été adoptée 24 heures avant la résolution 2254. »

– Des manifestants brandissent des drapeaux druzes dans la ville de Souïeda, en Syrie. Une initiative violement dénoncée par les dirigeants de la communauté et par l’immense opinion publique druze comme « sédition manipulée par Israël ».
Comme Milley s’en est vanté, les États-Unis ont l’intention de rester (illégalement) en Syrie pendant longtemps. Non pas pour « lutter contre le terrorisme », mais pour déstabiliser encore plus le pays, appauvrir et tuer encore plus la population, et piller encore plus ses ressources.
*Eva Bartlett est une journaliste canadienne indépendante. Elle a passé des années sur le terrain à couvrir les zones de conflit au Moyen-Orient, en particulier en Syrie et en Palestine (où elle a vécu pendant près de quatre ans).
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