Le souverain alaouite court-circuite son gouvernement en s’en prenant aux seconds couteaux et aux minables de la petite corruption.
Une dépêche de l’agence officielle marocaine MAP fait le buzz de l’actualité du royaume chérifien. Et pour cause, elle nous informe qu’après enquête, le roi a ordonné la mise aux arrêts d’une brochette de gendarmes, douaniers et policiers des frontières, à la suite d’une série de plaintes adressées à son cabinet par de nombreux Marocains résidant à l’étranger (MRE), venus passer leurs vacances avec leurs familles au Maroc. Ces derniers se sont récemment plaint des mauvais traitements que leur ont fait subir les autorités aux postes frontières. « Sa Majesté le roi va suivre personnellement ce dossier, qui ternit l’image du Maroc et des Marocains, afin d’empêcher que de tels agissements nuisibles se reproduisent », annonce un communiqué du cabinet royal, publié par la MAP. Ni le cabinet royal, ni l’agence MAP ne donnent plus de détails sur l’affaire, relève le site Yabiladi, qui parle d’« un véritable coup de balai que vient de subir le corps de la sécurité nationale ». « La date et le lieu des faits mis en cause, ainsi que le nombre de personnes arrêtées, n’ont pas été fournis non plus », précise le site dédié à l’actualité des Marocains de l’étranger.
Le roi du Maroc a souvent recours à ce modus operandi, en agissant directement dans certaines affaires. Visites inopinées dans des orphelinats, où des enfants sont maltraités, destitution de tel ou tel responsable d’entreprises publiques à la suite à d’enquêtes diligentées directement par le Palais, etc. Souvent d’ailleurs, le roi réagit au quart de tour lorsqu’il s’agit d’affaires en relation avec la communauté marocaine à l’étranger dont il se veut le protecteur. Une communauté qui, on le sait, est stratégique pour le pouvoir, que ce soit pour des raisons politiques, sécuritaires ou économiques.
Si une partie de l’opinion publique y voit une forme de sollicitude royale bienvenue pour ses sujets, beaucoup y décèlent aussi une manière pour le trône d’assurer la suprématie de la « monarchie exécutive » sur le gouvernement et les élus de la nation. Un mode de gouvernance qui fait jaser sur la Toile, où l’expression est plus libre. La dépêche MAP a ainsi suscité des commentaires critiques sur Internet : « L’antre de la corruption, c’est le Palais lui-même », écrit en substance sur Facebook Salah El Ayoubi, un opposant du régime installé à l’étranger, très actif sur les réseaux sociaux qui souligne le silence assourdissant du monarque lorsque des affaires similaires, voire plus graves, éclaboussent son entourage immédiat. « S’en prendre aux seconds couteaux et aux minables de la petite corruption, n’a jamais fait avancer les vélos de la lutte anti-corruption. Il se trouvera toujours quelqu’un pour reprendre le flambeau, arguant du fait qu’en « haut lieu », ce sont les « élites »qui donnent le signal », assène-t-il.