La découverte du site du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères (MEAE) constitue toujours un bonheur renouvelé. C’est comme le fameux slogan : « il se passe toujours quelque chose aux Galeries Lafayette ». Un Département ministériel qui est toujours à la pointe du progrès social. On y protège le faible contre le puissant. Le Bien contre le mal. L’honnête homme contre le délinquant potentiel. Un ministère irréprochable à maints égards. Que découvrons-nous sur ce fameux site ?
Ali Baba
Qu’il existe dans l’organigramme de cette Maison de tolérance de multiples structures chargées de faire régner la justice et l’équité. Une inspection générale des Affaires étrangères rattachée au ministre et à son cabinet (signe de sa parfaite indépendance et sa totale impartialité. Elle trouve toujours ce qu’elle cherche et ne trouve jamais ce qu’elle ne cherche pas) ainsi que plusieurs structures rattachées au Secrétaire général de cette noble maison (vive l’indépendance) : un référent déontologue1, une haute fonctionnaire à l’égalité des droits, une médiatrice, un haut fonctionnaire en charge du handicap et de l’inclusion. Au sein de la Direction générale de l’administration et de la modernisation, une déléguée pour la politique sociale, une déléguée aux familles, un sous-directeur des affaires juridiques internes. Une direction des affaires juridiques dont les agents représentent la France dans les contentieux portés devant la Cour de justice de l’Union européenne (Luxembourg) et la Cour européenne des droits de l’homme. De véritables courtisans prêts à tout pour leur Carrière. Tout semble donc parfait dans le meilleur des mondes depuis que les lanceurs d’alerte ont droit de cité au sein du Quai des Brumes.
LES PRINCIPES SONT LES PRINCIPES
Mais, il y a mieux encore que tous les bidules chargés de défendre la veuve et l’orphelin. Depuis janvier 2018, tous les agents peuvent effectuer des signalements auprès du référent déontologue au titre du prestigieux statu de lanceur d’alerte. Il existe même un formulaire en ligne que tout agent peut utiliser en un clic pour infliger une superbe claque au déviant. Pour en savoir un peu plus, il convient de revenir au site diplomatie.gouv.fr sous l’onglet ministère pour découvrir le graal de la société moderne une rubrique intitulée : « lanceur d’alerte ». Qu’y apprend-on ? Pour ceux qui seraient intéressés par la lecture de cet opus magnum, ils pourront se reporter à la fin de ce document intitulé « Lanceurs d’alerte ». Tout est prévu pour protéger les agents du Quai d’Orsay contre les prédateurs qui sévissent dans cet auguste maison. Tout semble encadré sur le plan juridique. Tout semble aller pour le mieux dans le meilleur des mondes. Une bonne petite lettre de dénonciation adressée à la milice ou à la Gestapo et l’affaire est dans le sac. Le délinquant va rendre gorge. La victime va être rétablie dans ses droits. La médiacratie va pouvoir faire son sale boulot de lynchage médiatique se drapant dans les oripeaux de la morale et de la vertu.
