Les hélicoptères de l’Otan tuent 26 soldats pakistanais
Rien ne va plus entre le Pakistan et ses alliés de l’Otan. Après la grave bavure qui a coûté la vie à 26 soldats pakistanais retranché à Baizai, dans le district tribal de Khyber, voie d’accès principale des camions alimentant notamment en carburant la force internationale en Afghanistan (Isaf).
.Islamabad a immédiatement réagi après ce massacre en bloquant l’approvisionnement de l’Otan en Afghanistan transitant par son territoire.
« Nous avons arrêté l’approvisionnement de l’Otan sur ordre du gouvernement fédéral d’Islamabad », a déclaré Mutahir Hussain, un haut responsable de la région tribale du nord du Pakistan où se situe la passe de Khyber.
Un peu plus tard, le gouvernement pakistanais a annoncé qu'il allait reconsidérer tous ses accords avec Washington et l'Otan, notamment dans les domaines diplomatique et militaire, à la suite de la pire bavure des Occidentaux au Pakistan en dix ans, qui a provoqué la mort de 26 militaires.
Les ministres et les chefs les plus importants de l'armée ont participé à la réunion du Comité de défense du gouvernement (DCC), sous la présidence du Premier ministre Yousuf Raza Gilani. "Le DCC a décidé de fermer, avec effet immédiat, les voies d'approvisionnement logistique de l'Otan/Isaf (la force de l'Otan en Afghanistan, ndlr)". La grande majorité de ces approvisionnements arrive par bateau au Pakistan à Karachi (sud), principal port du pays, avant d'être acheminé en Afghanistan par la route.
Quinze jours pour quitter la base de Shamsi
« Le DCC a aussi décidé de demander aux Etats-Unis de quitter dans les quinze jours la base aérienne de Shamsi », qui serait utilisée par la CIA dans le cadre de ses raids de drones dans les zones tribales frontalières de l'Afghanistan.?De plus, "le DCC a décidé que le gouvernement allait complètement reconsidérer tous ses programmes, activités et accords de coopération avec les Etats-Unis, l'Otan et l'Isaf, y compris diplomatiques, politiques et militaires", a annoncé le bureau de Yousuf Raza Gilani.?Le Pakistan accuse l'Alliance atlantique d'avoir tué jusqu'à 26 militaires dans l'attaque de ce samedi 26 novembre, avant l'aube, à l'intérieur d'une des zones tribales, principale base arrière des rebelles talibans et d'Al-Qaïda, qui attaquent régulièrement l'Otan sur le sol afghan.
Des "martyrs"?Selon Islamabad, des hélicoptères de l'Otan ont bombardé un poste militaire pakistanais à Baizai, dans le district tribal de Khyber. "Ils ont tué 26 soldats et en ont blessé quatorze autres", a déclaré Masood Kausar, gouverneur de Khyber Pakhtunkhwa, province du Nord-Ouest du Pakistan, avant de rendre hommage à ces "martyrs".?Dans la soirée, le général allemand Carsten Jacobson, porte-parole de l'Isaf, a expliqué que des forces afghanes et de l'Alliance atlantique qui opéraient dans la province afghane de Kunar avaient réclamé un soutien aérien et qu'il était "très probable que ce soutien aérien (…) ait causé les pertes". L'officier a assuré que les troupes au sol se trouvaient alors à proximité de la frontière pakistanaise.
"Une grave infraction à la souveraineté du Pakistan"?
Dénonçant "une grave infraction à la souveraineté du Pakistan et une violation des lois internationales", le Premier ministre a protesté "dans les termes les plus vifs" auprès de l'Otan et des Etats-Unis, qui dirigent l'Isaf et lui fournissent les deux-tiers de ses troupes.?Les relations déjà houleuses entre les deux pays s'étaient envenimées après l'opération unilatérale américaine au cours de laquelle avait été tué le chef d'Al-Qaïda, Oussama Ben Laden, en mai, à Abbottabad, une ville de garnison du nord du Pakistan.
Cette bavure pourrait tendre davantage encore les relations entre les Etats-Unis et le Pakistan, allié américain dans la région. Elle intervient au lendemain d’une rencontre entre le général américain John Allen et le chef d’état-major pakistanais Ashfaq Pervez Kayani au sujet du contrôle des frontières et d’une amélioration de leur coopération. Les relations américano-pakistanaises avaient en effet été mises à mal par la mort, en mai dernier, d’Oussama Ben Laden dans un raid mené par les forces spéciales américaines au Pakistan sans que les autorités d’Islamabad n’en aient été informées au préalable. La multiplication récente des attaques de drones américains dans la zone frontalière a également irrité Islamabad, qui estime qu’ils tuent plus de civils pakistanais que d’islamistes.