En pleine expansion, le tourisme mondial est parti pour atteindre le nombre d’un milliard de touristes en 2012. En 2010, avec un montant global de 930 milliards de dollars, il représentait 6 % des exportations mondiales. Ces revenus sont en augmentation en 2012, selon les chiffres de l’Organisation mondiale du tourisme (OMT), qui plaide pour un « tourisme durable ».
Bon an mal an, quelque 300 millions de touristes fréquentent les rives de la Méditerranée, un des principaux bassins du tourisme mondial. En s’arrêtant aux pays de la rive sud de la mare nostrum, cette activité, devenue une industrie, ne cesse de se développer et de se sophistiquer. Elle représente près du sixième du produit intérieur brut (PIB) en Égypte et y emploie trois millions de personnes. En Tunisie, elle compte pour 13 % du PIB, avec près de 500 000 actifs. Le Maroc en tire des ressources substantielles. La Libye, parée de richesses archéologiques incomparables, se prépare à son tour à s’y lancer.
L’Algérie affiche elle aussi sa volonté de prendre part à ce marché. La « promotion de la destination Algérie », selon la terminologie locale, est à l’ordre du jour. Ce ne sont pas les atouts naturels et historiques qui manquent. Le pays, dont la côte abrite de magnifiques plages et criques surplombées de majestueuses montagnes hérissées de forêts centenaires, ourlées au sud par un Sahara immense aux dunes ondoyantes, recèle des sites archéologiques uniques. Musées à ciel ouvert, classés patrimoine mondial de l’Unesco, le Hoggar et le Tassili, à l’extrême sud, offrent sur leurs parois rocheuses des gravures rupestres parmi les plus anciennes du monde. Présentant de nombreuses affinités avec celles du Sud-Oranais, elles décrivent de façon émouvante la flore et la faune du néolithique. Béchar, au nord-ouest, compte plus de 2 000 fresques, dont la « momie », ainsi appelée par ses découvreurs. Son moule est au musée du Bardo à Alger. Parmi d’autres curiosités à visiter, le tombeau de Tin Hinan, la mythique reine des Touaregs, et l’Assekrem, une forêt de pics et d’aiguilles sculptées par le vent, le soleil et le froid, qu’on « ne peut voir sans penser à Dieu », selon son emblématique résident le père Charles de Foucauld, béatifié en 2005.
Au nord, les sites de Tipaza, l’un des plus prestigieux des vestiges romains, Djamila, Timgad, Cherchell, Lambèse, Tébessa, Guelma, révèlent l’empreinte du plus grand empire de la mare nostrum sur ces terres du sud de Rome. Des forêts de colonnes, des dizaines de temples, de thermes, de mosaïques, de bas-reliefs et de gravures, ainsi qu’une riche statuaire, racontent cette histoire mouvementée où s’illustrèrent des Aguellid, rois berbères, alliés ou rivaux de Rome selon les circonstances.
La vallée du M’zab, refuge des rescapés du royaume de Tahert (Tiaret), façonnée au xe siècle par les ibadites – une école de théologie de l’islam – autour de cinq villages fortifiés, appelés ksour (pluriel de ksar, le palais en langue arabe) et ses verdoyantes oasis, modèle d’architecture traditionnelle et de développement durable, concept inventé par nécessité par les mozabites avant la lettre, est célèbre dans le monde entier. De même que la Qalaa (citadelle) des Béni Hammad, capitale de la dynastie qui régna sur ces contrées du Maghreb central entre 1015 et 1152. Sa mosquée de treize nefs à huit travées était la plus grande de l’Algérie, et ses vestiges perchés dans un site montagneux de toute beauté, restituent l’image d’une ville musulmane fortifiée.
La Casbah d’Alger, modèle de la médina islamique, dont les palais sont en restauration, a été le siège d’une des plus grandes épopées de la guerre de libération nationale, la bataille d’Alger en 1957. Tlemcen, ancienne capitale des Zianides, les Banu Zyan, une dynastie berbère zénète (1235-1556), a été promue en 2011 « capitale de la culture islamique » et fourmille de témoignages de son passé prestigieux. Elle fut un centre religieux, culturel, intellectuel recherché au xiie siècle. Parmi ces monuments, il faut citer la Grande Mosquée, la mosquée Sidi-Boumédiène et El-Méchouar.