LE DROIT ET LE TORDU
Mais au regard de l’expérience passée, certains points soulèvent problème. L’anonymat (présenté sous le vocable de confidentialité) n’est pas nécessairement gage de protection de la personne poursuivi. Comment se défendre efficacement contre un agent dont on vous cache le nom ? On mesure, à travers l’affaire Samuel Paty, les dangers des réseaux sociaux2. Mais, l’on nous explique que tout ceci est encadré. Or, tout le monde sait que la mécanique la plus encadrée peut donner lieu à des emballements difficilement rattrapables. On nous explique que le lanceur d’alerte doit être « désintéressé et de bonne foi ». Critères éminemment subjectifs. Qu’est-ce qu’une « situation grave » et comment la définir objectivement ? Dès le départ, on constate qu’il existe un déséquilibre criant entre les garanties dont dispose le lanceur d’alerte (il ne peut pas faire l’objet de mesure de représailles professionnelles et il est irresponsable pénalement) et l’agent incriminé. Ce qui aboutit à une sorte d’impunité de fait pour le lanceur d’alerte. L’objectif du signalement (« violation grave et manifeste et portant gravement atteinte (ou comportant un risque d’atteinte grave) à l’intérêt général ») est lui aussi flou et ambigu. Comment définir l’intérêt général par rapport aux intérêts particuliers dans cette période de confusion des esprits ? On précise que la loi prévoit en outre un régime de partage de la charge de la preuve favorable au lanceur d’alerte en cas de litige sur le caractère discriminatoire d’une mesure qui aurait été prise à son encontre. Ceci constitue une violation flagrante du droit à un procès équitable (article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales) qui repose sur le principe de la présomption d’innocence et son corollaire la charge de la preuve qui revient à l’accusation et non à la défense. Curieux pour un ministère en charge de la bonne mise en œuvre des conventions internationales signées et ratifiées par la France. Et, cela n’est pas tout, le signalement en cascade est prévu auprès de l’administration, de la justice et de l’opinion publique. Qui définit l’opinion publique de manière objective ? La présentation se conclut par le déroulement de la procédure. Pour sympathique que soit cette procédure, elle donne froid dans le dos tant elle est dérogatoire aux grands principes du droit de la défense mais cela ne gêne pas les syndicats de la Maison qui y sont favorables et même, pour certains, ont poussé à son adoption. Décidemment, le Quai d’Orsay marche sur la tête. Parle-t-on de stratégie dans cette Auguste Maison ? Certainement pas.
LE DIABLE SE CACHE DANS LES DÉTAILS
Encore, un bidule importé des États-Unis, celui du « whistleblowing » que l’on peut traduire par dénonciation en français. Un terme qui nous rappelle les heures sombres de l’histoire de France. Les bonnes lettres de dénonciation que les bons français adressaient à la milice ou à la puissance occupante pour dénoncer mauvais patriotes, résistants, communistes, franc maçons, juifs et autres ignobles individus. Il est vrai que le Quai d’Orsay ne s’est pas manifesté par son courage lorsqu’il avait élu domicile dans une charmante ville d’eaux, Vichy entre 1940 et 1944. La dénonciation y était un sport courant, voire encouragé par la cohorte du maréchal moustache. Les authentiques résistants ne couraient par les rues. À la Libération, la dénonciation fut désignée par le terme de délation et fut considéré comme un délit pouvant valoir de graves ennuis administratifs et judicaires. Au Quai d’Orsay, la commission d’épuration a fonctionné : Paul Morand3, Roger Peyrefitte en firent les frais. Le premier fut rétabli dans ses droits par l’ignoble Conseil d’État. Est-ce cela que nous voulons ? Tout le monde sait, qu’au Quai d’Orsay plus qu’ailleurs, « les règles de déontologie ont une dimension variable au gré des époques »4. Ce qui est toléré pour certains, ne l’est pas pour d’autres. « Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir. » (Jean de la Fontaine, Les animaux malades de la peste). A quoi on pourrait ajouter de nos jours : selon que votre affaire sera obscure ou médiatisée, justement ou injustement, vous serez jugés comme ceci ou comme cela5. Et, les exemples du deux poids, deux mesures sont légions dans la Maison des bords de Seine6. Tout le monde les connaît. Qu’est-il advenu du conseiller diplomatique d’Emmanuel Macron (diplomate du Quai d’Orsay), Emmanuel Bonne, accusé avec sa comparse, Alice Rufo de toutes les turpitudes managériales ?7 Le Monde décide, enfin de sortir de sa torpeur sur le sujet à la fin du mois d’octobre pour faire son travail d’information8. Ce n’est pas trop tôt comme dirait l’autre. Ces deux tristes sires ont sévi plus d’un an avant que la présidence ne lance un audit externe.
OÙ EST PASSÉE L’AUTORITÉ D’ANTAN ?
