Luxembourg, 10 jan 2018 (SPS) Le Front POLISARIO a pris connaissance des conclusions de l’Avocat général Wathelet près de la Cour de justice de l’Union européenne, à propos de l’accord de pêche conclu entre l’Union européenne et le Maroc, a indiqué un communiqué rendu public ce mercredi.
Pour l’Avocat général, cet accord est invalide car il s’applique au Sahara occidental et aux eaux y adjacentes : » En concluant cet accord, l’Union a violé son obligation de respecter le droit du peuple du Sahara occidental à l’autodétermination, ainsi que de ne pas reconnaître une situation illicite découlant de sa violation et n’a pas mis en place les garanties nécessaires pour assurer que l’exploitation des ressources naturelles du Sahara occidental se fasse au bénéfice du peuple de ce territoire ».
L’Avocat général rappelle que l’affirmation de souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental résulte d’une violation du droit du peuple Sahraoui à l’autodétermination. Il conteste la notion de « puissance administrante de facto » qui n’existe pas en droit international, et souligne que le Maroc est puissance occupante au sens du droit international. Dès lors, l’exploitation halieutique par l’Union des eaux adjacentes au Sahara occidental ne respecte pas le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination.
Par ailleurs, l’Avocat général constate que la majorité de l’exploitation prévue par l’accord de pêche vise presque exclusivement les eaux adjacentes au Sahara occidental. En effet, les captures effectuées dans ces eaux représentant environ 91,5 % des captures totales effectuées dans le cadre de l’exploitation halieutique instaurée par l’accord de pêche. Selon l’Avocat général, » la contrepartie financière versée au Maroc par l’Union au titre de l’accord de pêche devrait bénéficier presque exclusivement au peuple du Sahara occidental ».
La procédure va donc se poursuivre, et le Front POLISARIO attend sereinement la décision que prendra la Cour dans quelques mois, persuadé que la décision à venir et l’arrêt rendu le 21 décembre 2016 constitueront un bloc garantissant de manière effective le droit du peuple Sahraoui à l’autodétermination, selon le communiqué.
Mhamed Khaddad, coordinateur avec les Nations Unies, appelle toutes les instances de l’Union européenne à pleinement considérer la force des principes dégagés par la justice européenne. Tout choix politique qui n’intégrerait pas ces principes est voué à l’échec, et prolonge de manière inconsidérée la souffrance du peuple Sahraoui, a-t-il averti.
Le Front POLISARIO, à nouveau, demande l’ouverture de discussions directes et sans préalable pour rétablir les droits du peuple Sahraoui sur ses ressources naturelles. Il souligne que les décisions ouvertement illégales prises par le Conseil et la Commission engagent leur responsabilité sur le plan juridique, historique et moral.
À ce titre, le Front POLISARIO lance un appel solennel à l’ensemble des entreprises européennes présentes au Sahara occidental et dans les eaux adjacentes. En l’état actuel, elles développent leur activité dans l’illégalité, comme le rappelle l’Avocat général, et elles ont désormais clairement l’obligation de se conformer à ces décisions de justice. Ces entreprises doivent se rapprocher de la délégation du Front POLISARIO à Bruxelles pour régulariser leur situation.
Enfin, ces avancées judiciaires doivent être l’occasion de relancer le processus de décolonisation du Sahara occidental sous l’égide de l’ONU bloqué depuis des années par l’intransigeance du Maroc. (SPS)
De son côté, la Conférence européenne de coordination du soutien au peuple sahraoui (Eucoco) a mis en garde mardi 10 janvier la Commission européenne contre toute manœuvre visant à contourner l’arrêt de la Cour européenne de justice (CJUE) qui a conclu que les accords d’association et de libéralisation UE-Maroc ne s’appliquent pas au Sahara occidental.
Dans une lettre adressée aux commissions Affaires étrangères et Commerce international du Parlement européen, le président de l’Eucoco, Pierre Galand a affirmé que la Commission européenne doit « se conformer au droit européen », « respecter le droit international et les obligations européennes à l’égard du peuple du Sahara occidental ».
Il a dénoncé, dans ce contexte, « l’opacité » qui entoure les négociations sur les protocoles agricoles de l’accord d’association entre l’UE et le Maroc.
Le 29 mai dernier, le Conseil de l’UE octroyait un mandat à la Commission européenne afin de renégocier ces protocoles entre l’Union et le Maroc suite à un arrêt rendu par la CJUE le 21 décembre 2016 qui rappelait que l’accord de commerce ne pouvait pas s’appliquer au Sahara Occidental en raison de son statut « distinct et séparé » du Maroc. Mais le contenu de ce mandat est resté, depuis, secret.
Néanmoins, le président de l’Eucoco a estimé que de « nombreux indices » laissent penser que la Commission européenne essaye, de concert avec le Maroc, de contourner l’arrêt de la Cour. Autrement dit , de contourner le droit européen et international.
« Si le texte de l’accord renégocié vise, en effet, à contourner l’arrêt de la Cour de justice de l’UE, une seule voie possible pour faire respecter le droit : un nouveau recours devant la juridiction européenne. Le droit international ne se négocie pas ! », a-t-il averti.
Selon l’Eucoco, la Commission européenne tente de jouer sur la confusion entre « populations du territoire » et « peuple du Sahara Occidental » ou encore entre « consultation des parties » et « consentement explicite ».
« Cela signifierait la reconnaissance par l’UE de l’occupation illégale du Sahara occidental », a écrit le président de l’Eucoco dans sa lettre, regrettant que ni la Commission, ni le Royaume du Maroc n’ont souhaité inclure dans les négociations, le Front Polisario, reconnu par l’ONU comme représentant du Peuple du Sahara occidental.
« Il est incompréhensible que le Front Polisario n’ait pas été intégré dans les discussions visant à renégocier l’accord de commerce en question », a-t-il souligné.
Galand a tenu, dans ce contexte, à rappeler aux membres des commissions Affaires étrangères et Commerce international du Parlement européen, qui seront appelés à se prononcer sur l’accord renégocié entre l’UE et le Maroc, que le droit international et européen est « très clair » sur la question sahraouie.
Dans sa lettre, le président de l’Eucoco a rappelé que l’ONU a affirmé dans sa résolution 3437 que le Front Polisario est le « représentant du peuple du Sahara occidental, participe pleinement à toute recherche d’une solution politique juste, durable et définitive de la question du Sahara occidental ».
Il a également mis en exergue l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice qui affirme qu’il n’existe aucun lien de souveraineté territoriale entre le territoire du Sahara occidental d’une part, le Royaume du Maroc d’autre part.
Pierre Galand a mentionné, en outre, quelques principes du droit international soulignés dans l’arrêt de la CJUE qui a statué le « peuple du Sahara occidental doit être regardé comme étant un tiers », et que, de ce fait, la mise en œuvre d’un traité s’appliquant au territoire du Sahara Occidental doit recevoir le consentement d’un tel tiers.
La CJUE a relevé, ainsi, que l’accord de libéralisation de produits agricoles entre l’UE et le Maroc n’a pas fait l’objet d’un tel consentement.
Dans son jugement, la CJUE a affirmé, par ailleurs, que compte tenu du statut séparé et distinct reconnu au territoire du Sahara Occidental, en vertu du principe d’autodétermination, par rapport à celui de tout Etat, en ce compris le Royaume du Maroc, les termes « territoire du Royaume du Maroc » figurant à l’article 94 de l’accord d’association ne peuvent pas (…) être interprétés de sorte que le Sahara occidental soit inclus dans le champ d’application territorial de cet accord.
SPS et APS