Ce recueil des discours de Thomas Sankara n’est pas un recueil de plus. Pas seulement car il est plus complet que les précédents (en langue française), mais surtout car un des plus grands connaisseurs du Burkina et de sa révolution de 1983, Bruno Jaffré, les a utilement replacés dans leur contexte, permettant une approche globale de la pensée du leader burkinabé, « aussi bien dans son évolution dans le temps que dans la confrontation de ce qu’il dit avec la réalité », souligne-t-il dans son avant-propos.
L’exercice est d’autant plus réussi qu’en disséquant la pensée de Sankara, Jaffréen révèle toute son actualité. Dans ses lignes de force apparaissent les thèmes des grandes batailles d’aujourd’hui et notamment la préservation de la planète et la lutte contre la dette illégitime, avec une surprenante clairvoyance et une approche très moderne.
L’insurrection de 2014 et la mobilisation populaire contre la tentative de coup d’Etat de l’année suivante avaient révélé l’attachement extraordinaire de la jeunesse burkinabé à la figure de Sankara, disparue presque trente ans auparavant. Le mythe a résisté, encore faut-il qu’ilpuisse être traduit en instrument des luttes à venir. La vision de Sankara, jamais doctrinaire, mais absolument inspirée de l’étude des réalités économiques et sociales de son pays – comme des rapports de domination internationaux –, sont d’une actualité brûlante. Ce livre contribuera à une réévaluation globale de ce leader qui aura marqué la fin du XXe siècle en seulement quatre ans passés à la tête de son pays.
Thomas Sankara, La liberté contre le destin,
Edition Syllepse, Paris 2017, 480 pages 20 euros