À un moment où la France traverse une grave crise de confiance9 et d’autorité (« L’autorité est aujourd’hui en miettes dans tous les domaines »10) et où l’on découvre le plan de l’exécutif pour renforcer l’attractivité des métiers et des concours de la Fonction publique11, cette procédure de lanceur d’alerte, qui s’ajoute à la procédure d’évaluation à 360° de l’encadrement supérieur au ministère de l’Europe et des Affaires étrangères12, nous parait dangereuse à tout le moins, en plus d’être contreproductive Au Quai d’Orsay, il n’y a qu’un pas entre le noble statut du lanceur d’alerte et celui du vulgaire délateur ! La délation semble inscrite dans son ADN aussi bien que la diplomatie de l’esbrouffe. À quand un audit externe, réellement indépendant de cette maison en ruines, de ce chef d’œuvre en péril ? On y découvrirait des choses passionnantes sur le fonctionnement opaque et étrange de cette Maison qui se pique de transparence et d’exemplarité.
LANCEURS D’ALERTE (diplomatie.gouv.fr )
Début de citation :
Les lanceurs d’alerte bénéficient désormais d’un statut et d’une protection accordés par la loi : garanties de confidentialité, interdiction de mesures disciplinaires ou discriminatoires, irresponsabilité pénale. Toutefois, les critères de validation du signalement sont strictement encadrés. Et tout signalement abusif peut entrainer des conséquences sur le plan pénal ou disciplinaire.
Définition du lanceur d’alerte
Un lanceur d’alerte est « une personne physique qui révèle ou signale, de manière désintéressée et de bonne foi, un crime ou un délit, une violation grave et manifeste d’un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France, d’un acte unilatéral d’une organisation internationale pris sur le fondement d’un tel engagement, de la loi ou du règlement, ou une menace ou un préjudice graves pour l’intérêt général, dont elle a eu personnellement connaissance (Article 6 de la loi du 9 décembre 2016). »
Résumé des conditions du signalement
Qui peut émettre un signalement ?
Toute personne physique agissant de manière désintéressée et de bonne foi.
Quelle situation grave peut être signalée ?
Les crimes (vol aggravé, viol, faux en écriture publique…) et délits (corruption, prise illégale d’intérêts, trafic d’influence, usage illégal de fonds publics, harcèlement moral ou sexuel, discrimination…), la violation grave et manifeste d’un traité international, d’une loi ou d’un règlement, toute menace grave à l’intérêt général.
Quelles sont les garanties dont bénéficie le lanceur d’alerte ?
La protection du lanceur d’alerte est triple : le caractère strictement confidentiel de la procédure, l’interdiction des mesures de représailles professionnelles et l’irresponsabilité pénale du lanceur d’alerte. Pour bénéficier de la protection complète, le lanceur d’alerte doit appartenir à la structure (le ministère de l’Europe et des affaires étrangères, par exemple) dont il signale un dysfonctionnement grave.
Quels sont les risques auxquels s’expose le lanceur d’alerte en cas de signalement abusif ?
Il encourt les peines prévues par le Code pénal pour dénonciation calomnieuse. L’agent public s’expose en outre à des poursuites disciplinaires.
Pour émettre un signalement, vous devez remplir un certain nombre de conditions et critères :
Qui peut émettre un signalement ?
Toute personne physique est susceptible de bénéficier du statut de lanceur d’alerte et, s’il est agent public, des garanties qui lui sont associées (irresponsabilité pénale et protection contre les représailles professionnelles).
Ce régime n’est pas limité aux seuls collaborateurs du ministère de l’Europe et des affaires étrangères, bien que ceux-ci soient, en tant qu’agents publics, spécifiquement concernés par les dispositions de la loi du 13 juillet 1983 modifiée relatives aux signalements et alertes (articles 6 à 6 ter A, et 6 quinquiès notamment). Ce statut peut s’appliquer aux agents de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger et d’Expertise France ou également, par exemple, aux collaborateurs occasionnels du ministère de l’Europe et des affaires étrangères.
