Jamais, jusque-là, un homme d’État en exercice n’avait comparu devant la Cour pénale internationale (CPI). Le vice-président kenyan a eu l’honneur de cette première, le 10 septembre dernier, en compagnie du journaliste Joshua arap Sang. Son procès, ainsi que celui du président kenyan, Uhuru Kenyatta, présumé coupable de crimes contre l’humanité (meurtres, déportation ou transfert forcé de population, viols, autres actes inhumains et persécutions) commis au cours des violences postélectorales de 2008, devrait durer deux ans. L’affaire de trop pour les Kenyans qui estiment, à juste titre, que la CPI, ne s’en prend qu’à des cibles africaines. Ils dénoncent une approche « raciste » et « néocolonialiste » de la justice internationale. Déjà, en mai dernier, au cours du sommet marquant les 50 ans de l’Union africaine, les participants avaient discuté sur la meilleure stratégie pour obtenir l’abandon des poursuites contre Uhuru Kenyatta fraîchement élu. Les dernières élections se sont déroulées dans le calme et sans bavures et les poursuites, comme certains le craignent, pourraient raviver des plaies à peine refermées.
Le 5 septembre dernier, l’Assemblée nationale a voté à la majorité un texte demandant au gouvernement de retirer le pays du statut de Rome. « Aucun groupe de pays ne devrait avoir le contrôle ou le monopole des institutions internationales ou de l’interprétation des traités internationaux », a déclaré le président lors de son investiture, en avril 2013, alors que sa volonté de coopérer avec la CPI et de se rendre à La Haye avait été un thème fort de sa campagne. Impressionné par les images de son vice-président dans le box des accusés à La Haye, faisant face à un grand nombre de témoins déterminés, Uhuru semble avoir changé d’avis et ne se rendra probablement pas aux autorités de la CPI. Il pourrait alors faire l’objet d’un mandat d’arrêt international.