Le nom de Charles Kumi Gyamfi, plus connu en Afrique de l’Ouest par ses initiales C. K. (prononcez en anglais Cee Kay), est associé au football du Ghana depuis l’indépendance de ce pays, en 1956. Gyamfi a été certainement avec feu Baba Yara, le révérend Osei Kofi et Abedi Pelé, l’un des plus grands attaquants ghanéens de tous les temps.
Né le 4 décembre 1929, C. K. a fait ses études primaires à Okorase, une bourgade proche de Koforidua, chef-lieu de la province orientale du Ghana. En 1942, il est élève à la Royal School d’Accra. Il joue au ballon et dispute les championnats scolaires. À 18 ans, il rejoint les Accra Argonauts qu’il quitte pour les Sailors de Koforidua. Il est ensuite recruté par les Cape Coast Mysterious Dwarfs, avant de rejoindre en 1949 l’opulent Asante Kotoko de Kumasi.
En 1951, il fait partie d’une sélection qui effectue une tournée en Grande-Bretagne. Il en est l’avant-centre et marque douze buts. En 1953, il contribue à la victoire de la Gold Coast sur le Nigeria (1-0) et est élu meilleur sportif de l’année. En 1954, C. K. rompt avec Kotoko et s’en va fonder le Great Ashanti. En 1956, il « redescend » à Accra et choisit de porter les couleurs du plus ancien club de la capitale, Hearts of Oak. Il est le capitaine de la première sélection nationale du Ghana.
En 1960, son pays l’envoie effectuer un stage de technicien auprès du Fortuna Düsseldorf qui l’embauche comme joueur professionnel. De retour à Accra, Gyamfi est nommé assistant de l’entraîneur hongrois Josef Ember. Mais il est encore bon pour le terrain et, en 1962, il affronte avec le Black Star le prestigieux Real Madrid d’Alfredo Di Stefano (3-3). C’est son dernier match international. Il est désormais sélectionneur national.
Sous sa direction, le Ghana gagne la West Africa Gold Cup puis conquiert, devant son public, la IVe Coupe d’Afrique des nations (Can) en dominant en finale le Soudan (3-0). En 1964, C. K. conduit le Black Star aux Jeux de Tokyo, et en novembre 1965, à Tunis, il le dirige lors de la Ve édition de la Can. Le onze ghanéen réussit un premier doublé historique après avoir dominé en finale la Tunisie (3-2). La légende du Black Star est née .Invités à Nairobi, les hommes de Gyamfi infligent treize buts aux Harambee Stars ! C. K. est décoré de l’ordre de la Grande Médaille par l’Osageyfo Kwame Nkrumah.
Le coup d’État de février 1966 freine l’ascension du Black Star. C. K. perd son protecteur, le directeur des Sports Ohene Djan. Il cède son poste au Brésilien Carlos Alberto Pereira (le coach de l’équipe du Brésil championne du monde en 2002) puis à l’Allemand Karl Heinz Marotzke en 1968. Après, ce sont ses propres disciples qui prennent le relais à la tête du Black Star, Ben Coufie et John Aggrey-Fynn.
Gyamfi, qui a suivi des stages au Brésil a en effet créé la première école de techniciens en Afrique. En 1972 et en 1973, la Confédération africaine de football (Caf) le charge d’encadrer avec l’Algérien Rachid Mekhloufi la sélection d’Afrique qui dispute la Coupe de l’indépendance au Brésil puis les Jeux afro-latino-américains à Guadalajara, Mexique. En décembre 1973, il conduit l’Asante Kotoko en finale de la IXe Coupe d’Afrique des clubs.
Après, c’est une longue traversée du désert. Les autorités politiques et militaires qui dirigent le Ghana ne font pas confiance à C. K., lequel se prévaut de sa fidélité aux idéaux de Nkrumah. L’homme continue toutefois à dispenser son savoir et à former des cadres. C’est son fidèle compagnon de route, Fred Osam Duodu, qui, en 1978, conduit le Black Star à sa troisième victoire en Coupe des nations. Fin 1981, le lieutenant Jerry Rawlings accède au pouvoir après un deuxième coup d’État. Il rappelle Gyamfi et lui confie l’encadrement du Black Star qui doit disputer la XIIIe Can en Libye. Assisté par Duodu et Kwase Afranie, C. K. bâtit une équipe équilibrée et conquérante qui effectue un parcours sans faute et remporte le trophée continental aux dépens de la Libye, battue aux tirs au but : 1-1 et 7 à 6. C’est la quatrième couronne du Ghana qui révèle à la planète le talent d’un surdoué : Abedi Pelé.
Après le triomphe de Tripoli, les dures réalités de la vie quotidienne contraignent C. K., père de huit enfants, à l’exil. Il répond à une offre du club FC Municipal de Mogadiscio. Deux ans après, il dirige l’AFC Leopards à Nairobi. En 1987, il retrouve Accra et le Black Star, mais sans faire long feu. Ses compétences sont reconnues par la Caf et la Fifa qui lui confient à maintes reprises des missions d’instructeur. Il devient professeur ès football, parcourt le continent, participe comme aux groupes d’études techniques de la Can et de la Coupe du monde. S’il accepte de dépanner le club Goldfields d’Obuasi, il met fin à sa carrière d’entraîneur en 1996. Il assiste, impuissant, à la décadence du football de son pays qui multiplie les expériences désastreuses avec les techniciens étrangers : le Ghana n’a pas gagné de Coupe d’Afrique depuis 1982 ! En 1998, C K. est fait nana (chef traditionnel) dans son village natal.