Kofi Annan n’a plus à craindre les foudres de ceux qui veulent le faire renoncer sans révéler les véritables dessous de ce conflit. Ils n’hésiteront certes pas à lancer contre lui une campagne de calomnie au cas où il s’aviserait de dire sa vérité. Ce serait son honneur qu’il ne transige pas sur le devoir de vérité.
A Damas où il est retourné, Kofi Annan a obtenu l’accord du président Bachar El-Assad sur une «approche» en vue de l’instauration d’une transition politique en Syrie. A Téhéran puis à Baghdad où il s’est successivement rendu, il a apparemment plaidé avec succès auprès des dirigeants iraniens et irakiens la nécessité qu’ils usent de leur influence en Syrie dans le sens du règlement de la crise syrienne.
Il devait présenter hier soir à l’ONU les résultats de ses contacts et faire part des conclusions qu’il en a tirées. Si celles-ci vont dans le sens qu’il se sentirait encouragé à poursuivre sa mission d’émissaire international pour la Syrie, elles seront sans nul doute remises en cause par les Américains et les Européens qui reprochaient déjà à Kofi Annan d’avoir échafaudé un plan de paix nullement conforme à l’issue qu’ils veulent donner au conflit syrien. D’ailleurs avant même qu’Annan ne remette son rapport, il apparaît clairement que celui-ci est déjà désavoué et par eux et par l’opposition qu’ils soutiennent. Celle-ci l’a signifié avant même d’avoir pris connaissance de l’approche à laquelle il a convenu avec le président syrien.
Il faut par conséquent s’attendre à ce que Kofi Annan soit soumis à de fortes pressions pour qu’il jette l’éponge et renonce à sa mission. Il n’est pas impossible au cas où ces pressions n’aient pas l’effet voulu sur lui que ceux qui veulent le mettre hors jeu feront le forcing pour convaincre Ban Ki-moon qui l’a choisi de le désavouer. Il est clair que les Américains et les Européens en sont à regretter amèrement d’avoir donné leur caution à sa désignation. L’homme s’est en effet révélé moins malléable qu’ils ne l’ont escompté. Sans s’en plaindre ouvertement, Kofi Annan ne laisse pas moins sous-entendre que l’échec de son plan de paix n’est pas dû au refus des autorités syriennes à l’appliquer. Seule explication à laquelle leurs adversaires syriens et internationaux s’en tiennent. Sur les causes de cet échec, Kofi Annan est coupable aux yeux de ces derniers d’avoir le même point de vue que les Russes en soutenant que l’opposition et ses alliés étrangers n’y sont pas innocents.
Diplomate et précautionneux, l’ex-secrétaire général de l’ONU se refuse à dénoncer ouvertement les parties qui veulent faire échouer sa mission. Tant qu’il estime avoir encore une chance de la poursuivre. Laquelle va en s’amenuisant tant ses efforts pour obtenir un consensus international à son plan de paix sont contrecarrés à chaque fois qu’ils semblent sur le point d’aboutir. Il faudra bien pourtant que Kofi Annan se départisse à un moment ou à un autre du mutisme qui est le sien concernant les acteurs syriens régionaux et internationaux qui s’ingénient à faire avorter sa mission de paix. Il le doit à l’opinion internationale consternée et indignée par la poursuite du tragique conflit dont la Syrie est le théâtre.
Kofi Annan n’a plus à craindre les foudres de ceux qui veulent le faire renoncer sans révéler les véritables dessous de ce conflit. Ils n’hésiteront certes pas à lancer contre lui une campagne de calomnie au cas où il s’aviserait de dire sa vérité. Ce serait son honneur qu’il ne transige pas sur le devoir de vérité. L’opinion internationale ne sera pas dupe de la manigance. Le prestige acquis par Kofi Annan n’est pas aisé à ternir. Il est donc attendu de lui qu’à défaut de ramener la paix en Syrie, il dénonce publiquement et sans concession les parties qui font obstacle au retour de celle-ci.