L’Algérie, un des plus gros acheteurs de blé au monde, avait jusque-là une préférence pour le blé français. Mais question de compétitivité ou de géopolitique, Alger préfère aujourd’hui acheter du côté de la mer Noire. RFI (revue de presse)
Par :Marie-Pierre Olphand
Le blé serait-il devenu le reflet de la complexité des relations France-Algérie ? Les experts en matières premières s’avancent peu sur le terrain politique mais, à l’instar de Marc Zribi, chef de l’unité Grains et sucre de FranceAgriMer, ils s’interrogent, car les achats de blé français par l’Algérie ont rarement été si bas ces dernières années.
En année classique, (en dehors de 2020 année hors norme), l’Algérie achète entre 4 et 5 millions de tonnes de blé français. C’est la moitié des épis bleu blanc rouge exportés hors Union européenne par la France qui partent traditionnellement ces dernières années en Algérie, partenaire de proximité idéal. Mais la Russie, premier vendeur de blé au monde est entré dans l’arène et fait pression depuis plusieurs années pour gagner des parts de marché de l’autre côté de la Méditerranée. Et pour cause, le pays est dans le top 5 des acheteurs de blé.
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Un cahier des charges algérien désormais favorable au blé russe
Il y a plusieurs mois, le cahier des charges algérien, jusque-là presque fait sur mesure pour le blé français, a été ouvert pour permettre aux fournisseurs de blé de la mer Noire de répondre aux appels d’offre. Fin 2021, Alger est allé plus loin et a modifié profondément ses textes. Résultat, « les critères sont devenus défavorables au blé français et au profit du blé d’origine russe », explique Sébastien Poncelet, directeur du développement au sein du cabinet Agritel.
« Cela ne veut pas dire que la France ne pourra plus vendre à l’Algérie, mais il faudrait qu’elle soit plus compétitive que les blés de la mer Noire et qu’elle ait les volumes nécessaires correspondant à la nouvelle qualité de blé recherchée par les Algériens », explique notre interlocuteur. Ce qui n’est pas gagné.
Les prochains achats de l’Algérie scrutés à la loupe
Officiellement, il n’a jamais été question de boycott, mais cela est ressenti comme tel en France par plusieurs opérateurs de marché. « Le mot bouderie n’est pas assez fort, dit même l’un d’eux, parce qu’il sous-entend que l’on va se reparler ». Certains se préparent d’ailleurs à ce que plus un seul gramme de blé français ne soit vendu à l’Algérie d’ici à la fin de la campagne, le 30 juin.
Un scénario catastrophe qui obligerait la France à s’aligner sur ses concurrents pour gagner de nouveaux marchés. Sans garantie aucune d’atteindre les quantités achetées jusque-là par le voisin algérien.
La conséquence de la perte, même temporaire, de ce débouché algérien se fait déjà sentir, notamment sur les stocks qui ont été revus à la hausse.
RFI
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