Dans un discours fleuve d’une heure quarante cinq minutes, à l’amphithéâtre de l’université de Damas, le président syrien s’est adressé au peuple syrien en réaffirmant que « la victoire est proche si les Syriens restent loyaux à leur pays et à leur cause« . « Je ne suis pas de ceux qui abandonnent leurs responsabilités« , a-t-il assuré dans un discours retransmis par la télévision syrienne. « Le poste est sans valeur sans le soutien du peuple« , a ajouté Bachar el-Assad qui a succédé à son père en 2000, alors que de nombreux pays appellent à son départ.
S’exprimant en public pour la première fois depuis juin dernier, le président syrien a imputé le soulèvement auquel il est confronté depuis mars 2011 à un « complot étranger ». « Ce qui se passe aujourd’hui en Syrie avait été préparé pour la région depuis des décennies. Mais leur rêve tournera au cauchemar. Nous n’allons pas permettre la défaite de la Syrie qui signifiera la chute de la région entière » a-t-il dit dans cette quatrième intervention télévisée depuis le début de la révolte.
« Les parties régionales et internationales qui ont cherché à déstabiliser la Syrie ne peuvent plus falsifier les faits et les évènements », a-t-il insisté dans ce discours retransmis par la télévision syrienne.
M. Assad a accusé notamment « les médias internationaux de tenter sans relâche de pousser la Syrie à l’effondrement, ils ont échoué mais ne désespèrent pas » à le faire. « Ils ont voulu atteindre le chef (de la Syrie) en falsifiant mon interview avec la chaîne américaine » ABC, a-t-il ajouté. Début décembre, la Syrie avait déjà accusé cette chaîne d’avoir « délibérément » déformé les propos du président dans sa présentation d’un entretien Bachar al-Assad, pour présenter la Syrie sous un jour négatif. Dans cet entretien, M. Assad avait nié toute responsabilité dans la mort de milliers de manifestants en Syrie, assurant que seul « un fou » pourrait donner l’ordre de tirer sur son peuple.
Bachar el-Assad a également déclaré que la Syrie ne « fermera(it) pas la porte » à une solution arabe pour mettre fin à 10 mois de crise dans son pays, tant qu’elle « respecte la souveraineté de la Syrie« .
Une mission d’observateurs de la Ligue arabe est en Syrie depuis le 26 décembre pour rendre compte de la situation.
La Ligue arabe s’est prononcée dimanche pour la poursuite et le renforcement de cette mission, cible de vives critiques l’accusant d’inefficacité face à une crise qui a encore fait des dizaines de morts ces derniers jours
Le président a toutefois longuement critiqué la Ligue arabe, qui a décidé, en novembre dernier, de suspendre la Syrie. « La suspension de la Syrie de la Ligue arabe ne nous inquiète pas », a déclaré M. Assad, ajoutant que « suspendre la Syrie de la Ligue signifie suspendre l’arabisme de la Ligue ». « Ligue arabe s’est-elle opposée à Israël ? La Ligue arabe est-elle intervenue pour empêcher la division du Soudan ? », a-t-il demandé.
« Nous sommes devenus plus libre dans notre pratique de l’arabisme depuis que notre participation à la Ligue a été suspendue », a-t-il assuré, ajoutant que l’organisation panarabe a « directement contribué à agrandir les divisions entre les Syriens ». « Les pays arabes qui nous donnent des conseils sur la démocratie ne connaissent pas cette démocratie », a-t-il poursuivi.
Bachar al-Assad a également assuré mardi qu’aucun ordre n’avait été donné de tirer sur la population en Syrie. « Personne ne peut se couvrir. Il n’y a aucun ordre donné à quiconque d’ouvrir le feu sur le moindre citoyen« , a-t-il assuré.
Évoquant le dossier des réformes en Syrie, le président Assad a assuré que « les réformes internes ne peuvent être abordées indépendamment de la situation sur le terrain ». « Aujourd’hui, il est question de réformes au niveau politique mais il est aussi question de terrorisme« , a déclaré M. Assad. Et de poursuivre : « Il y a une grande différence entre ceux qui prétendent vouloir réformer pour saboter et ceux qui veulent vraiment réformer ». Le président syrien a par ailleurs demandé : « Si nous nous engageons aujourd’hui dans les réformes, les ingérences dans les affaires syriennes vont-elles s’arrêter? »
Il a ajouté qu’un référendum sur une nouvelle Constitution devrait avoir lieu au début du mois de mars. Le président syrien s’est dit par ailleurs favorable à l’idée d’inclure « toutes les forces politiques » au sein du gouvernement. « Nous voulons une opposition nationale en Syrie, pas une opposition qui reçoit ses ordres de l’extérieur », a-t-il cependant ajouté. Et d’assurer : « Nous sommes prêts à entamer dès demain un dialogue national, mais l’opposition ne l’est pas. »
Le président a encore déclaré que la priorité en Syrie était le rétablissement de l’ordre et que l’on ne pouvait y parvenir qu’en frappant « les terroristes d’une main de fer ». « Il n’y a aucune tolérance pour le terrorisme ni pour ceux qui utilisent des armes pour tuer« , a-t-il assuré. M. Assad a toutefois ajouté qu' »une fois le terrorisme défait, nous ne nous vengerons pas ». « La vengeance détruit la nation, seul le pardon la bâtit », a déclaré le président syrien.