Apothéose d’un visionnaire du piano animé par l’idée fulgurante du mariage du rythme africain avec l’harmonie occidentale, Transcendance, nouvel album du musicien congolais Ray Lema, est l’aboutissement d’une quête sans répit d’explorations incessantes et d’échanges fertiles. Avec une volonté farouche de repousser toujours plus loin les frontières des genres en musique et toutes les frontières, visibles et invisibles, qui s’opposent à la création et à la rencontre des humains.
Ray Lema est né dans un train près de la gare de Lufu-Toto, dans l’actuelle république démocratique du Congo. Un signe prémonitoire des voyages et découvertes qui auraient balisé la carrière de l’artiste et la vie de l’homme.
Atypique l’une et l’autre, car cet ancien séminariste apprend la musique à l’écoute de Bach et Beethoven, avant de traverser savanes et forêts de la cuvette congolaise pour collecter les trésors musicaux d’un pays vaste comme un continent.
Son premier album, Koteja, il l’enregistre dans le berceau du jazz, à la Nouvelle Orléans, lors de son séjour aux Etats-Unis à la fin des années 1970. Symptomatique d’une démarche qui allait se développer dans la même trajectoire intuitive des Noirs des Caraïbes et du continent, les enfants de la Traite, qu’à la Congo Square faisaient la jonction de la musique de salon européenne avec les réminiscences rythmiques de l’Afrique.
A Paris, depuis un court passage en Belgique, il travaille à son projet : le tambour horizontal de l’Afrique et le tambour vertical de l’Occident, la polyrythmie et l’harmonie, l’extension de la note et sa profondeur…
En presque quarante ans, combien de collaborations -stupéfiante celle avec Les Voix Bulgares dans la décennie ‘90- et de suggestions comme, plus récemment, l’emploi des sonorités des langues à tons de l’Afrique dans son alchimie aux réverbères inouïs !
Dans Transcendances, le piano du maestro est fébrile, en l’état de jouissance qui témoigne de la réussite. Une chevauchée sans brides à travers trois continents. Une liberté sans concessions. Et le titre éponyme consacré à Fela Kuti, père de l’afro-beat : un hommage voulu, évocateur d’une complicité spirituelle.
Luigi Elongui
*Concerts :
- RAY LEMA ! CARTE BLANCHE du 21 au 23 novembre à la Petite Halle (211 Av Jean Jaurès, Paris 19ème)
- Le 21/11 : Concert de présentation de son nouvel album Transcendances (One Drop / L’Autre distribution)
- Le 22/11 : Ray Lema & Laurent de Wilde
- Le 23/11 : Ray Lema piano solo + quatuor Aquarius