Alternance au pouvoir, réduction à deux du nombre de mandats présidentiels, lutte contre la corruption, consécration de la liberté de la presse… figurent parmi les propositions les plus marquantes de ce chantier.
Les contours de la nouvelle Constitution se dessinent. Ahmed Ouyahia qui est chargé de piloter les consultations concernant les amendements que doivent subir de nombreux articles de la loi fondamentale mène rondement ce projet. La concertation sera la plus élargie possible. Les consultations viendront conforter et enrichir ce qui a été déjà fait par la commission des experts. Tout cela sera accompagné et couronné par une volonté d’écoute incontestable de la part du chef de l’Etat. Une première depuis l’accession de l’Algérie à son indépendance. Alternance au pouvoir, réduction à deux du nombre de mandats présidentiels, lutte contre la corruption, consécration de la liberté de la presse figurent parmi les propositions les plus marquantes de la copie concernant le projet de la nouvelle Constitution, adressée le 15 mai par la présidence de la République aux chefs de partis, aux personnalités nationales, aux responsables d’organisations ainsi qu’aux compétences nationales invités à mettre la main à la pâte pour faire accoucher ce projet en gestation. Quels sont les principaux changements? L’article 74 de la Constitution est amendé et reformulé comme suit: «La durée du mandat présidentiel est de cinq (5) ans. Le président de la République est rééligible une seule fois», indique le projet d’amendement mis en ligne hier sur le site de la présidence de la République tandis que les prérogatives du Premier ministre se voient renforcées. «Outre les pouvoirs que lui confèrent expressément d’autres dispositions de la Constitution, le Premier ministre exerce les attributions suivantes: il répartit les attributions entre les membres du gouvernement, dans le respect des dispositions constitutionnelles; il veille à l’exécution des lois et règlements; il signe les décrets exécutifs par délégation du président de la République…» stipule l’article 85 de la nouvelle mouture de la Constitution qui propose, par ailleurs, «à renforcer le rôle du Parlement, dans le sens d’un meilleur équilibre entre ses deux chambres et d’un accroissement de ses prérogatives». Le Conseil de la nation (Sénat) aura son mot à dire quant à «l’organisation locale, à l’aménagement du territoire et au découpage administratif» indique le document. La lutte contre la corruption qui a été un des thèmes centraux de la campagne électorale de l’élection présidentielle sera dorénavant inscrite dans la loi fondamentale. Elle insiste sur «la protection de l’économie nationale contre toute forme de malversation ou de détournement, de corruption, de trafic et d’abus, d’accaparement ou de confiscation illégitime». Quelle sanction prévoit-elle contre ceux qui seront pris la main dans le sac? «Tout bien, de quelle nature qu’il soit, acquis par la suite de corruption, est confisqué conformément à la loi» est-il écrit. Pour que les juges puissent, entre autres, mener à bien ce type de mission, il est prévu d’amender l’article 148 de la Constitution. Comment est-il reformulé? «Le juge est protégé contre toute forme de pression, intervention ou manoeuvre de nature à nuire à l’accomplissement de sa mission ou au respect de son libre arbitre. Le juge peut saisir le Conseil supérieur de la magistrature s’il est exposé à l’une de ces situations» indique le nouvel alinéa. L’article 36, quant à lui, consacre et garantit la liberté du culte et d’opinion. Une réponse à ceux qui pointaient du doigt l’Algérie de la décennie noire. Celle à laquelle on a voulu imposer un projet de société basé sur l’intolérance, la restriction des libertés individuelles à travers un islamisme radical. L’Algérie affiche sa diversité tout en assurant à chacun de ses fils la pratique de la religion de son choix. Une autre manière de faire référence à toutes les civilisations qui l’ont marquée pour affirmer l’esprit de tolérance qui a, depuis la nuit des temps, caractérisé son peuple. «La liberté de conscience et la liberté d’opinion sont inviolables. La liberté d’exercice du culte est garantie dans le respect de la loi» mentionne l’article 36 remanié. Les débats sont désormais ouverts. Ils seront caractérisés par une volonté d’écoute incontestable de la part du président de la République. Sous le sceau du consensus. Les consultations n’auront «aucune limite préalable» hormis celles relatives «aux constantes nationales et aux valeurs et principes fondateurs» de la société algérienne, indique la note envoyée par le directeur de cabinet de la Présidence aux personnalités nationales, aux chefs de formations politiques, aux responsables d’organisations ainsi qu’aux compétences nationales. La révision constitutionnelle menée par le président Abdelaziz Bouteflika s’intègre dans «une démarche participative, sincère, afin de parvenir à l’élaboration d’un projet consensuel qui sera soumis, soit à la procédure de révision constitutionnelle appropriée, soit par voie référendaire ou approbation par les deux chambres du Parlement algérien» a indiqué Ahmed Ouyahia. Elle sera «destinée au renforcement de la séparation des pouvoirs, à conforter l’indépendance de la justice et le rôle du Parlement, à l’affirmation de la place et des droits de l’opposition et à garantir les droits et libertés des citoyens», a-t-il ajouté. Rendez-vous est pris pour le mois de juin. L’objectif de cette rencontre sera focalisé sur «un échange sur vos commentaires et propositions relatifs à la révision de la Constitution» a écrit Ahmed Ouyahia à ses convives.
Exit le poste de vice-président?
Sa création qui a été maintes fois abordée, débattue jusqu’à en faire un des amendements potentiels majeurs de la nouvelle Constitution n’a finalement pas été retenue dans les propositions d’amendements rendus publics par la présidence de la République. Cette option qui semble avoir été abandonnée alors qu’elle était au goût du jour au sein même des partis qui ont soutenu la candidature du chef de l’Etat pourrait se justifier par les prérogatives du Premier ministre qui se sont vu renforcées.
Source : L’Expression
https://www.lexpressiondz.com/actualite/194885-ce-qui-va-changer.html
Légende : Le siège du Conseil constitutionnel