Les efforts de la diplomatie russe pour parvenir à un cessez-le-feu pourraient être couronnés de succès. Les discussions avec les représentants du pouvoir Kadhafi en témoignent, mais les représentants des insurgés n’ont pas encore été reçus à Moscou.
Face à l’enlisement du conflit libyen et les incertitudes qui pèsent sur l’avenir de ce pays, la Russie, relayant l’Union africaine, se pose désormais en médiateur. Le pouvoir libyen, malgré sa déception à peine dissimulée après l’abstention russe lors du vote de la résolution 1973, privilégie actuellement cette médiation. Il serait prêt à faire des « concessions » à Moscou pour lui faciliter la tâche : cessez-le feu sous contrôle international, retrait dans l’honneur de Kadhafi, et organisation d’élections libres et transparentes.
Deux émissaires libyens du régime Kadhafi viennent d’être reçus dans la capitale russe, porteurs d’une demande.
Se posant en médiateur « honnête » dans un conflit dans lequel elle a refusé de s'aligner sur les Occidentaux, la Russie, par la bouche de son ministre des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a déclaré, à l’issue de ses entretiens avec les deux émissaires de Tripoli : « Nous avons fait valoir qu'il était indispensable pour les dirigeants libyens de commencer à mettre en œuvre pleinement les résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU » qui prévoient notamment de cesser tout recours à la force contre des civils. Moscou, qui prévoit de recevoir prochainement des émissaires de la rébellion, estime qu'il faut « convaincre toutes les parties en conflit qu'il n'y a pas de solution militaire à cette situation et qu'il faut le plus vite possible décréter un cessez-le-feu », a ajouté M. Lavrov.
Il s'exprimait à l'issue d'entretiens avec Muhammad Ahmed Al-Sharif, secrétaire général de la World Islamic Call Society, une institution créée par le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi.
"Si l'on arrive à le faire, alors il n'y aura plus aucune raison pour continuer les bombardements de l'aviation de l'Otan, qui dépassent largement le cadre des objectifs fixés par les résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU", a encore déclaré M. Lavrov.
Moscou, qui maintient formellement des relations avec le régime de Tripoli, accuse maintenant les Occidentaux de violer l'esprit et la lettre de la résolution.
Le 6 mai, M. Lavrov et son homologue chinois Yang Jiechi ont déclaré que leurs deux pays uniraient leurs efforts pour réclamer un cessez-le-feu, répétant leur opposition de principe à toute ingérence et a fortiori à une intervention terrestre. Moscou et Pékin partagent l'opinion selon laquelle "chaque peuple doit déterminer lui même son destin, sans ingérence", avait souligné M. Lavrov.
Le ministre russe avait aussi critiqué l'intention, selon lui, du groupe de contact formé sur la Libye à l'initiative des Occidentaux, et auquel ne participent ni Moscou ni Pékin, d'étendre sa compétence à d'autres crises de la région comme celle qui se déroule en Syrie."Cette structure, qui s'est autoproclamée, tente de plus en plus de s'attribuer le rôle principal dans la détermination de la politique de la communauté internationale à l'égard de la Libye, et pas seulement de la Libye", a déclaré M. Lavrov. Dans un communiqué, son ministère a réitéré ses appels à mettre fin aux hostilités, soulignant que la catastrophe humanitaire s'aggravait.
De son côté, le Premier ministre russe Vladimir Poutine avait sévèrement critiqué le 26 avril, au cours d'une visite à Copenhague, les efforts plus ou moins avoués visant à atteindre Mouammar Kadhafi. La visite à Moscou des émissaires de ce dernier survient alors que la pression occidentale s'accentue sur le dirigeant libyen, l'Otan ayant mené mardi 17 mai de nouveaux raids sur des bâtiments officiels à Tripoli, au lendemain de la demande par le procureur de la Cour pénale internationale d'un mandat d'arrêt.
Quant au passage à Moscou de représentants de la rébellion libyenne, M. Lavrov a indiqué qu'il était initialement prévu mercredi 18 mai mais avait été ajourné pour des raisons "techniques". « Nous attendrons qu'ils soient prêts à venir », a déclaré le ministre russe, sans précision sur la cause de cet ajournement.
Avec les agences