Pour les médias occidentaux, un journaliste étranger, surtout quand il n’est pas occidental, ne devrait répondre, au nom de la prétendue liberté d’expression, à aucune infraction de la loi, y compris celle qui, sous le nom de code de l’information, encadre cette activité et les devoirs et obligations de corporation. L’affaire d’Ihsane El Kadi, opposant algérien et directeur d’une radio non autorisée et qui, de surcroit, financée par l’étranger est emblématique. Le déchainement de certains médias français, y compris étatiques, contre l’État algérien est pathétique. Surtout quand cet activiste cathodique « démocrate », directeur d’une Radio illégale qui se fait appeler Radio M, est soutenu et applaudi par le mouvement Rachad, une survivance du FIS, un mouvement classé par la justice algérienne comme terroriste, tout comme le MAK, l’autre mouvement sécessionniste !
Par Philippe Tourel
Condamné pour avoir enfreint la loi sur l’audiovisuel, en émettant sur le territoire national algérien sans autorisation, Ihsane El Kadi a été également condamné non pas en sa qualité de journaliste, mais surtout pour avoir reçu de l’étranger un financement non déclaré pour sa radio. Ses accointances avec des mouvements qualifiés de terroristes par les tribunaux algériens, sont de nature à aggraver son cas.
Rappelons la loi française dans ce domaine. L’autorisation de l’utilisation des fréquences pour la fourniture de services de communication électronique incombe aux autorités administratives indépendantes. L’utilisation des fréquences radio sur le territoire national, dans les conditions autorisées, constitue un mode d’occupation privatif du domaine public de l’Etat conformément à l’article L41-1 du Code des postes et des communications électroniques (CPCE).
Quant aux web radio (c’est le cas de Radio M), le régime qui leur est applicable est défini par l’article 33-1 de la loi du 30 septembre 1986. Il prévoit que ces services sont soumis au régime du conventionnement par le Conseil ou, par dérogation, à celui de la déclaration. Notons enfin, qu’en France, tout créateur de webradio doit s’acquitter d’un droit auprès de la Société des auteurs et compositeurs de musique (SACEM) ou d’autres sociétés d’ayants droit. Or M. El-Kadi n’a pas daigné demander ni une dérogation ni une autorisation quelconque. Ce qui est punissable par la loi.
Autre violation grave de la loi algérienne, celle relative au financement des médias. L’Algérie interdit tout financement étranger d’un média national, comme le font la majorité écrasante des pays dans le monde. Or les médias créés par El Kadi (Radio M, Maghreb émergeant) n’ont pas déclaré ces financements multiformes reçus (argent, formation, voyages, équipement…), ce qui constitue une violation flagrante de la loi.
Faut-il souligner que plusieurs pays occidentaux peu soupçonnés de restreindre la liberté d’expression, exigent une transparence totale sur le financement étranger des médias. C’est le cas de la France et des États-Unis, suivis dernièrement par la Russie. Les médias et les Ongs qui reçoivent un financement étranger devraient se définir comme « agents d’une puissance étrangère ». Ce fut le cas avec la télévision d’Etat russe RT, qui a par la suite a été interdite « au nom de la sécurité nationale » aux États-Unis, au Canada et sur l’ensemble des pays de l’Union européenne. Ces mêmes pays qui financent des ONG, des médias et des activistes politiques dans le monde, du même type que Radio M mais qui oublient de balayer devant leurs portes. Le sort d’un Julian Assange, jeté depuis des dans les geôles très démocratiques du gouvernement de Sa Majesté britannique, qui risque de l’extrader vers les geôles étatsuniens pour y crever, ne semble guère émouvoir la bonne conscience des donneurs de leçons de démocratie et de libertés d’expression…
Notons qu’El Kadi a été poursuivi pour quatre chefs d’inculpations à savoir « réception de fonds depuis l’étranger afin faire de la propagande politique », « réception de fonds depuis l’étranger pour commettre des actes contre la sécurité de l’État et l’unité nationale », « publication de tracts de nature portant atteinte à l’intérêt national » et « collecte de fonds sans autorisation ».
Le soutien apporté par des mouvements qualifiés de terroristes à Ihsane El Kadi risque de lui porter tort dans la mesure où pourrait s’ajouter un autre chef d’accusation, à savoir complicité de terrorisme !
Philippe Tourel