Paris – Plus de deux cent personnalités de l’opposition démocratique syrienne tiendront un congrès fondateur au Caire, les 8 et 9 juin 2015, en vue d’entériner, hors de toute tutelle étrangère, un «projet de pacte national» de même qu’une feuille de route dégageant la voie à une solution politique au conflit syrien qui dure depuis 5 ans.
Ce congrès «ouvert à toutes les composantes de l’opposition syrienne convaincus de la nécessité d’une solution politique au conflit syrien», devrait constituer le couronnement de démarches visant à donner forme à une opposition patriotique et démocratique dégagée de toute tutelle étrangère., sur fond de bouleversements stratégiques sur le terrain marqués par la prise du site hautement symbolique de la cité antique de Palmyre (Syrie) par l’état islamique et le premier attentat particulièrement meurtrier des djihadistes de cette mouvance contre une mosquée chiite en Arabie saoudite, ainsi que l’impasse de la guerre saoudienne contre le Yémen, à l’arrière plan d’une guerre psychologique menée par le camp occidental contre le régime de Damas avec la fausse annonce de la liquidation par le quotidien londonien The Guardian de la liquidation d’un des piliers du régime baasiste Ali Mamlouk, le chef des services de renseignement syriens, parallèlement à de concertations diplomatiques tant à Genève par l’émissaire de l’ONU en Syrie, Staffan Di Mistura avec les diverses sensibilités de l’opposition syrienne, qu’au sein du bloc atlantiste visant à adapter sa stratégie aux bouleversements militaires sur le terrain tant en Syrie qu’en Irak face à la percée de l’EI.
Ce congrès fait suite à une série de réunions tenues dans la capitale égyptienne le 15 mai 2014, puis huit mois plus tard, les 22-24 janvier 2015, toujours sous l’égide du Conseil Égyptien des Affaires étrangères. Il devrait constituer le couronnement de démarches visant à donner forme à une opposition patriotique et démocratique dégagée de toute tutelle étrangère: «Prendre des décisions purement syriennes, indépendamment de toute interférence».
Plus de 200 personnalités patriotiques syriennes ainsi que des représentants des forces politiques et de la société civile prendront part à ce «congrès patriotique», qui aura pour mission d’adopter des décisions purement syriennes, indépendamment de toute interférence», souligne un communiqué émanant de cette instance dont www.madaniya.info en publie en pièce jointe la version arabe.
Ci joint le texte intégral de la traduction française de ce communiqué
«En date du 15 mai 2014, un groupe de personnalités patriotiques et des représentants de partis politiques s’est réuni au Caire, sous les auspices du Conseil Égyptien des Affaires Étrangères, en vue d’envisager la possibilité de la tenue d’un congrès patriotique ouvert à toutes les composantes de l’opposition convaincus de la nécessité d’une solution politique au conflit syrien. Un congrès patriotique syrien tenu avec des possibilités syriennes en vue d’adopter des décisions purement syriennes, indépendantes de toute interférence».
…«Une délégation émanant de ce congrès a proposé au ministre égyptien des Affaires étrangères, lors d’une rencontre avec ce dernier, le 16 mai 2014, que l’Égypte abrite cette conférence. Un dialogue s’est ensuivi à ce sujet avec diverses forces politiques et personnalités patriotiques débouchant sur la tenue d’un congrès préparatoire au Caire les 22-25 janvier 2015, à l’issue duquel la «Proclamation du Caire» a été adopté. Un comité du suivi a été chargé de déblayer la voie à la tenue d’un Congrès au printemps 2015.
«Un projet de pacte national a été mis au point au terme de discussion entre les diverses composantes de l’opposition, de même qu’une feuille de route». Plus de 200 personnalités patriotiques syriennes, ainsi que des représentants des forces politiques et des représentants de la société civile ont été conviés à participer à ce congrès fondateur, les 8 et 9 juin au Caire
Le projet de «Pacte national» à débattre au congrès fondateur du Caire
«Dans l’hypothèse de son adoption par la Conférence internationale sur la Syrie devant se réunir sur la base de la Proclamation de Genève (2012), le Pacte National, soumis pour approbation au congrès fondateur du Caire (8-9 juin 2015), servira de référence aux principes constitutionnels devant régir la période transitoire et la phase d’élaboration de la nouvelle constitution de la Syrie.
1-L’État constituera l’entité historique pour un éveil civilisationnel fondé sur la participation, la con-citoyenneté et des institutions civiles indépendantes de tous les composantes de la société et de ses idéologies.
