« Baba Marzoug » pour les Algériens, « La Consulaire » pour les Français. Ce sont les deux noms d’une même pièce d’artillerie. Selon Ouest-France, l’Algérie réclame aujourd’hui la restitution de ce canon, qui fut autrefois le plus puissant de la Méditerranée.
Le canon de 7 mètres de long, ramené comme butin de guerre par la France en 1830, trône depuis cette 1833 dans l’arsenal de Brest. Érigé en colonne, il est aujourd’hui surmonté d’un coq retenant sous ses pattes un globe terrestre, symbole de la domination française sur le monde à l’époque de son apogée colonial.
Avant d’être ramené en métropole par le comte de Bourmont à l’issue de la conquête de l’Algérie – et renommé « La Consulaire » —, « Baba Marzoug » a défendu Alger pendant deux siècles. Il était capable d’expédier un boulet à près de 5 kilomètres ! De quoi tenir en respect les navires adverses. Pesant 12 tonnes de bronze, le canon a été fondu au XVIe siècle à Venise pour le compte de l’Empire ottoman, alors puissance occupante. Il a pendant longtemps alimenté la réputation d’Alger, la forteresse imprenable.
Pas de demande officielle selon le ministère des Affaires étrangères
À l’occasion du 50e anniversaire de son indépendance, l’Algérie espérait récupérer cette pièce de son patrimoine historique. Selon Ouest-France, qui relaie une information de l’AFP, les autorités algériennes auraient introduit une demande en ce sens. « Une demande officielle a été déposée début juillet auprès du Quai qui examine le dossier », précise une conseillère du ministre de la Défense.
Contredisant l’information du quotidien régional, le Quai d’Orsay a affirmé lors d’un point presse lundi 6 août que « le ministère des Affaires étrangères n’a pas reçu de demande officielle des autorités algériennes en vue de la restitution de ce canon ». Aucune confirmation en revanche sur une possible demande auprès du ministère de la Défense ou de la Culture.
Depuis de nombreuses années déjà, plusieurs associations algériennes réclament le retour du canon mythique et multiplient sans succès les demandes de restitution. Outre cette pièce, une vingtaine d’autres canons algérois de la même époque sont logés au Musée des Armées à l’Hôtel des Invalides à Paris. L’Algérie pourrait demander leur retour au titre de la restitution de son patrimoine historique.
« À quoi bon un butin de guerre, si l’on doit le jeter ou le restituer à son propriétaire dès la fin des hostilités ? »
Pour sa part, la préfecture maritime de Brest, dont dépend l’arsenal, explique que « La Consulaire » fait partie du « patrimoine français ». Accéder à cette demande équivaudrait selon la même source à rendre l’obélisque de la Concorde à l’Égypte. Côté français, on fait donc sienne la phrase du poète algérien Kateb Yacine : « À quoi bon un butin de guerre, si l’on doit le jeter ou le restituer à son propriétaire dès la fin des hostilités ? ». À ceci près, que l’écrivain parlait de la langue française, un patrimoine décidément plus facile à partager qu’une pièce de musée !