Seules les personnes morales sont exclues du régime du lanceur d’alerte (par exemple une entreprise qui candidate à un marché public, une association qui sollicite une subvention ou une habilitation à l’adoption internationale, un syndicat).
Champ de l’alerte
L’intervention du lanceur d’alerte doit être avant tout justifiée par une violation grave et manifeste et portant gravement atteinte (ou comportant un risque d’atteinte grave) à l’intérêt général.
La loi du 9 décembre 2016 prévoit que le champ de l’alerte professionnelle recouvre l’ensemble des faits susceptibles d’être qualifiés :
1° de crime ou de délit au sens de la législation pénale française ;
2° de conflit d’intérêts
3° de violation grave et manifeste d’un engagement international de la France ou d’un acte unilatéral d’une organisation internationale pris sur le fondement d’un tel engagement ;
4° de violation grave et manifeste de la loi ou du règlement ;
5° et plus généralement de toute menace ou de tout préjudice grave pour l’intérêt général.
Un signalement doit viser l’amélioration du fonctionnement du service public et servir l’intérêt général. Il ne peut, sous peine d’être écarté, concerner des situations individuelles ou être motivé par des considérations personnelles.
Les trois caractéristiques du signalement
L’auteur du signalement doit :
1) Avoir eu une connaissance personnelle des faits et agir 2) de manière désintéressée (le signalement doit servir l’intérêt général et non viser une situation personnelle ou la satisfaction d’un intérêt particulier) et 3) de bonne foi pour espérer bénéficier du statut de lanceur d’alerte, quel que soit l’intérêt public en cause.
À l’inverse, lorsqu’il a la connaissance au moins partielle de l’inexactitude des faits ou bien lorsqu’il a procédé à ce signalement avec l’intention de nuire, il encourt les peines prévues par l’article 226-10 du code pénal relatives aux dénonciations calomnieuses.
Quelles sont les garanties dont bénéficie le lanceur d’alerte ?
Le caractère strictement confidentiel de la procédure
La procédure mise en œuvre pour recueillir les signalements garantit une stricte confidentialité de l’identité des auteurs du signalement, des personnes visées par celui-ci et des informations recueillies par l’ensemble des destinataires du signalement. Ainsi, les éléments de nature à identifier le lanceur d’alerte ne pourront être divulgués qu’avec le consentement de celui-ci. De plus, les éléments de nature à identifier la personne mise en cause par un signalement ne peuvent être divulgués qu’une fois établi le caractère fondé de l’alerte.
Toutefois la communication entre agents liés par des relations administratives hiérarchisées, d’un secret acquis dans l’exercice des fonctions, pour les besoins du service, ne constitue pas une révélation susceptible de tomber sous le coup de la loi pénale. Il en est de même pour la transmission des éléments à l’autorité judiciaire.
L’interdiction de toute mesure de représailles professionnelles
Aucun agent public ne pourra faire l’objet ni de mesure disciplinaire ni de mesure discriminatoire directe [1] ou indirecte [2] concernant notamment le recrutement, la titularisation, la rémunération, la formation, l’évaluation, la notation, la discipline, la promotion, l’affectation et la mutation pour avoir signalé une alerte dans le respect des conditions prévues par la loi [3].
La loi prévoit en outre un régime de partage de la charge de la preuve favorable au lanceur d’alerte en cas de litige sur le caractère discriminatoire d’une mesure qui aurait été prise à son encontre. Ainsi, dès lors que la personne présente des éléments de fait qui permettent de présumer qu’elle a relaté ou témoigné de bonne foi de faits entrant dans le champ de l’alerte professionnelle, il incombe à la partie défenderesse, au vu des éléments, de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à la déclaration ou au témoignage de l’intéressé. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles [4].
Le cas échéant, la juridiction pourra prescrire la réintégration d’un agent ayant fait l’objet d’un licenciement, d’un non-renouvellement de son contrat ou d’une révocation, y compris lorsque cette personne était liée par une relation à durée déterminée [5].