Cette énumération succincte ne dit pas tout de ce que le pays abrite de témoignages de son passé glorieux au contact de civilisations diverses qui y ont laissé leurs empreintes.
Durant les cinq dernières décennies de l’indépendance, pour des raisons diverses, le tourisme ne figurait pas parmi les priorités du développement. Le secteur n’a commencé à se réveiller que récemment, quand les autorités ont élaboré une approche qui veut échapper à la standardisation et à la banalisation de ce produit. Il s’agit, selon l’expression du nouveau ministre du Tourisme, Mohammed Benmeradi, de promouvoir une « stratégie réaliste et ambitieuse » proposant « la mise en place de bases susceptibles de soutenir l’émergence d’une destination compétitive et attractive, portant le label de l’authenticité et de l’excellence ». La relance de ce secteur a fait l’objet d’un plan de promotion adopté par le gouvernement en 2008 pour l’horizon 2030, qui, selon le ministre, reste « une référence juridique et une approche à long terme qui permet d’éviter le développement d’un tourisme anarchique et non contrôlé ». Il se fonde sur une législation cohérence de protection du littoral, de préservation des milieux forestiers, des sites culturels et archéologiques, et de promotion du patrimoine matériel et immatériel du pays. L’objectif est de donner une forte impulsion à un « tourisme durable ». Ce qui, outre l’élaboration de programmes et de plans éducatifs et d’information pour la promotion de la culture touristique et de la destination Algérie, implique la mobilisation de toutes les énergies, celles des secteurs concernés et des acteurs du tourisme, ainsi que la préservation de l’environnement et des ressources, a souligné le ministre. La finalité est de faire du pays, avec la richesse et la diversité de son potentiel, une « destination privilégiée ». En 2015, la capacité d’accueil devrait avoir été portée à 130 000 lits, contre 94 000 actuellement.
Le schéma directeur d’aménagement touristique (Sdat), qui couvre l’horizon 2030, est la référence de la politique touristique visant à diversifier l’économie nationale et drainer les investissements étrangers, comme alternative à la dépendance aux hydrocarbures. Il s’inspire du schéma national d’aménagement du territoire (Snat) qui définit les étapes et les moyens de réaliser le développement durable dans tous les secteurs. Adopté en 2008, le schéma touristique traduit la volonté de l’État de valoriser les potentialités naturelles, écologiques, culturelles, historiques et archéologiques du pays. Il a pour but de promouvoir la destination algérienne, développer les centres touristiques de haut niveau, nouer des partenariats entre les secteurs public et privé, encourager l’investissement national et étranger et renforcer le tourisme local, ce dernier selon des programmes élaborés par les départements.
Parmi les cinq piliers de cette politique touristique, figure l’amélioration de la qualité des prestations touristiques, dans le cadre d’une concertation permanente en vue d’instaurer une relation basée sur la transparence entre l’État et tous les opérateurs économiques appelés à contribuer à la relance du secteur. L’État est disposé à orienter les investisseurs et les professionnels du secteur et à les accompagner auprès des entreprises, des autres partenaires, ainsi qu’auprès des centres de décision, tant au niveau national qu’au niveau central. L’accent est mis sur l’importance de changer les mentalités et les comportements pour asseoir une culture touristique nouvelle et durable. Ce qui nécessite de nouvelles approches pour redorer l’image du tourisme dans le pays et donner un coup d’accélérateur, en particulier dans la zone saharienne et dans la région des Hauts-Plateaux. Il s’agit de réhabiliter un riche patrimoine historique et archéologique, qui est la mémoire de la nation, et de développer l’artisanat, source de création et de richesse.
La stratégie de développement touristique adoptée repose sur la création de zones d’expansion touristique (Zet) qu’il faut doter de plans d’aménagement touristique. L’Algérie compte actuellement 207 Zet ouvertes aux investisseurs sur un périmètre de 56 000 hectares. Sept pôles touristiques d’excellence seront réalisés dans ce cadre. Ils seront répartis en pôles régionaux (Nord-Est, Nord-Centre, Nord-Ouest, Sud-Est-Oasis, Sud-Ouest-Touat-Gourara). Des facilités ont été accordées par l’État pour l’octroi d’assiettes immobilières destinées à ces projets. Elles consistent en concessions de gré à gré, à un prix fixé par l’État, pour une activité classée parmi celles bénéficiant du soutien public à la croissance économique.
