A peine rentré d’Allemagne, le président de la République, à l’approche du 2ème anniversaire du Hirak s’est adressé à la nation pour annoncer une série de mesures spectaculaires pour accélérer la marche vers la Nouvelle République et le renouvellement des institutions. Il a ainsi annoncé la dissolution de l’APN et l’organisation d’élections législatives anticipées selon la nouvelle loi électorale.
Par Philippe Tourel (avec l’APS)
Une révolution institutionnelle en marche
Dans son discours très attendu, le chef de l’État a d’emblée renvoyé dos à dos les nihilistes et les pêcheurs en eaux troubles, basés massivement à l’étranger, qui ne voient le changement que sur les ruines de l’État-nation. «Le changement radical passe par un changement des institutions» « indiscutablement reconnues et admises comme revendiqué par le Hirak béni ». Le message est sans ambiguïté. En dehors de l’État souverain, social, protecteur, émanant des urnes et non des officines de propagande au service de forces étrangères occultes adeptes du sinistre slogan du « chaos créateur », qu’on a vu à l’œuvre en Irak, en Libye et ailleurs, il n’y a ni changement, ni révolution. Faut-il rappeler aux amnésiques que la première revendication du « Hirak béni » a été justement le retour à la légalité institutionnelle. En s’adressant à son peuple dans son premier discours après son rétablissement total suite à sa contamination par le coronavirus, Abdelmadjid Tebboune, qui se définissait comme « novembriste » et démocrate attaché à la démocratie issue des urnes, n’a pas mâché ses mots. Il a déclaré d’emblée : « J’ai décidé de dissoudre l’APN dans sa composante actuelle. Nous allons passer, de suite, à des élections où l’argent, sale ou pas, n’aura point de place, des élections qui ouvriront leurs portes aux jeunes », pour que cette catégorie « ait son poids politique » à même de lui permettre d’accéder aux institutions élues. « L’État œuvrera à aider ces jeunes, notamment pour mener leurs campagnes électorales dont nous prendrons en charge une grande partie », a-t-il ajouté.
De cette manière, poursuit le Président Tebboune, « nous aurons opéré un changement en injectant du sang neuf dans les organes de l’État et le parlement qui sera le porte-voix du peuple ».
Le Président Tebboune a tenu à réaffirmer que « le Parlement sera élu et le contrôle sera assuré par l’Instance indépendante dans les prérogatives de laquelle ne s’immisceront ni les présidents des APC ni les walis (…), ni même le président de la République et nous ferons en sorte que nos institutions ne suscitent aucune suspicion ».
Dans la foulée, il a annoncé « un remaniement ministériel dans les prochaines 48 heures » qui touchera certains secteurs ayant enregistré « des lacunes ». Autrement dit, les ministres ayant failli dans leur mission seront changés, en attendant la formation d’un gouvernement reflétant la volonté populaire sortie des urnes.
Les principes fondateurs de la diplomatie algérienne réaffirmés
Autre sujet abordé dans son discours : la politique étrangère. Sans surprise il a réaffirmé les constantes et les principes fondateurs de la diplomatie algérienne concernant le règlement des conflits par des voies pacifiques et le dialogue, notamment ceux prévalant en Afrique, soulignant que le conflit au Sahara occidental était une question de décolonisation qui doit être réglée à travers l’organisation d’un référendum d’autodétermination.
Il s’est « réjouit » de l’accord auquel sont parvenus les belligérants libyens en Suisse, ce qui honore et rassure l’Algérie qui a consenti des efforts diplomatiques pour parvenir à un règlement pacifique de la crise dans ce pays. La voix de l’Algérie a été donc entendue sur ce dossier
Il a ainsi souligné que la diplomatie algérienne a fait entendre de nouveau la voix de l’Algérie dans les forums internationaux concernant la crise libyenne en affirmant constamment que la solution doit être libyo-libyenne, ainsi que son équidistance avec toutes les parties et les groupes sans partialité en faveur d’une partie ou d’une autre, et ce sous l’égide de l’ONU.
Le Président Tebboune a rappelé que les réunions de Genève avaient abouti au choix de nouveaux dirigeants libyens chargés de l’organisation d’élections générales en Libye le 24 décembre prochain.
Pour rappel, les belligérants libyens avaient réussi, début février courant dans le cadre du Forum de dialogue politique tenu à Genève sous les auspices des Nations unies, à choisir un nouveau pouvoir exécutif (Gouvernement).