L’irresponsabilité pénale du lanceur d’alerte
La loi [6] prévoit une irresponsabilité pénale du lanceur d’alerte pour toute atteinte au secret professionnel, dès lors que cette divulgation est nécessaire et proportionnée à la sauvegarde des intérêts en cause, qu’elle intervient dans le respect des procédures de signalement définies par la loi et que la personne répond aux critères de définition du lanceur d’alerte.
En revanche, les atteintes au secret de la défense nationale, au secret médical ou au secret des relations entre un avocat et son client ne sont pas concernées par cette irresponsabilité pénale [7].
Quels sont les risques auxquels s’expose le lanceur d’alerte ?
Sur le plan pénal : lorsqu’il a la connaissance au moins partielle de l’inexactitude des faits ou bien lorsqu’il a procédé à ce signalement avec l’intention de nuire, le lanceur d’alerte encourt les peines prévues par l’article 226-10 du code pénal relatives aux dénonciations calomnieuses. Si les dénonciations sont susceptibles d’être qualifiées de crime ou de délit, au sens de la loi pénale française, le ministère pourra aviser le parquet en application de l’article 40 du code de procédure pénale [8].
Sur le plan disciplinaire : le ministère pourra engager, le cas échéant, une procédure disciplinaire contre l’auteur d’un signalement susceptible d’être considéré comme abusif ou qualifié de crime ou de délit.
Quelle est la procédure d’émission de signalement ?
Pour les agents publics n’ayant pas accès à l’intranet du ministère de l’Europe et des affaires étrangères (par exemple, les agents des instituts et centres culturels ou de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger), pour les agents de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger et d’Expertise France, pour les consuls honoraires de France et les autres collaborateurs occasionnels du ministère, a été établie une procédure de recueil et de traitement des signalements concernant le ministère.
L’arrêté du ministre en date du 4 septembre 2017 confie au référent déontologue du ministère le recueil des signalements (référent « lanceurs d’alerte »).
Un signalement en cascade (la loi a prévu trois niveaux successifs de signalement) :
– auprès de l’administration ;
– auprès de la justice ;
– auprès de l’opinion publique.
Une gradation des canaux de signalement en trois niveaux
Le lanceur d’alerte ne cherche pas à déstabiliser l’organisation à laquelle il s’adresse mais plutôt à l’aider à corriger les défaillances qui l’affaiblissent : c’est pourquoi il doit agir de manière graduée et proportionnée. À cette fin, l’article 8 de la loi du 9 décembre 2016 prévoit trois niveaux successifs d’alerte :
1er niveau : le signalement devra être transmis au sein de l’administration. Il pourra être adressé à l’autorité hiérarchique ou au référent lanceurs d’alerte, par voie dématérialisée ou matérialisée. Le lanceur d’alerte peut également choisir d’adresser son signalement par courrier postal.
2ème niveau : dans un second temps, le signalement pourra être adressé à une autorité administrative et judiciaire [9] ou à un ordre professionnel compétent : en l’absence de vérification, dans un délai raisonnable, de la recevabilité du signalement par sa hiérarchie ou par le référent lanceurs d’alerte, l’auteur du signalement pourra saisir directement l’une de ces autorités. Il en sera de même en cas de danger grave et imminent ou en présence d’un risque de dommages irréversibles.
3ème niveau : enfin, en dernier ressort et à défaut de traitement dans un délai de trois mois, le signalement pourra être rendu public en cas de danger grave et imminent ou en présence d’un risque de dommages irréversibles.
Détails du traitement interne du signalement
1e étape : recueil du signalement par le référent lanceurs d’alerte
La loi du 9 décembre 2016 permet d’adresser indifféremment son signalement à l’autorité hiérarchique ou au référent lanceurs d’alerte.