Ainsi, la TVA (taxe sur la valeur ajoutée) a été réduite de 17 % à 7 % sur les prestations liées aux activités touristiques, hôtelières, thermales, de restauration classée, de voyages et de transport touristique. Les investisseurs bénéficient d’un taux réduit de droits de douane pour l’achat d’équipements hôteliers et d’ameublement à l’étranger, un abattement de 50 % pour les Hauts-Plateaux et de 80 % pour le Sud sur le prix de concession de terrains nécessaires à la réalisation de leurs projets. Ils bénéficient également d’une bonification de 3 % à 4,5 % pour les projets touristiques à réaliser respectivement au niveau des wilayas du Nord et celles du Sud. Un dispositif d’aide à l’investissement a été mis en place à travers le Fonds d’appui à l’investissement, à la promotion et à la qualité des activités touristiques. Les sociétés touristiques sont exemptées du droit d’enregistrement lors à leur constitution. Des accords ont été conclus avec six banques publiques pour faciliter l’accès aux crédits des projets touristiques. 763 projets d’hôtels, d’un coût global de plus de 400 millions euros, sont en cours de réalisation à travers le territoire, afin d’augmenter les capacités d’accueil du pays. Les investisseurs bénéficient de crédits bancaires et d’assiettes immobilières attractives, notamment dans les Hauts-Plateaux et le Sud. Un milliard de dollars environ a été alloué à la réhabilitation de grands hôtels du secteur public, comme l’Aurassi à Alger, réalisée au lendemain de l’indépendance ou durant les années 1970.
Le Stad juge par ailleurs indispensable l’amélioration de la formation dans les différentes spécialités hôtelières et touristiques en vue d’améliorer la qualité des prestations et de satisfaire les exigences de la clientèle. Outre la réalisation de nouveaux hôtels de haut standing international, il souligne la nécessité de doter les structures d’hébergement existantes d’équipements modernes, en y généralisant notamment l’utilisation des technologies de l’information et de la communication (Tic), en y garantissant la sécurité et en y variant les prestations.
Le secteur dispose de 880 places dans la formation hôtelière et touristique, réparties en quatre instituts nationaux, publics, dont 200 sont assurées par l’Institut national du tourisme installé dans l’enceinte de l’hôtel Aurassi, à Alger. Ce dernier doit être transféré à Tipasa où il pourra accueillir 1 200 élèves. L’Institut national des techniques hôtelières et du tourisme de Tizi Ouzou, dont l’éventail des spécialités a été élargi pour former des techniciens et des techniciens supérieurs dans différents métiers touristiques, forme 300 élèves. L’annexe de Tlemcen dispose de 80 places et à Boussaâda, l’Institut national d’hôtellerie et de tourisme pour la formation de techniciens et techniciens supérieurs dispose de 300 places. En 2013 doit être ouvert un nouvel institut à Aïn Témouchent, d’une capacité de 400 places. Homogénéité de la formation selon les secteurs géographiques, définition de nouvelles filières, actualisation des connaissances et modernisation de la formation conformément aux normes internationales sont les nouvelles directives pédagogiques du secteur. Il s’agit d’offrir une formation de qualité en prenant en considération les besoins du marché du travail et l’amélioration des prestations touristiques.
Outre les établissements publics, il existe 36 établissements privés agréés qui assurent 20 % de la formation touristique, dont 78 % relèvent de la formation professionnelle disposant de 141 établissements spécialisés dans le tourisme.
Depuis l’indépendance, plus de 8 600 étudiants ont bénéficié d’une formation technique, professionnelle ou managériale dans les instituts nationaux de formation hôtelière. Une nouvelle carte permet désormais de suivre la formation dans ce secteur afin de connaître le nombre d’étudiants ayant bénéficié d’une formation en hôtellerie et tourisme et d’identifier les besoins futurs. Il s’agit de garantir une répartition équitable de la formation en fonction de la demande de chaque pôle touristique.