A deux ans du centenaire du génocide, non seulement le gouvernement de Recep Tayyip Erdogan n’envoie aucun signe d’avancée en ce qui concerne la reconnaissance du fait historique, mais il fait au contraire feu de tout bois au niveau international pour prévenir toute mesure qui permettrait de faire obstacle à son déni.
Si l’on en croit deux articles parus simultanément le 15 avril dans Le Figaro.fr et Challenge.fr , les dirigeants turcs seraient en train d’exercer d’énormes pressions économiques sur la France afin d’anticiper le risque d’une nouvelle loi contre le négationnisme. Ainsi, à deux ans du centenaire du génocide, non seulement le gouvernement de Recep Tayyip Erdogan n’envoie aucun signe d’avancée en ce qui concerne la reconnaissance du fait historique, mais il fait au contraire feu de tout bois au niveau international pour prévenir toute mesure qui permettrait de faire obstacle à son déni. Depuis l’arrivée de François Hollande à la présidence de la République, il multiplie à cette fin les offres commerciales les plus alléchantes. Il n’est pas un secteur de son économie qui ne fasse l’objet d’une promesse de contrat. Avions, centrales nucléaires, trains, métros, aéroports, armes. Tout y passe. Et il semblerait que nos décideurs économiques se soient aveuglément précipités dans ce miroir aux alouettes. Aujourd’hui le piège se referme, donnant plus de force au chantage d’Ankara qui se targue de pouvoir infliger à nos entreprises un manque à gagner de plusieurs dizaines de milliards d’Euros, selon Challenge.fr., si la France s’aventurait à « se mêler ce qui ne la regarde pas ». En revanche, si pour la Turquie le génocide des Arméniens n’est pas censé concerner les Français, elle ne se reconnaît quant à elle que des bonnes raisons d’interférer sur la façon dont nos compatriotes devraient ou non se protéger du négationnisme. Et si elle ne peut parvenir à infléchir notre droit par la pertinence de ses arguments, c’est en achetant les consciences qu’elle espère y arriver… La crise aidant.
Ces méthodes crapuleuses montrent le peu d’estime dans lequel le régime Erdogan tient notre pays. Ce faisant il montre que ceux qui sont aujourd’hui aux commandes de la Turquie n’ont rien à envier à leurs prédécesseurs qui ont mis à exécution le premier génocide du XXe siècle. Ils s’inscrivent dans la même logique. Ils finissent le job, avec les moyens du jour. C’est tout. Le plus triste dans cette affaire est que si France de gauche, la France morale, la France de la justice, en venait, qu’à Dieu ne plaise, à entrer dans cette spirale du chantage, non seulement elle y perdrait son âme, mais elle ne se garantirait même pas l’obtention de ces fameux contrats qui feront l’objet de toujours plus de surenchères. Loin d’être ainsi assaini, le terrain de ses relations commerciales avec la Turquie sera marqué à vie par les stigmates de cette corruption. Et les turpitudes de cet Etat se verraient à jamais encourager, au grand dam des démocrates turcs qui souhaitent tourner dans l’honneur cette page horrible de leur histoire.
Il est grand temps de répondre dignement à ces menaces. De ne plus jamais faire semblant d’être disposé à prêter le flanc à ce type de manoeuvre où l’odieux le dispute au morbide. Il fut une époque, pas si lointaine, où les démocraties exerçaient des pressions sur les dictatures pour leur arracher des réformes. Aujourd’hui c’est un Etat génocidaire qui tente de faire peur à la France pour la dissuader de se protéger d’un fléau qu’elle a identifié comme un délit depuis 20 ans, avec la loi Gayssot. Il faut mettre un coup d’arrêt à cette farce macabre. On ne gagnera rien à se coucher, sinon ajouter à la crise économique une irréparable faillite morale.
Ara Toranian
mardi 16 avril 2013,
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