L’UA a annoncé qu’elle tiendrait un sommet extraordinaire sur la Libye à Addis Abeba, les 25 et 26 mai pour tenter de trouver « une solution africaine à la crise ».
Face à l’enlisement et au refus de l’Otan, pour le moment, de toute sortie politique du conflit, des voix de plus en plus critiques s’élèvent dans les pays du Sud et parmi les cinq puissances qui s’étaient abstenues lors du vote de la résolution 1973 du Conseil de sécurité, pour dénoncer les dérives de la coalition. Alors que la mission que lui avait assignée le Conseil de sécurité était de « protéger la population civile », elle est actuellement clairement redéfinie par les coalisés au sein de l’Otan : « renverser le régime de Kadhafi ». Même si le prix en est le massacre d’autres civils, mais cette fois-ci dans les zones contrôlées par le pouvoir libyen, jusqu’ici légalement reconnu par l’ONU et la communauté internationale.
C’est dans cette perspective de changement de régime que l’Otan a poursuivi ses raids dans la nuit de samedi 21 à dimanche 22 mai sur le port de Tripoli, tandis que le régime de Mouammar Kadhafi dénonçait le "siège" maritime de la Libye imposé par l’Alliance atlantique.?La réaction du colonel Kadhafi est intervenue après la destruction vendredi 20 mai de huit navires dans plusieurs ports du pays dans le cadre des opérations fallacieusement destinées à protéger les civils de la répression.?"Les huit navires détruits appartiennent aux gardes-côtes libyens et ne dépassent pas les cinquante mètres de long", a assuré le commandant Omran Al-Ferjani, chef des gardes-côtes, lors d’une conférence de presse.?Parmi eux se trouve une frégate de la marine d’une centaine de mètres de long, qui était au port de Tripoli pour entretien, a-t-il affirmé.?Selon ce commandant, la Libye subit un "siège maritime". Aucun navire de la marine ou des gardes-côtes n’a quitté son port depuis le 25 mars, date à laquelle "nous avons reçu une notification de l’Otan interdisant à nos bateaux de naviguer, même dans les eaux territoriales", a-t-il expliqué.?L’Otan a mené ses raids de la nuit également sur la résidence du colonel Mouammar Kadhafi à Bab Al-Aziziya, près du centre de la capitale, selon un responsable libyen.?Vendredi 20 mai, l’Otan avait annoncé avoir coulé huit navires de guerre lors d’attaques coordonnées dans la nuit du jeudi 19 au vendredi 20 mai, assurant n’avoir pas eu "d’autre choix" compte tenu du "recours de plus en plus fréquent à la force navale" par Tripoli.?Les raids de l’Otan ont permis de stabiliser la ligne de démarcation sur le front Est, entre Brega et Ajdabiya, à 160 km au sud-ouest de la "capitale" rebelle Benghazi, et d’aider les insurgés à desserrer l’étau autour de Misrata, la grande ville rebelle assiégée à 200 km à l’est de Tripoli.?En cherchant à couper les chaînes de ravitaillement des forces pro-Kadhafi, l’Otan a aussi provoqué depuis plusieurs semaines une pénurie de carburant qui crée des tensions dans l’ouest du pays, majoritairement contrôlé par le régime.?Samedi 21 mai, un bus officiel transportant trois journalistes étrangers a été pris à partie par une foule en colère à l’entrée de la ville de Zouara, à 100 km à l’ouest de Tripoli, quand une journaliste de télévision chinoise a sorti une caméra pour filmer une longue file d’attente devant une station service.?De plus en plus critique vis-à-vis des opérations de l’Otan, l’Union africaine (UA) a annoncé qu’elle tiendrait un sommet extraordinaire consacré en particulier à la Libye, les 25 et 26 mai à Addis Abeba. Tripoli avait sollicité ce sommet en avril afin de trouver une solution africaine à la crise.?L’UA a engagé une médiation autour d’une "feuille de route" acceptée par M. Kadhafi mais rejetée par les rebelles, qui réclament le départ du dirigeant en préalable à toute discussion.?Dans une lettre aux leaders du Congrès américain vendredi 19 mai, le président Barack Obama a demandé leur soutien pour la poursuite des opérations militaires en Libye, le délai légal de 60 jours d’intervention sans autorisation parlementaire ayant été dépassé.?Washington a jugé "légitime et crédible" le Conseil national de transition (CNT), l’instance dirigeante de la rébellion libyenne, tout en s’abstenant de le reconnaître comme unique interlocuteur, comme l’ont pourtant fait la France, le Qatar, l’Italie, la Gambie, le Sénégal et le Royaume-Uni.?A Benghazi, quatre employés français d’une société privée de sécurité détenus depuis le 11 mai après une arrestation qui s’était soldée par la mort de leur patron, ont été libérés et reconduits en Égypte, a annoncé le ministère français des Affaires étrangères.?Ils sont soupçonnés d’espionnage au profit de M. Kadhafi, mais "la justice libyenne (rebelle) n’a pas l’intention de les juger", a expliqué une source libyenne proche du dossier, ajoutant : "Nous voulons les expulser et qu’ils ne reviennent plus. L’important était de les empêcher de nuire".
Par Ailleurs, la Russie, qui prône depuis le début une sortie politique de la crise, a invité un représentant du CNT (rebelles) à Moscou, pour l’inciter à accepter, sans préalable une table ronde avec toutes les parties libyennes en conflit, que ce dernier continue à rejeter.