2-Le peuple syrien est UN. Sa vertébration s’articulera sur la con-citoyenneté égale en droits et en obligations, sans distinction entre ses enfants du fait de la couleur, du sexe, de la langue ou de la confession. Cette con-citoyenneté sera fondée sur un Pacte National Global où la religion appartient à Dieu et la patrie à tous ses citoyens. Nul ne pourra s’arroger le droit d’imposer une religion ou une croyance, ou d’interdire à quiconque de choisir librement son idéologie et sa pratique.
3-La personne humaine est le but ultime des enfants de la même patrie, dont les fondements repose sur le respect des conventions et engagements internationaux dans le domaine des droits humains, impliquant les droits économiques et sociaux, les droits politiques et civiques ainsi que les droits culturels et ceux relatifs à l’environnement entérinés par l’humanité, de même que la garantie de la jouissance de ses droits pour tous les citoyens et résidents.
Du Droit des femmes
4-Les femmes bénéficient de l’égalité avec les hommes. Il ne sera toléré la moindre régression de ce droit. De même tout citoyen ou citoyenne pourra postuler à tous les emplois publics, y compris la présidence de la République.
5-La constitution abolira toute forme de discrimination à l’égard de la femme. Elle réaffirmera la nécessité de créer les conditions législatives et juridiques lui ouvrant la possibilité de participer à la vie sur le plan politique, économique et social, en conformité avec toutes les conventions internationales y afférentes.
Réaffirmation du respect par l’Etat et la constitution des conventions concernant les droits de l’enfant et son clair engagement en faveur des droits de l’enfant à la vie, à sa croissance matérielle, au respect de son opinion. Mettre en place les critères et les politiques nécessaires en vue de promouvoir les conditions adéquates sur le plan sanitaire, psychologique et éducatif, de même que les prestations sociales, civiques et juridiques relatives à l’enfant.
Réaffirmer le respect des droits des personnes, à leurs besoins spécifiques des blessés, des handicapés, y compris la sécurité sociale et médicale et aménager les conditions en vue de leur participation pleine et entière à un emploi et aux activités publiques de même que leur développement sur le plan culturel.
Du Droit de la minorité kurde en Syrie et des autres minorités ethnico-confessionnelles
6-L’Etat syrien reconnaît l’existence d’un peuple kurde en tant qu’élément constitutif de la population syrienne, de ses droits nationaux légitimes, conformément aux engagements et conventions internationales, et ceci dans le cadre de l’unité du peuple syrien, considérant que la nationalité kurde de Syrie comme un élément authentique (assil-originel) du peuple syrien. L’Etat syrien reconnaît de même l’existence, l’identité et les droits nationaux identiques aux nationalités syriaques, assyriennes, turkmènes, circaucasiennes (tcherkess), tchétchènes et arméniennes, les considérant comme un élément authentique (assil-originel) du peuple syrien.
7-La Syrie fait partie intégrante de la nation arabe, liée avec les peuples arabes par des liens culturels, l’histoire, des intérêts et de grands objectifs communs, un destin commun. La Syrie, membre fondateur de la ligue arabe, veillera à renforcer diverses formes de coopération et de liens entre les pays arabes. Le peuple syrien s’engage à apporter son appui au peuple palestinien et son droit à édifier un état libre, souverain, indépendant, avec Jérusalem comme capitale.
8-La Syrie est liée à l’ensemble des autres peuples musulmans par des racines historiques communes, des valeurs humaines fondées sur les messages célestes et le patrimoine commun de l’humanité.
9-La Syrie, membre fondateur des Nations Unies et des organisations dérivées, est partie intégrante du système international, lié par la charte fondamentale de l’Organisation internationale. De concert avec d’autres pays, elle veille à édifier un système mondial, loin des conflits centraux, loin de tout domination et de toute occupation. Un système fondé sur des relations équilibrées, des intérêts partagés et des responsabilités partagés en vue de faire face aux défis et les dangers qui menacent la paix et la sécurité dans le Monde.
10-Le peuple est la source de la légitimité. La justice le principe qui régit les relations entre les fils de ce peuple. La souveraineté syrienne se réalisera par la relation organique liant le citoyen à sa patrie, à l’ombre d’un régime démocratique; un état fond sur la concitoyenneté; un état dont la constitution fonde son contrat social; où règne la loi; reposant sur des institutions, d’où seront bannis le monopole du pouvoir et sa transmission par voie héréditaire de quelque manière que ce soit;
11-Les institutions du pouvoir de l’état syrien trouvent leur fondement dans des élections périodiques, avec une complète séparation du pouvoir entre l’exécutif, le législatif et le judiciaire, sur la base de l’alternance du pouvoir, via un scrutin secret et libre, avec le respect des résultats des élections organisées par une instance indépendante dont les résultats sont décidés par les urnes.
