La réédition de quatre albums des Ambassadeurs internationaux, sortis dans les années 1970 et 1980 et aujourd’hui réunis dans deux livraisons de la maison Universal, évoque les fertiles transhumances des artistes et des styles qui ont popularisé l’héritage musical de l’ancien Empire mandingue au-delà de ses frontières historiques.
Celles-ci intégraient le Mali, une partie de la Guinée et le nord-ouest du Burkina Faso, mais aussi le nord de la Côte d’Ivoire et l’est du Sénégal. Pas étonnant, alors, que Les Ambassadeurs du motel voient le jour en 1969 à Bamako, nés de la rencontre de deux formations installées à… Bouaké, ville située dans la région septentrionale du pays des cacaoyers, la Côte d’Ivoire. Et qu’on retrouve dans ses rangs, avec le saxophoniste malien « Vieux » Sissoko et le trompettiste guinéen « Tagus » Traoré, le chanteur sénégalais Ousmane Dia, ancienne vedette du Star Band de Dakar, formation-mère de toutes les musiques au « pays de nos pirogues ». Ses rejetons furent notamment l’Orchestra Baobab, Number One ou l’Étoile de Dakar, de Youssou N’Dour.
Baroudeur impénitent des nuits ouest-africaines, le chanteur malien Moussa Doumbia est également parmi les attractions des Ambassadeurs, ainsi appelés à cause de leurs rangs cosmopolites. Sous la direction du guitariste guinéen Manfila Kanté, le groupe brasse avec aisance son montuno cubain et R’n’B à la James Brown, jazz, musette et mélopée mandingue. Moussa rivalise aux vocals avec un Salif Keïta (photo) à l’aube de sa gloire, les cordes tissent des arabesques nostalgiques et dévoilent un autre surdoué du doigté, Ousmane Kouyaté, dont les duos trépidants avec son compatriote Manfila Kanté envoient le public aux étoiles. Sans oublier la verve latine de l’organiste Idrissa Soumaoro, légende, lui aussi, de la musique sahélienne, et dont la longévité artistique se confirme avec la parution récente d’un magnifique Djitoumou (Lusafrica/Syllart Productions).
En août 1978, le climat politique se dégrade au Mali, la formation quitte Bamako pour Abidjan, devient Ambassadeur international et enregistre, en 1979 et 1980, les deux albums du premier volume intitulé Mandjou/Seydou Bathily. Le deuxième, Tounkan/sMana Mani, présente deux lasers, réalisés en début 1981 aux États-Unis grâce à la contribution d’un mécène ivoirien. Vingt-deux chansons en tout, dont les mythiques « Mandjou » et « Primpin », et une nouvelle épopée mandingue qui, trente ans après son commencement, est loin d’avoir dit son dernier mot.