Évoquant la situation au Sahel, le Président Tebboune a relevé la participation de l’Algérie à la relance de l’accord de paix et de réconciliation au Mali, issu du processus d’Alger, notant qu’après des années de la signature de ce document par les parties maliennes, le Comité de suivi de l’Accord pour la Paix et la Réconciliation au Mali (CSA) avait organisé récemment une réunion à Kidal (nord du Mali), sous les auspices des autorités maliennes afin d’appliquer les clauses de cet accord et rétablir la paix au nord du Mali.
Se félicitant de cette démarche, le Président Tebboune a formé le vœu de voir « une conjugaison des efforts des pays qui œuvrent à concrétiser la stabilité au Mali et à rétablir la quiétude et le calme pour nos frères dans ce pays ».
Concernant le conflit au Sahara occidental, le président de la République a affirmé que « la position de l’Algérie est claire à ce sujet ». C’est une question de décolonisation, le Sahara occidental étant « la dernière colonie en Afrique, dont le règlement nécessite de permettre au peuple sahraoui d’exercer son droit à l’autodétermination ».
Pour ce qui est de la Palestine, le Président Tebboune a réitéré la position indéfectible et inconditionnelle de l’Algérie en faveur du droit du peuple palestinien à recouvrer l’ensemble de ses droits usurpés et à établir un État indépendant dans les frontières de 1967, en toute souveraineté, avec El Qods pour capitale, sur la base de l’initiative arabe pour la paix.
Concernant la gestion de la pandémie du Covid-19, le président Abdelmadjid Tebboune a affirmé que les mesures de solidarité et d’aide prises au profit des opérateurs économiques ont permis de surmonter la crise résultant de la propagation du nouveau Coronavirus (Covid-19) avec un moindre préjudice.
Covid-19 : une gestion exemplaire
Cette pandémie « a impacté notre économie, mais les mesures que nous avons prises, notamment de solidarité, d’aide et d’atténuation de l’incidence de la crise sur les opérateurs économiques, nous ont permis de surmonter cette conjoncture avec un moindre préjudice ». La gestion algérienne de cette pandémie a été exemplaire selon l’OMS. Ce n’est pas un hasard si le bilan des décès est de loin le plus faible par rapport à ses voisins tunisiens et marocains.
Étant le premier pays africain à adopter le vaccin russe Spoutnik-V, l’un des plus sûrs du marché mondial des vaccins, le Président Tebboune a annoncé que « le vaccin russe anti-covid Spoutnik V sera fabriqué en Algérie dans 6 à 7 mois ». « Nous avons convenu avec nos amis russes de fabriquer ce vaccin », a-t-il poursuivi, rappelant que la fabrication de vaccins en Algérie « n’est pas chose nouvelle ».
Le chef de l’État a saisi cette occasion pour saluer la conduite des citoyens face à cette pandémie. « Grâce à la patience et aux sacrifices de tous les Algériens, notamment les jeunes, et à leurs discipline, nous sommes parvenus à asseoir une harmonie dans notre lutte contre le virus ».
Relance économique
Parallèlement à la gestion de la pandémie, qui recule sensiblement grâce aux mesures préventives et à la campagne de vaccination, les jalons de la relance économique ont d’ores et déjà été jetés afin de construire une économie créatrice de richesses et de postes d’emploi.
« Aujourd’hui, le moment est venu pour redémarrer notre économie. J’ai rencontré des investisseurs et je les ai encouragés à poursuivre la mise en œuvre de la stratégie tracée pour la relance de l’investissement, un investissement créateur de postes d’emploi et de richesses, et à s’écarter de l’économie fausse que nous pratiquions et qui était principalement basée sur les importations et la surfacturation », a affirmé M. Tebboune.
Le Président Tebboune a également salué « la détermination » et « l’esprit d’innovation » dont ont fait montre les jeunes pendant la pandémie de Covid-19, sur les plans technique, scientifique et économique, soulignant à ce propos qu’ils sont restés forts dans les moments difficiles.
Tout en insistant sur la nécessité de continuer sur cette voie et d’être compétitifs dans ces domaines, le président de la République a rappelé l’intérêt soutenu accordé à la jeunesse, notamment à travers la création de deux départements ministériels dédiés à cette frange et d’un fonds national pour le financement des start-up.
Fidèle à son parler vrai, le président a tenu dans ce discours, qui annonce une nouvelle étape dans le colossal chantier de refondation des institutions de la République et de la redynamisation de la vie économique, à envoyer un message d’espoir et de détermination à relever les défis malgré une conjoncture intérieure, régionale et mondiale difficile. En comptant sur les forces vives du pays, l’énergie de sa jeunesse et son potentiel économique et humain.
Philippe Tourel et APS