2e étape : vérification de la recevabilité du signalement par le référent lanceurs d’alerte
Le référent lanceurs d’alerte doit informer l’auteur du signalement [10] de la bonne réception de celui-ci par l’envoi d’un accusé de réception ; il lui précisera également le délai raisonnable et prévisible nécessaire à l’examen de sa recevabilité ainsi que les modalités suivant lesquelles il sera informé des suites données à son signalement. Le cas échéant, le référent pourra demander des éléments complémentaires lorsque le signalement n’est pas suffisamment étayé pour lui permettre d’en apprécier la recevabilité.
L’auteur du signalement doit s’identifier, étant entendu que son identité doit être traitée de façon confidentielle par le destinataire. Les éléments de nature à identifier l’auteur d’un signalement ne peuvent être divulgués, sauf à l’autorité judiciaire et seulement avec le consentement de la personne. Le signalement ne doit donc pas être anonyme. La connaissance de l’identité de l’auteur permet en effet de mettre en œuvre les garanties et protection auxquelles il a droit, si son signalement est considéré comme recevable.
L’examen de la recevabilité du signalement devra s’exercer au regard de définition du lanceur d’alerte et du respect des procédures de signalement définies par la loi.
Lorsque le traitement conduit à révéler un secret protégé par la loi, l’examen de sa recevabilité devra mettre en balance la nécessité et proportionnalité de cette divulgation au regard de la sauvegarde des intérêts en cause. En tout état de cause, les faits, informations ou documents, quel que soit leur forme ou leur support, couverts par le secret de la défense nationale, le secret médical ou le secret des relations entre un avocat et son client sont exclus du régime de l’alerte : le traitement de tout signalement qui conduirait à la révélation de l’un de ces secrets ne pourra qu’être écarté par le référent lanceurs d’alerte.
3e étape : traitement du signalement et la transmission aux autorités compétentes
Le référent lanceurs d’alerte disposera d’un délai de trois mois pour traiter le signalement des agents. Une fois ce délai écoulé, le signalement pourra être rendu public.
Après avoir examiné la recevabilité du signalement et procédé aux premières vérifications, si le référent n’entend pas donner de suite à celui-ci, il devra en informer son auteur et les personnes visées, et détruire l’ensemble des éléments constitutifs du dossier de signalement dans un délai de deux mois à compter de cette information de classement sans suite [11].
Au contraire, s’il estime que le signalement est suffisamment sérieux, il pourra saisir :
• le supérieur hiérarchique d’un agent mis en cause dans une situation de conflit d’intérêts, afin que celui-ci puisse prendre les mesures nécessaires pour y mettre fin ou enjoindre au fonctionnaire de faire cesser cette situation dans un délai qu’elle détermine. Si l’agent en cause est soumis à une déclaration d’intérêts et que l’autorité hiérarchique ne s’estime pas en mesure d’apprécier si le fonctionnaire se trouve en situation de conflit d’intérêts, celle-ci transmettra la déclaration d’intérêts de l’intéressé à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique qui lui adressera en retour ses recommandations ;
• la Haute autorité pour la transparence de la vie publique en cas de soupçon grave d’enrichissement personnel dans laquelle se trouverait un agent soumis à une déclaration de patrimoine. Celle-ci pourra, le cas échéant, demander au fonctionnaire toute explication nécessaire à l’exercice de sa mission de contrôle des déclarations de situation patrimoniale ;
• la sous-direction des affaires juridiques internes lorsque les faits signalés sont passibles d’une sanction disciplinaire ou susceptibles d’être qualifiés de crime ou de délit, au sens de la loi pénale française, afin d’engager, le cas échéant, une procédure discipline ou d’aviser le parquet en application de l’article 40 du code de procédure pénale [12].
[1] Au sens de l’article 1 de la loi du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, constitue une discrimination directe la situation dans laquelle une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre ne l’est, ne l’a été ou ne l’aura été dans une situation comparable.
