Au moment où les représentants de la nation bleu-blanc-rouge s’activaient, au palais Bourbon, à démolir les reliques de la politique économique et sociale sarkozyste orientée prioritairement vers la satisfaction des besoins et lubies des riches au détriment de la racaille, voilà que l’ex-président, pourtant chassé du pouvoir le 6 mai, refuse de « mourir ». Il bouge encore. Ciel, quelles bêtises va-t-il encore commettre ?
Très fier de son bilan libyen qui s’est soldé par l’assassinat sauvage, devant caméras, du Guide Mouammar Kadhafi qu’il avait reçu en grande pompe à Paris quelques mois plus tôt, Sarkozy veut rééditer son « exploit », cette fois en Syrie. Il accuse son successeur de n’être pas aussi va-t-en-guerre que lui. Il se permet, entre deux villégiatures, d’appeler le chef fantoche des rebelles syriens et négocie avec lui un communiqué pour afficher une convergence de vues sur la nécessité d’une intervention militaire internationale, sinon française, en Syrie.
Battu à plate couture par Hollande, Sarkozy rumine sa revanche. Il ne veut pas laisser le nouveau président s’occuper des vrais problèmes de chômage et de précarité des Français exacerbés au cours du quinquennat précédent. Sarkozy veut entraîner Hollande dans une aventure militaire foireuse qui empêcherait son successeur de dérouler son programme de reconstruction de la France, et ainsi de réussir là où il a échoué. Le boulevard serait ainsi grand ouvert pour un retour aux affaires en 2017, avec un nouveau costard : celui du père sauveur d’une nation en péril socialiste.
Ce scénario de la vengeance sarkozyste n’est apparemment pas pris suffisamment au sérieux par les nouveaux locataires de l’Élysée et du Quai d’Orsay. Le vocabulaire très rustique employé par le chef de la diplomatie française, Laurent Fabius, en tournée dans la région du Proche-Orient, laisse penser que le socialiste a succombé à la rhétorique guerrière à forts accents benghazistes de Sarkozy et de son philosophe-reporter de guerre personnel, Bernard-Henri Lévy. « Bachar al-Assad [le président syrien] ne mérite pas de vivre sur terre », « ce régime doit être abattu, et rapidement », voilà ce qui est sorti de la bouche d’un ministre français des Affaires étrangères ! On se croirait en Iran, du temps où un certain ayatollah Khalkhali, chef des tribunaux révolutionnaires, très expéditif dans ses sentences, envoyait à la potence ses victimes qu’il disait « évidemment coupables », jugeant inutile tout procès sérieux. Même Alain Juppé, épris de charia et ennemi de Kadhafi, n’était pas allé jusqu’à solliciter la peine de mort pour un individu même pas encore jugé !
La situation en Syrie est suffisamment critique pour ses habitants et les autres peuples de la région pour qu’un ancien président français en quête de sensations fortes et de redécollage politique et un ministre des Affaires étrangères désireux de plaire se donnent ainsi en spectacle, en exploitant la souffrance des gens comme fonds de commerce politique. Qu’une telle instrumentalisation du conflit syrien à des fins de repositionnement politique en France vienne de Sarkozy, qui s’en étonnerait ? L’ex-chef de l’État n’est-il pas coutumier du fait ? Son activisme en Libye n’obéissait-il pas à quelque besoin de remonter dans les sondages en France ?
La Libye libérée dont se vante Sarkozy, parlons-en. Kadhafi a été torturé et exécuté sans aucune justice, de nombreux Noirs libyens ou immigrés subsahariens ont été et continuent d’être torturés et/ou assassinés en Libye, les bombes éclatent régulièrement en Libye libre, la loi islamique s’installe, la polygamie renaît de ses cendres, les armes parachutées par la France sarkozyste dans le Djebel Nefoussa sont désormais aux mains des djihadistes qui sèment la terreur dans les pays alentour, notamment au Mali, où ils ont installé leur quartier général, à partir duquel ils menacent toute l’Afrique de l’Ouest, jusqu’au Nigeria.
C’est ce schéma que le faux retraité Sarkozy et le « foulosophe » BHL veulent voir reproduit en Syrie : largage d’armes aux rebelles, neutralisation de Bachar al-Assad au moyen d’une no fly zone ou d’une no kill zone, selon la formule démagogique des nouveaux grands stratèges arabes, les démocrates qataris, pour faciliter la capture et l’exécution d’un chef d’État en exercice, selon le verdict sans appel de l’ayatollah Fabius Khalkhali. Comme dans le cas libyen, on ne se préoccupe guère en Syrie des atrocités également commises par les rebelles de l’Armée libre. Le chef des enquêteurs de l’Onu, le Brésilien Paulo Pinheiro, a pourtant indiqué dans son rapport que les autorités de Damas comme les rebelles ont tous commis des crimes de guerre, même si, pour contenter les Occidentaux, on a glissé que les crimes de guerre des rebelles seraient de moins grande importance !
Comme en Libye, gageons que le Tribunal pénal international, aux ordres, ne tardera pas à émettre des mandats d’arrêt contre Bachar al-Assad et ses principaux soutiens pour génocide. Quant aux chrétiens syriens quotidiennement exterminés, il s’agit d’un génocide de moindre ampleur !
Voilà ce qui risque d’arriver, si personne ne dit quelques vérités à Sarkozy : à savoir qu’il n’est plus président de la République et qu’il est censé s’être retiré de la vie politique. Tous ensemble, aidons Sarkozy à rester en retraite et à s’établir définitivement dans son luxueux riad de Marrakech, pour s’occuper de son épouse et de sa petite Giulia.