La richesse musicale et les multiples influences font de ce premier album, tout simplement intitulé Yasmine Hamdan, paru chez Kwaidan Records, une œuvre iconoclaste. La chanteuse libanaise, en effet, a repris des classiques de la musique arabe pour les remixer à sa manière. Résultat, un mélange entre pop, musique orientale et électro et une voix particulière qui donnent un univers mélancolique, mais rythmé.
Votre style musical sort des sentiers battus. Comment le qualifieriez-vous ?
Je n’ai pas de style particulier. Lorsque je travaille sur un album, je suis mes envies tout simplement. Parfois, ça part d’un rien. Un instrument me plaît, je l’utilise et l’idée d’un morceau prend forme. Mes différentes collaborations et rencontres avec les artistes me poussent également à expérimenter, voyager et aller dans d’autres directions. C’est cette démarche qui me stimule.
Dans votre album, vous reprenez des standards de la chanson arabe. Pourquoi ce choix ?
La raison pour laquelle je me suis mise sérieusement au chant et à la composition, c’est ma rencontre avec les anciennes musiques arabes. J’étais une adolescente dans le Liban d’après-guerre et je n’avais pas vraiment de repères dans la mesure où, pour fuir les problèmes, ma famille avait dû habiter plusieurs pays. Je me sentais seule dans cet environnement ou les gens sont très attachés à leurs rituels et autres codes. À cette époque, j’écoutais Cypress Hill, Radiohead, Leonard Cohen, Nina Simone et je chantais en anglais. Dès que j’ai commencé à écouter de la musique arabe, j’ai flashé sur des artistes comme Abdel Wahab ou Asmahan, et cela m’a permis de renouer avec mon passé. C’est donc la musique arabe et l’envie de chanter en arabe qui m’ont poussée à mener une carrière musicale. Je sentais qu’il y avait beaucoup de choses à expérimenter. Ces vieilles chansons m’ont permis de me réconcilier avec une culture qui était la mienne et de reconstituer une mémoire un peu fragmentée. Malgré les déplacements incessants quand j’étais enfant, j’ai maintenu mon attachement à ma culture et j’ai toujours été nourrie par elle.
Par rapport à la musique mainstream, le fait de chanter en arabe représente-t-il une forme de « révolte culturelle » ?
Je n’irai pas jusque-là. Et je n’ai pas la prétention d’entreprendre une révolte culturelle. Je suis tombée amoureuse de la musique arabe, mais, dans ma démarche, je ne cherche pas à perpétrer les codes d’une tradition. J’ai pris une partie de ce que j’aimais de la musique traditionnelle ou classique arabe pour la travailler dans un environnement qui me ressemble plus. Un environnement cosmopolite tantôt électro, tantôt « pop ». J’essaie de prendre des risques musicalement parlant pour ne pas rester enfermée dans le registre classique. En tant qu’artiste venant du monde arabe j’ai une responsabilité. Celle de ne pas correspondre aux clichés et stéréotypes de la musique orientale. Et celle de travailler autour de mon identité et de mon rapport avec celle-ci.
Si vous étiez une autre chanteuse arabe, qui seriez-vous ?
Je serais Abdel Wahab, même si c’est un chanteur (rires). Pour certaines chansons je pourrais être Najat, pour d’autres Fayrouz, Asmahan ou encore Oum Kalthoum. J’ai de gros coups de cœur pour tous ces artistes. Ils représentent la richesse de notre culture.
Un dernier mot sur votre actualité ?
J’ai des collaborations dans le cinéma, le théâtre. Je sors l’album au Moyen-Orient cet hiver et j’ai des projets de distributions aux États-Unis et certains pays européens. Sinon, je suis constamment en promo et je continue à faire des concerts un peu partout.