[2] Au sens du même article, constitue une discrimination indirecte une disposition, un critère ou une pratique neutre en apparence, mais susceptible d’entraîner un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d’autres personnes, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un but légitime et que les moyens pour réaliser ce but ne soient nécessaires et appropriés.
[3] Articles 6 à ter A, et 6 quinquiès de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983
[4] Article 6 ter A de la loi du 13 juillet 1983
[5] Article L. 911-1-1 du code de justice administrative.
[6] Article 122-9 du code pénal.
[7] Article 6 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016.
[8] Voir, en ce sens, la note de service du secrétaire général du 9 novembre 2005 relative à la mise en œuvre des dispositions de l’article 40 du code de procédure pénale au Département.
[9] A ce titre, toute personne peut adresser son signalement au Défenseur des droits afin d’être orientée vers l’organisme approprié de recueil de l’alerte.
[10] Conformément aux dispositions du 1° du II de l’article 5 du décret n° 2017-564 du 19 avril 2017 relatif aux procédures de recueil des signalements émis par les lanceurs d’alerte.
[11] Conformément aux dispositions du 3° du II de l’article 5 du même décret.
[12] Voir, en ce sens, la note de service du secrétaire général du 9 novembre 2005 relative à la mise en œuvre des dispositions de l’article 40 du code de procédure pénale au Département.
J’ai pris connaissance des conditions dans lesquelles le signalement peut être émis et je souhaite émettre un signalement13.
Fin de citation
Il n’y a plus qu’à se lancer à l’eau pour le lanceur d’alerte ! Pour le Département, une révolution nationale s’impose. Dans le cadre d’une nouvelle décentralisation, comme l’on a exporté quelques services du ministère des étranges affaires vers Nantes (comptabilité, état-civil, école consulaire) ou l’ENA à Strasbourg, l’on pourrait imaginer de faire émigrer le 37 Quai d’Orsay et son annexe de la rue de la Convention vers l’Allier à Vichy. Le service en charge de la logistique pourrait récupérer feu l’hôtel du Parc et l’hôtel des ambassadeurs qui respirent encore l’ambiance de la délation institutionnalisée ! Tout ceci serait parfait.
Ali Baba
Proche et Moyen-Orient.ch
2 novembre 2020
Notes
1 https://cfdt-mae.fr/revendications/parcours-professionnels/referent-deontologue-ministere-de-leurope-affaires-etrangeres-disposera-dun-large-champ-daction-12102017/
2 Nathalie Heinich, Les ravages décivilisateurs des réseaux sociaux, Le Monde, 27 octobre 2020, p. 31.
3 Éric Roussel, La face sombre de Paul Morand. Paul Morand triste diariste de Vichy, Le Figaro littéraire, 29 octobre 2020, pp. 1-2-3
4 Jean-Pierre Jouyet, L’envers du décor, Albin Michel, 2020, p. 261.
5 https://www.legavox.fr/blog/maitre-loeiz-lemoine/selon-vous-serez-puissant-miserable-25312.htm
6 Franck Renaud, Les diplomates. Derrière la façade des ambassades, Nouveau Monde éditions, 2011.
7 Jean Daspry, Management brutal, diplomatie bancale…, www.prochetmoyen-orient.ch , 19 octobre 2020.
8 Piotr Smolar, Diplomates au bord de la crise de nerfs, Le Monde, 27 octobre 2020, pp. 22-23.
9 Julie Carriat, La République en marche s’inquiète pour le moral des Français, Le Monde, 27 octobre 2020, p. 12.
10 Thibault de Montbrial, Osons l’autorité, éditions de l’Observatoire, 2020.
11 https://www.acteurspublics.fr/articles/le-plan-de-lexecutif-pour-renforcer-lattractivite-des-metiers-et-des-concours-de-la-fonction-publique
12 Roseline Letteron, L’évaluation par la délation au Quai d’Orsay, www.libertescheries.blogspot.com, 11 janvier 2012.
13 https://www.diplomatie.gouv.fr/fr/le-ministere-et-son-reseau/lanceurs-d-alerte/