Malgré les affirmations et les certitudes de la direction d’Amplats, filiale du groupe géant Anglo-American, premier mondial pour la production de platine, plus de 80 % des milliers de mineurs du bassin de Rustenburg sont encore en grève.
Les menaces de licenciements et de mesures disciplinaires répétées, mais à chaque fois reportées face à la volonté des mineurs, n’ont pas impressionné. Comme leurs collègues de la mine de Marikana où la grève avait été réprimée violemment par les forces de police (46 morts au total), ils réclament un salaire minimum de 12500 rands (1100 euros). La pénibilité du travail, les conditions de vie inhumaines, logés dans des bidonvilles sans aucun service de base, isolés souvent de leur famille, frappés par les accidents du travail et la maladie, sous-payés, les mineurs de platine qui rapportent des milliards de dollars à l’Anglo-American disent « non » haut et fort.
Jacob Zuma a beau placer l’armée sur les sites jusqu’en janvier 2013 comme il vient de le décider, les forces de police et militaires ont beau intimider les mineurs, y compris en lançant des raids de nuits violents dans les bidonvilles, les patrons d’Amplats ont beau menacer, il semble que ce mouvement ne soit pas prêt de faiblir. Les mineurs sont toujours aussi nombreux autour de leur syndicat indépendant, l’Association des mineurs et de la construction (AMCU) dans le stade où ils sont autorisés à se réunir quotidiennement.
Les mineurs d’Amplats s’étaient déjà mis en grève pendant six semaines en janvier et février dernier, dans un contexte également de grande violence – trois morts et un grand nombre de blessés – pour une augmentation de salaire de 10% pour tous. Aujourd’hui, à leur grand mécontentement, la direction a accordé des augmentations variables selon la catégorie. Les milliers de mineurs assemblés pour entendre leurs représentants, ont manifesté leur insatisfaction et demander une prolongation des négociations. Dans un communiqué, la direction les a prié instamment de « travailler ensemble pour sauver leur emploi », avant d’annoncer que la prochaine révision des salaires aurait lieu en juillet 2013. Elle parle à dessein d’ « ajustement » et non d’ « augmentation ».
Comme dans d’autres mines, le syndicat indépendant AMCU est soutenu par la majorité des mineurs qui rejettent le monopole du syndicat NUM, affilié à la COSATU, elle-même alliée de l’ANC au pouvoir. Ses représentants sont accusés de ne pas défendre les travailleurs et de privilégier les relations avec les propriétaires des mines dont certains de ses membres dirigeants sont actionnaires. Les grèves dans les mines sont revendicatives, certes, mais aussi très visiblement politiques. Les sentiments anti-Zuma s’expriment haut et fort, à deux mois du congrès électif crucial de l’ANC qui décidera, ou non, d’un nouveau mandat pour l’actuel président de la République. Derrière les mineurs, il y a aussi les femmes qui ont montré leur détermination, les familles, les relations, le village parfois, autant d’électeurs qui pourraient, et certains le déclarent déjà, ne pas voter ANC aux prochaines élections générales. Ce sentiment n’est pas limité aux mineurs, dans d’autres secteurs d’activité et au sein d’une population choquée par la répression anti mineurs, la colère contre le gouvernement et le président est montée d’un cran.