Les désirs d’indépendance se multiplient, dans le Biafra et ailleurs…

Le Biafra, éphémère république.
La réaction des militaires a été, une fois encore, disproportionnée face à la grogne des organisations indépendantistes du sud-est du pays. L’opération « danse du python » montée par l’armée nigériane s’est révélé être plus qu’une démonstration de force mais une véritable répression à l’encontre de ceux qui se réclament de l’esprit sécessionnistes biafrais des années 1960.
La mission visait essentiellement les partisans de l’IPOB (Indigenous People of Biafra, Peuple indigène du Biafra) et leur leader, Nnamdi Kanu, au centre de toute l’agitation biafraise depuis 2015. Plusieurs militants ont été arrêtés et les soldats se sont rendus coupables de brutalités, d’exécutions sommaires et de torture. Selon Amnesty international, il y a déjà eu 150 membres de l’IPOB tués au cours de la journée de commémoration, le 30 mai dernier.
Le silence assourdissant qui entoure cette agitation indépendantiste biafraise révèle l’ambiguïté de l’opinion nigériane. Certains pensent qu’il faut mettre un terme tout de suite à l’activisme séparatiste, tandis que d’autres estiment que la réponse militaire ne peut que populariser ce mouvement, encore embryonnaire et anéantir toute change d’établir un quelconque dialogue.
L’affaire biafraise est une succession de catastrophes. En 1967, la déclaration de sécession proclamée par le colonel Ojukwu a plongé le Nigeria dans trois ans d’une terrible guerre civile. Après le rattachement des Etats biafrais à la fédération nigériane et durant tout le temps de la dictature militaire, le calme a régné. En 1999, un certain Ralph Uwazurike a mis en place le Mouvement pour la réactivation de l’Etat souverain du Biafra (Movement for the Actualisation of the Sovereign State of Biafra, Massob), mais sans succès : le rêve populaire biafrais était bel et bien mort. Le mouvement de Nnamdi Kanu l’a remis au goût du jour. Arrêté en octobre 2015 et détenu arbitrairement pendant un an, il a été libéré sur parole et s’est alors empressé de reprendre ses activités subversives.
Les observateurs ne manquent pas de voir la résurgence de l’irrédentisme biafrais comme un désir de s’en prendre à l’administration du président Muhammadu Buhari, un homme du Nord ; rien de tel ne s’étant passé lors de la présidence de Goodluck Jonathan, sudiste. D’autres préfèrent penser que la chute des cours du pétrole, l’affaiblissement de la monnaie nationale et le poids de la dette sont autant de charges qui pèsent sur le niveau de vie et le pouvoir d’achat et qui provoquent le mécontentement populaire. Dès lors, tous les éléments sont réunis pour que naissent et prospèrent des mouvements comme celui du Biafra, celui du sud-ouest pour la création d’une république yoruba, ou celui visant à former une république du delta du Niger, ou même dans le nord, où les Haoussa majoritaire rêvent aussi d’indépendance.