Suite à la décision de l’Union européenne, le 11 novembre dernier, d’imposer l’étiquetage des produits israéliens originaires des colonies israéliennes dans les Territoires palestiniens occupés, Israël a réagi par « la suspension des contacts diplomatiques sur les questions relatives au processus de paix avec les Palestiniens ».
Un chantage qui exclut, néanmoins, les relations bilatérales de Tel-Aviv avec la France, l’Allemagne ou le Royaume-Uni entre autres, partenaires puissants du régime sioniste, et se limite aux seules institutions européennes impliquées dans le processus de paix. Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, également ministre des Affaires étrangères, a donné ordre qu’il soit procédé à « un réexamen de l’implication des institutions européennes dans tout ce qui a trait au processus diplomatique avec les Palestiniens ».
Comme il fallait s’y attendre, Netanyahou a brandi le spectre du Nazisme et de la victimisation en déclarant que cette décision est « absolument absurde et moralement inacceptable, car sur le sol de l’Europe, de mémoire vivante, les produits juifs ont été labélisés comme tels, les magasins juifs ont été labélisés comme tels. L’Union européenne devrait avoir honte, a-t-il ajouté, l’étiquetage des produits de l’État juif par l’Union européenne « réveille de sombres souvenirs. Alors qu’il y a des centaines de conflits territoriaux à travers le monde, l’UE, a décidé de s’en prendre seulement à Israël alors qu’Israël combat le dos au mur contre une vague de terrorisme ».
L’ambassadeur de l’UE à Tel-Aviv, Laars Faaborg-Andersen, a immédiatement répondu en s’opposant à toute comparaison avec les Nazis et en qualifiant ces déclarations de « distorsion de l’histoire qui minimise les crimes des Nazis et méprise la mémoire de leurs victimes ». Il a, toutefois, précisé qu’il ne s’agissait pas d’un « boycott », puisque les produits israéliens continueront d’accéder au marché européen, mais d’une « mesure technique visant à unifier les procédures européennes ». En effet, la Grande-Bretagne, la Belgique et le Danemark pratiquent déjà cet étiquetage. La décision européenne est, désormais, applicable à tous les membres de l’organisation européenne. La décision concerne « une indication d’origine, non un avertissement » en direction des clients, a-t-il, encore, précisé.
L’étiquetage en question concerne en majorité des produits agricoles (fruits, légumes, vin, huile, volaille, miel) et les cosmétiques fabriqués à base de minéraux de la Mer Rouge. Ils ne représentent que moins de 1% du total des échanges entre l’UE et Israël, soit 154 millions d’euros en 2014, sur un total d’environ 30 milliards de dollars. L’Union européenne, a souligné l’ambassadeur, considère que les territoires occupés par Israël depuis 1967 – Cisjordanie, Bande de Gaza, Jérusalem Est et le plateau du Golan – ne font pas partie des frontières israéliennes reconnues internationalement. Les produits issus de ces territoires ne peuvent donc pas être labellisés « Made in Israël »..
Cependant, pour les organisateurs de la campagne internationale BDS (Boycott, Désinvestissement, Sanctions) contre l’État sioniste qui ne cesse de s’étendre de s’étendre, la décision européenne représente un pas en avant dans le soutien européen implicite au mouvement. En janvier 2015, la Coordination européenne des Comités et Associations pour la Palestine, un groupe de 63 députés européens influents, avaient appelé Federica Mogherini, chef de la politique étrangère de l’UE, à suspendre l’accord d’association UE-Israël, le principal traité entre les deux partenaires. Cet appel faisait suite au massacre de 2300 Palestiniens à Gaza, lors de l’attaque du Territoire palestinien, en juillet 2015. Les députés faisaient écho à un appel identique lancé quelques mois plus tôt par un groupe de 300 organisations de droits de l’homme, de syndicats et de partis politiques de toute l’Europe. Le traité UE-Israël est entré en vigueur en 2000 pour faciliter sans restrictions les relations commerciales et permettre à Israël de prendre part aux programmes européens. « Depuis la dernière attaque d’Israël contre Gaza, l’UE a publié des critiques parmi les plus fortes qu’elle a jamais exprimées, mais il reste encore à prendre des mesures substantielles pour les traduire dans les faits, même s’il est entendu que l’UE n’est en aucune manière disposée aujourd’hui à renforcer ses relations avec Israël », écrivaient les députés européens.
Pour les dirigeants palestiniens, ce chantage n’est qu’une manœuvre de principe pour faire revenir l’UE sur une décision qui n’aura, toutefois, qu’un faible impact sur les échanges commerciaux. Selon Saëb Erekat, qui dirige les négociations au nom de l’OLP, « Israël a déjà stoppé le processus de paix ». Il estime, néanmoins que cette décision représente un « pas significatif vers un boycott total des colonies israéliennes construites illégalement sur les terres palestiniennes. L’Union européenne est passée, une nouvelle fois, du discours à une politique concrète. Nous pensons qu’il faudra encore plus d’actions pour obliger Israël à rendre compte de crimes qu’il continue à commettre contre la Terre et le peuple de Palestine. »