12-La nouvelle constitution posera les fondements d’un régime démocratique civil; un système électoral moderne et juste garantissant la participation de tous les courants intellectuels et politiques, de manière à assurer la plus vaste représentation du peuple, la stabilité du régime parlementaire. Ce système veillera à assurer un strict contrôle des ressources financières et des dépenses des partis et des associations politiques;
13-L’armée syrienne est l’institution nationale chargée de la protection du pays, de la préservation de son indépendance, de sa souveraineté sur son territoire, de veiller à la sécurité nationale. Elle n’intervient pas dans les activités politiques.
14-L’état retient le principe de la décentralisation administrative. L’administration locale est assurée par des instances exécutives représentatives en charge de la gestion des administrés et du développement des départements et es régions de manière à parvenir à un développement harmonieux et égalitaire.
15-L’état protège les formes d’organisation de la société civile dans ses divers aspects. Il garantit sa représentativité et sa participation aux décisions exécutives et législatives, de même que la mise en place d’un pouvoir judiciaire, d’une instance nationale en charge des droits humains, d’une instance de réconciliation, d’une instance de comptabilité et de contrôle.
16- L’état forge les règles garantissant la propriété privée, qui est insaisissable, sauf dans les cas présentant un intérêt général, conformément au droit et sous réserve de l’allocation d’une juste compensation. La loi interdira toute forme d’affectation d’argent public pour la satisfaction d’intérêts privés.
17- L’état réglementera les finances publiques et le domaine public dans l’intérêt du peuple. Il définira sa politique en fonction de sur l’intérêt général, au service de la justice sociale: un développement équilibré, assorti de la protection des personnes vulnérables, de même que la redistribution des revenus et des richesses par l’impôt sur les diverses composantes de la société et entre les diverses provinces.
L’état garantira la liberté d’investissement, l’initiative économique, l’égalité des chances et des marchés à travers des règles prohibant le monopole et la surenchère de manière à sauvegarder le droit des travailleurs et des consommateurs.
18-L’état syrien se fixera comme objectif prioritaire la reforme et la modernisation des programmes éducatifs et de l’enseignement de manière à répondre aux exigences de l’époque de manière à doter les générations futures d’un lot de connaissances théoriques et pratiques en vue de mener à bien un développement humain et durable de la société.
La diffusion d’une culture moderne vissant à l’éveil de la conscience populaire fondé sur la rationalité et l’objectivité relève d’une mission fondamentale de l’état et de la société. Il est du devoir de l’état de mettre fin à toute forme d’ignorance et d’analphabétisme.
19-L’état syrien se préoccupe de développer une politique pragmatique et efficace, afin d’opérer une jonction, interactive et complémentaire avec les syriens de la diaspora et la mère patrie, de la meilleure façon possible, en leur qualité de partie intégrante et authentique du peuple syrien de manière à assurer leur contribution au développement de leur mère-patrie et à la défense de ses justes causes et de les mettre en mesure d’offrir toutes les formes d’aide possible à son développement.
Il incombe à l’état syrien de mettre en œuvre une politique favorisant le retour au pays de toutes les compétences contraintes à l’exil afin participent à la bataille de la reconstruction et du développement et tirer profit de l’expertise de ceux qui ne peuvent y retourner.
20-L’état syrien s’engage à éradiquer toute forme de pauvreté et de discrimination, de combattre le chômage en visant le plein emploi doté d’un salaire décent, -de réaliser la justice par la redistribution des richesses, -de réaliser un développement équilibré et la protection de l’environnement -de pourvoir aux prestations de base à tout citoyen: habitat, urbanisme, eau potable, système de canalisation des égouts, électricité, téléphone, internet, voies de transport, enseignement, réhabilitation socio-professionnelle, sécurité médicale, pensions de retraite, indemnité de chômage à un niveau conforme au niveau de vie.
*René NABA
Journaliste-écrivain, ancien responsable du Monde arabo musulman au service diplomatique de l’AFP, puis conseiller du directeur général de RMC Moyen-Orient, responsable de l’information, membre du groupe consultatif de l’Institut Scandinave des Droits de l’Homme et de l’Association d’amitié euro-arabe. Auteur de « L’Arabie saoudite, un royaume des ténèbres » (Golias), « Du Bougnoule au sauvageon, voyage dans l’imaginaire français » (Harmattan), « Hariri, de père en fils, hommes d’affaires, premiers ministres (Harmattan), « Les révolutions arabes et la malédiction de Camp David » (Bachari), « Média et Démocratie, la captation de l’imaginaire un enjeu du XXIme siècle (Golias).
Source : Madaniya.info