L’Arabie Saoudite, en coopération avec la CIA, finance l’envoi de combattants pakistanais en Syrie pour y créer un califat wahhabite et affaiblir ce pays.
« Mandataires d’Al-Qaïda » : c’est ainsi que se présentent les nouveaux bataillons des talibans pakistanais qui affluent vers la Syrie pour prêter main-forte à l’opposition armée syrienne actuellement à la peine. Dans un contexte de heurts meurtriers de plus en plus répétés entre rebelles armés dits « modérés » et jihadistes proches d’Al-Qaïda. C’est du moins ce que viennent de confirmer des commandants du Tehrik-e-Taliban Pakistan (TTP) qui ont affirmé que les talibans pakistanais ont établi des bases et envoyé des centaines d’hommes en Syrie pour lutter aux côtés de la rébellion contre les forces du président Bachar al-Assad. Cette stratégie, disent-ils, vise à consolider les liens entre les groupes syriens affiliés à Al-Qaïda et le commandement central d’Al-Qaïda toujours basé dans les zones tribales afghano-pakistanaises. La guerre civile en Syrie, qui a fait plus de 100 000 morts depuis 2011, attire des combattants wahhabites et takfiris qui rejoignent ce qu’ils considèrent comme une guerre sainte contre les « renégats chiites ». Des groupes tchétchènes s’y trouvent déjà. « Quand nos frères ont eu besoin de notre aide, nous avons envoyé des centaines de combattants aux côtés de nos amis arabes », a déclaré hier un haut commandant du TTP. Il a affirmé que son mouvement diffuserait prochainement des vidéos de « victoires » en Syrie. Un autre commandant du TTP, également sous anonymat, a déclaré que la décision d’envoyer des combattants en Syrie avait été prise à la demande d’« amis arabes ». « Nos frères arabes étant venus nous soutenir, nous sommes tenus de les aider dans leurs pays respectifs et c’est ce que nous avons fait en Syrie », a-t-il expliqué. « Nous avons établi nos propres bases en Syrie. Certains de nos gens y vont et reviennent après avoir combattu un certain temps là-bas. » Ce renfort présumé des talibans pakistanais survient à un moment de tensions très fortes entre les islamistes, dont le Front al-Nosra, et l’opposition armée dirigée par l’Armée syrienne libre (ASL). Des tensions exacerbées par le récent meurtre d’un haut gradé de l’Armée syrienne libre par des membres de l’État islamique en Irak et au Levant (EIIL), affilié à Al-Qaïda.
Le Tehrik-e-Taliban opère principalement à partir des zones tribales pakistanaises situées à la frontière avec l’Afghanistan et lutte pour renverser le gouvernement d’Islamabad et imposer une vision rigoriste de l’islam. Mais le mouvement est aussi étroitement lié à Al-Qaïda et aux groupes jihadistes qui ont déployé des hommes dans les régions tribales. Ahmad Rashid, auteur pakistanais spécialiste des talibans, estime que le TTP est « resté en quelque sorte un mandataire d’Al-Qaïda ». Il y voit pour preuve la présence dans les zones tribales de « ces étrangers qui sont pris en charge et entraînés par les talibans ». « Ils agissent comme des jihadistes, avec précisément les mêmes objectifs qu’Al-Qaïda. C’est une manière, je suppose, de cimenter les relations avec les groupes militants syriens (…) et d’élargir leur sphère d’influence. »