La décision de la Cour suprême du Venezuela a ordonné, le 25 janvier, au Conseil national électoral d’exclure la coalition d’opposition MUD (Mesa de la Unidad Democratica) de droite et d’extrême droite, du processus d’enregistrement officiel des partis politiques. Elle ne pourra, donc, participer au scrutin présidentiel en avril prochain. Cette décision a suscité l’indignation de la coalition, par ailleurs affaiblie et divisée – et qui a boycotté les deux derniers scrutins nationaux – mais aussi des pays occidentaux, dont la France qui a demandé à l’Europe de renforcer les sanctions déjà lourdes contre cet État et son peuple. Elle est présentée comme une nouvelle atteinte autoritaire du pouvoir et de Nicolas Maduro contre la démocratie. De quoi s’agit-il en réalité ?

Nicolas Maduro en campagne. Photo DR
La Chambre constitutionnelle de la Cour suprême de Justice se réfère, dans sa décision du 25 janvier, à celle n°278 du 21 octobre 2016 sur le renouvellement de l’enregistrement officiel des partis politiques qui « se trouvent délégitimés en vertu des circonstances factuelles et juridiques de ce décret ». Aux termes de cette décision, le renouvellement de l’inscription des partis politiques était prolongé de six mois, soit jusqu’en mai 2017.
Pourquoi ce processus de renouvellement ? Le même texte de 2016 précise les motifs pour lesquels l’enregistrement d’un parti politique peut être annulé. L’un d’eux stipule : « c) Quand il a décidé de ne pas participer à deux scrutins constitutionnels successifs ». Or, la coalition MUD a boycotté les élections régionales en octobre 2017 et les municipales en décembre 2017. Le président Maduro avait rappelé, alors, que « tout parti qui n’a pas participé aujourd’hui et a appelé au boycott des élections municipales, ne peut plus participer et sera rayé des listes ». Il était donc tout à fait légal et constitutionnel que la MUD soit exclue de l’enregistrement officiel des partis politiques et, par voie de conséquence, du prochain scrutin présidentiel. Cette exclusion posait le problème du statut des partis membre de la MUD qui se trouvaient de facto exclus également du scrutin pour avoir appelé au boycott dans le cadre de la coalition. La mesure touchait, également, les électeurs disposant d’une double carte, celle de leur parti et celle de la MUD. Il était donc constitutionnellement nécessaire de leur redonner leur légitimité par un nouveau processus d’enregistrement et de réinscription sur les listes électorales. Dans ce contexte, le délai accordé par la Cour suprême de Justice a, à nouveau, été prolongé de six mois.
En outre, avant la décision de la Cour suprême, l’une des responsables du Conseil électoral national, Tania D’Amelio, avait déjà informé la MUD qu’elle ne pouvait pas valider son organisation dans sept états du pays en raison d’une plainte pénale déposée contre elle, il y a deux ans, par leurs gouverneurs. La MUD est accusée d’avoir falsifié des signatures (personnes décédées, mineurs ou interdits de vote) lors du processus de demande d’un referendum (rejetée) contre Nicolas Maduro.
La décision de la Cour suprême de Justice du 25 janvier, outre qu’elle est constitutionnelle, n’était, donc pas une surprise, ni pour l’opposition vénézuélienne, ni pour les dirigeants et la presse occidentale. Cette dernière, contrairement à la presse anglophone ou hispanophone, n’explique, nulle part, les raisons de cette décision et a immédiatement fait campagne contre la « dictature vénézuélienne ». C’est ce qu’on peut appeler une « fake news » ou « fausse nouvelle » « par omission ». Le président français, Emmanuel Macron qui veut une loi contre les « fake news » s’est empressé, malgré cette manipulation de l’information, de s’en inspirer pour dénoncer « la dérive autoritaire » du gouvernement vénézuélien et se déclarer « favorable » à un renforcement des sanctions européennes contre Caracas.
Références :
https://historico.tsj.gob.ve/decisiones/scon/enero/207132-0053-25118-2018-15-0638.HTML
&
https://www.scribd.com/document/328867209/Sentencia-Del-TSJ-Sobre-Partidos