Les rebelles de la Séléka ont pris le pouvoir en Centrafrique. Hélas, ils semblent loin d’avoir les moyens de mener à bien le redressement du pays.
Dans sa première allocution, Michel Djotodia, leader de la Séléka, la coalition de rebelles qui s’est emparé du pouvoir en Centrafrique, avait condamné la mauvaise gouvernance, la corruption et le népotisme du président aujourd’hui déchu, François Bozizé. A l’en croire, il venait à la demande du peuple centrafricain pour remettre le pays sur les rails du développement et en finir avec toutes les mauvaises pratiques.
Sa première décision – qui a peut-être été la bonne, l’avenir nous le dira – a été de maintenir à la tête du gouvernement l’avocat des droits de l’homme Nicolas Tiangaye, qui avait été nommé à la suite de la signature des accords de Libreville, en janvier 2013. C’est pourtant soit disant à cause de l’inertie de ce gouvernement qu’il avait décidé de reprendre les armes et de marcher sur Bangui… Même si Tiangaye se remet au travail, il va avoir encore plus de mal à venir à bout de tous ses dossiers, notamment parce qu’à cause du coup d’Etat, l’Union européenne et les bailleurs de fonds occidentaux, et jusqu’à la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale (Cemac) ont suspendu toute l’aide financière. Comment va-t-il réussir à payer les fonctionnaires et les militaires, alors même que les rebelles attendent avec impatience – c’est l’une des revendication ayant présidé à la reprise des combats – d’être intégrés dans l’armée régulière ? Ce n’est pas parce qu’il a suspendu la constitution et dissous l’Assemblée nationale qu’il va y avoir davantage d’argent dans les caisses. Djotodia va découvrir que ce n’est pas en monnayant une poignée de diamants, ou même plusieurs poignées, que l’on peut maintenir le train de vie de l’Etat.
En attendant, la situation sécuritaire dans les rues de Bangui tourne au cauchemar. Les pillages se succèdent, rien n’est épargné : ni les entreprises, ni les structures administratives, ni même les hôpitaux. Journaux et radios ont vu leur matériel disparaître aux mains de cambrioleurs déterminés, que l’on aura du mal à retrouver. Médecins sans frontières se plaint de ne plus pouvoir soigner les blessés, faute de matériel médical, de médicaments et même de simples structures d’accueil, tout ayant été volé ou démonté systématiquement par des hommes intéressés jusque par les carrelages collés au mur. Djotodia promet que la situation va s’arranger, on se demande comment. Les soldats de la Cemac stationnés dans le camp Mpoko ont été sollicités, mais le commandement se fait tirer l’oreille pour participer à d’éventuelles opérations où les hommes risqueraient leur vie sans savoir vraiment pour qui ou pour quoi. Car les armes les plus diverses circulent en grand nombre dans la capitale, aux mains de tous et de n’importe qui, l’impunité régnant en maître.
Avec une froide détermination, Bangui sombre dans le chaos.