Quelle est la portée réelle de la reconnaissance par les Etats-Unis du Conseil national de transition libyen comme « autorité gouvernementale légitime » de la Libye ?
Quelle est la portée réelle de la reconnaissance par les Etats-Unis du Conseil national de transition libyen comme « autorité gouvernementale légitime » de la Libye ? S’agit-il d’une annonce sans réelle portée pratique ? Cela permettra-t-il aux Etats-Unis de se servir des avoirs libyens gelés par décision du Conseil de sécurité de l’Onu et qui se montent à 30 milliards de dollars, rien qu’aux Etats-Unis pour les mettre à la disposition des rebelles libyens? Ce n’est pas si sûr. Car pour pouvoir lever le gel des avoirs libyens à l’étranger, seul le Conseil de sécurité de l’Onu a le droit et le pouvoir de le faire. Or ni la Russie, ni la Chine et encore moins la plupart des membres du Conseil de sécurité ne sont d’accord pour prendre une telle mesure. D’autant plus que ces pays, qui s’étaient abstenus lors du vote de la résolution 1973, se sentent trompés par l’usage que l’Otan en a fait. D’une résolution destinée à protéger la population civile, l’Otan en a fait un prétexte pour renverser le régime libyen et aider l’une des parties en conflit dans une guerre civile.
Nous publions ci-dessous, l’article du journaliste Stephen Kaufman à propos de la véritable portée de cette décision américaine de reconnaissance du CNT comme « autorité gouvernementale légitime » prise à Istanbul, paru dans le site officiel du Département d’Etat américain (https://iipdigital.usembassy.gov/iipdigital-fr/index.htm)
« Washington – La secrétaire d'État Hillary Rodham Clinton a annoncé que les États-Unis allaient reconnaître le Conseil national de transition (CNT), dans lequel ils voient « l'autorité gouvernementale légitime de la Libye ». Cette décision devrait permettre à la rébellion de bénéficier d'aides financières supplémentaires, ce dont elle a besoin pour lutter contre le régime de Mouammar Kadhafi et préparer la transition politique.
S'exprimant à Istanbul le 15 juillet, Mme Clinton a déclaré que les États-Unis s'engageaient à « reconnaître le TNC comme l'autorité gouvernementale légitime de la Libye » et à « traiter avec lui sur cette base » en attendant la mise en place d'une autorité intérimaire.
« En revanche, a ajouté Mme Clinton, les États-Unis considèrent que le régime Kadhafi ne jouit plus d'une autorité légitime en Libye. »
La secrétaire d'État avait rejoint les représentants de plus d'une trentaine de pays, du CNT, de la Ligue arabe, de l'Union africaine, de l'OTAN, de l'Union européenne, du Conseil de coopération du Golfe et de l'Organisation de la conférence islamique pour assister à une réunion du Groupe de contact de la Libye, lequel s'efforce de soutenir le CNT tout en faisant monter la pression sur le colonel Kadhafi afin de pousser ce dernier à renoncer au pouvoir.
Quand certaines questions juridiques auront été réglées et que les États-Unis auront reconnu le CNT, a précisé Mme Clinton, celui-ci aura accès « à des sources supplémentaires de financement », et les responsables des États-Unis, « en concertation avec le CNT et nos partenaires internationaux, réfléchiront à la manière la plus efficace et la plus appropriée de procéder ».
Face à la violence dont le régime Kadhafi a fait preuve envers la population libyenne, le gouvernement Obama a décrété le gel des avoirs de l'État libyen à compter du 25 février, et le Trésor des États-Unis a dit avoir saisi environ 30 milliards de dollars qui étaient détenus par les dirigeants libyens.
Mme Clinton a accueilli avec satisfaction l'aide financière directe que divers pays ont fournie au CNT ainsi que leur participation au mécanisme financier temporaire qui a été établi en vue de faciliter les contributions financières et autres formes d'assistance en nature à la rébellion.
Le porte-parole adjoint du département d'État, M. Mark Toner, a expliqué le 15 juillet que le CNT avait besoin de ressources financières « pour exister en tant que gouvernement de facto », notamment pour pouvoir payer ses factures et assumer les coûts de fonctionnement et de sécurité.
« Nous reconnaissons [le CNT] en tant que gouvernement légitime de la Libye. À ce titre, nous allons prendre des mesures pour nous assurer qu'il pourra exercer ses fonctions », a indiqué M. Toner.
Selon un haut responsable du département d'État qui a requis l'anonymat, les États-Unis lui fournissent également une aide à des fins non létales par le biais d'un mécanisme d'échange d'informations (LIEM, Libyan Information Exchange Mechanism), à Benghazi. Le LIEM coordonne l'assistance et « et permet de garantir que ce que nous fournissons correspond effectivement aux besoins du CNT », a confié ce responsable le 14 juillet.
Dans l'intervention qu'elle avait préparée en perspective de la réunion du Groupe de contact, la secrétaire d'État Clinton note que les États-Unis ont décidé de reconnaître le CNT après avoir reçu des assurances de la part de ce dernier, notamment la promesse de poursuivre des réformes démocratiques ouvertes, tant géographiquement que politiquement, après la chute du régime Kadhafi. Le CNT s'est également engagé à honorer les obligations internationales de la Libye et à débourser les fonds de manière transparente pour répondre aux besoins humanitaires et autres du peuple libyen, a dit Mme Clinton.
« Les États-Unis sont sensibles aux assurances du CNT, qui nous confortent dans notre conviction que nous avons affaire à l'interlocuteur capable de faire face à la situation présente en Libye et d'assurer l'avenir du pays », a-t-elle déclaré. La haute responsable a promis que les États-Unis aideraient le CNT « à respecter son engagement envers la souveraineté, l'indépendance, l'intégrité territoriale et l'unité nationale de la Libye » et qu'ils compteraient « sur son attachement inébranlable aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales ».
Plus Kadhafi s'accroche au pouvoir et qu'il ordonne des attaques contre son peuple, a averti Mme Clinton, plus il va se trouver isolé et plus cela lui en coûtera, parce que ses centres de commandement et ses armes sont dans le point de mire de la coalition.
« Kadhafi et son entourage connaissent nos exigences. Les termes du cessez-le-feu sont clairs. Kadhafi doit mettre fin à ses attaques et à ses menaces d'attaques, retirer ses forces de tous les lieux où elles sont entrées de force et faciliter l'acheminement de l'assistance humanitaire », a martelé Mme Clinton. »