Le MPLA gagne, mais avec moins d’éclat que par le passé.
En moins de 48 heures, la Commission nationale électorale angolaise a décompté quelque huit millions de votants, sur les neuf millions d’inscrits, et communiqué les résultats de l’élection du 23 aout. Ceux-ci devront être encore soumis à des vérifications et aux probables recours de l’Unita. Les résultats définitifs seront connus début septembre. Sans surprise, comme la plupart des médias l’ont annoncé, le MPLA au pouvoir depuis l’indépendance en 1975, a remporté le scrutin, quatrième depuis l’adoption du multipartisme en 1992. Il a engrangé 61,1 % des voix – en baisse d’environ dix points par rapport à 2012 – et assuré l’élection de 150 députes (sur 220), ainsi que celle du futur président, Joao Lourenço, et de son coéquipier Bornito de Sousa, têtes de listes des candidats à la députation du MPLA.
Le principal parti de l’opposition, l’Unita – ancienne rébellion armée – a progressé depuis le dernier scrutin, atteignant aujourd’hui 26,7% des voix (contre 18 % en 2012) et en plaçant au parlement 51 députés. Enfin, l’autre parti de l’opposition qui compte des représentants à l’assemblée, la CASA-CE, a également légèrement progressé, en engrangeant 9,46 % des voix et en faisant élire 16 députés.
Alors que de nombreux pronostics plaçaient la CASA-CE en tête de l’opposition, du fait de la popularité supposée de son leader, le dissident de l’Unita Abel Chivukuvuku, auprès de la jeunesse urbaine, la hiérarchie des trois plus grands partis angolais demeure inchangée. Le FNLA, troisième parti historique angolais, vit quant à lui une longue agonie et est désormais en voie de disparition avec moins de 2% des voix et aucun député.
L’ensemble des observateurs africains (SADC, UA), de la communauté des pays de langue portugaise (CPLP), ainsi que quatre anciens présidents lusophones (le Mozambicain Chissano, le Cap-Verdien Pires, le Sao-Toméen Pinto da Costa et le Timorais de l’Est, Ramos Horta) ont jugé le déroulement des élections très satisfaisant et considéré le résultat comme « libre, juste et transparent ». Certains observateurs ayant même montré leur étonnement vis-à-vis du degré de sophistication technologique du personnel placé à l’entrée des bureaux de vote, doté de tablettes et de mini-imprimantes d’où sortaient les données du votant, en accélérant la procédure : « on se croirait en Europe a affirmé à la télévision angolaise un diplomate portugais. Ainsi, l’absence de queues devant les quelques 25 000 bureaux de vote du pays a fait croire à une augmentation significative de l’abstention – signe de désaffection pour le MPLA – alors qu’elle a en réalité diminué, passant de 37 % en 2012 à 23 % aujourd’hui.
Le regain d’intérêt de l’électorat semble motivé par deux facteurs contradictoires : l’évident et légitime désir de renforcer l’opposition afin de contraindre le MPLA à une gestion plus démocratique et transparente du pays, et, du côté de l’électorat traditionnel du MPLA, la crainte d’être confronté à la montée de forces politiques issues d’une rébellion fortement compromise par sa soumission à la stratégie violemment expansionniste de l’Afrique du Sud lorsqu’elle était le pays de l’apartheid et responsable, avec Pretoria, de destructions d’infrastructures dont le coût avait été estimé par les Nations Unies en 1990 – après le retrait sud-africain -, à 10 milliards de dollars.
Il est d’ailleurs étonnant que dans la totalité des médias internationaux qui ont largement commenté cette élection, aucune référence n’ait été faite à l’agression militaire de la part de l’Afrique du Sud, qui a pourtant envahi et occupé à plusieurs reprise le territoire angolais et qui, seize ans durant, l’a soumis à la menace permanente d’attaques aériennes et terrestres d’une portée exceptionnelles en Afrique sub-saharienne. Seul la mention de « guerre civile » figure dans les rappels historiques qui, également à l’unanimité, ont répété avec une insistance suspecte, que le MPLA avait été « marxiste-léniniste »… Et qu’il l’est peut-être encore puisque « ses militants s’habillent en rouge » ! Du coup, la rébellion armée de l’Unita ressort comme justifiée : il fallait bien se battre au nom des libertés et de la démocratie, n’est-ce pas ?
A suivre.