Le défunt président Houari Boumédiène en avait fait le symbole d’un vaste plan d’industrialisation de l’Algérie en 1969. Douze ans après son passage sous le contrôle de l’Indien Lakshmi Mittal, le complexe sidérurgique d’Al-Hadjar-Annaba, fleuron de la sidérurgie algérienne, est revenu dans le giron de l’État. Un nouveau pacte d’actionnaires a été signé entre ArcelorMittal, numéro 1 mondial de la sidérurgie, et le groupe public algérien Sider, aux termes duquel ce dernier reprend 51 % du capital du complexe, dans le cadre de la loi sur les investissements étrangers qui réserve la majorité au partenaire algérien. ArcelorMittal détenait 70 % des actions qu’il avait rachetées en 2001 dans le cadre d’une ouverture du capital. Mais les fruits n’ont pas été à la hauteur des fleurs. Le géant mondial de l’acier, dont le groupe est fortement endetté, a dans un premier temps tenté de vendre sa participation au groupe privé algérien Cevital en 2012. Mais le PDG de ce dernier, Issad Rebrab, a estimé trop élevé le prix demandé.
Le sidérurgiste indien a jeté l’éponge parce qu’il ne pouvait pas financer seul le programme de redressement et de relance du complexe. Celui-ci sera financé essentiellement sur des ressources algériennes par la Banque extérieure d’Algérie (BEA). Le partenariat Sider-ArcelorMittal prévoit un plan d’investissement de 763 millions de dollars pour développer le complexe. Cela inclut la modernisation de la filière fonte et la rénovation du haut fourneau, des installations de préparation matière, des aciéries et des laminoirs existants, ainsi que la mise à niveau des deux mines de Ouenza et de Boukhadra, qui l’approvisionnent. La construction d’une nouvelle filière électrique (four électrique et coulée continue de billettes) ainsi que le renforcement des capacités en aval, avec l’implantation d’un nouveau laminoir de rond à béton et de fil machine d’une capacité de 1 million de tonnes, sont aussi programmés.
Le plan de développement prévoit une production annuelle de 2,2 millions de tonnes d’acier en 2017, de 5 millions de tonnes en 2020 et de 8 millions de tonnes en 2030. Il s’agit essentiellement de couvrir les besoins domestiques algériens, actuellement pourvus à 80 % par des importations, qui ont atteint 10 milliards de dollars en 2012.
Sous l’empire d’ArcelorMittal, la production d’Al-Hadjar, qui emploie 7 000 personnes, n’a guère dépassé 800 000 tonnes par an. Il lui a même fallu ces derniers temps un coup de pouce in extremis de deux sociétés publiques consommatrices de produits sidérurgiques, Sonelgaz et Sonatrach, pour remplir son plan de charge. Un autre complexe sidérurgique est en voie de réalisation à Bellara (Jijel) entre Sider et le groupe qatari Qatar Steel International (51/49 %). Pour un investissement de 1,7 milliard de dollars, il devrait produire 4 millions de tonnes d’acier en 2019 et employer au moins 2 000 salariés. L’Algérie, en pleine phase de réindustrialisation, veut atteindre l’autosuffisance dans ce domaine en 2030.
Par ailleurs, Alger veut réactiver un vieux projet d’exploitation des mines de fer à ciel ouvert de Garat Djebilet et de Mechri Abdallah, au croisement des frontières entre l’Algérie, le Maroc et la Mauritanie (Tindouf). Le projet a été confié à un consortium de trois entreprises publiques : Sonatrach, Sider et Ferphos, dirigé par le groupe pétrolier, propriétaire depuis 2009 du titre minier.
Le premier gisement recèle 3,5 milliards de tonnes de minerai, dont 1,7 milliard est exploitable, d’une teneur moyenne de 57 %, selon les évaluations. Le second renferme 700 millions de tonnes d’une teneur moyenne de 52,5 %. La valeur financière des deux gisements est estimée à 2 600 milliards de dollars. Le projet comporte notamment la construction d’une usine d’enrichissement du minerai et l’extension du port de Ghazouet, sur la côte ouest, qui deviendra ainsi la plateforme d’acheminement des produits vers les usines sidérurgiques. Le minerai devrait être traité au gaz et non au coke, ce qui allégera d’autant la facture des importations.