L’entrée à Bahreïn de forces saoudiennes et émiraties, ainsi que d’autres éléments armés issus des pays du Conseil de coopération du Golfe, a hautement irrité l’Iran voisin, lequel n’a pas manqué de condamner publiquement cette opération. Mais la réaction iranienne ne s’est pas limitée à une simple sanction verbale. Vendredi 18 mars, des éléments des services secrets iraniens, déguisés en manifestants, ont attaqué le consulat saoudien dans la ville de Mashad.
Rebelote dimanche 20 mars, où plusieurs dizaines de manifestants se sont rassemblés devant le bureau des Nations unies à Téhéran pour dénoncer la répression à Bahreïn, mais également au Yémen et en Libye. « Les Saoudiens commettent des crimes, les Etats-Unis les soutiennent », ont encore scandé les manifestants.
Dernière expression de la colère iranienne contre l’Arabie Saoudite : la rébellion houthiste yéménite, d’obédience chiite, qui avaient conclu un cessez-le-feu avec le pouvoir central de Sanaa, et qui est armée par l’Iran, a rompu cette trêve ce dimanche 20 mars. Les rebelles houthistes ont pris le contrôle d’une installation militaire, dans la région d’al-Jawf, proche de la frontière avec l’Arabie Saoudite, lors de combats contre des soldats pro-gouvernementaux.
Ces heurts ont fait au moins vingt morts, ont indiqué lundi 21 mars des sources militaires et tribales. Ils ont opposé des combattants de la rébellion houthie active dans cette région et des soldats et des éléments des tribus soutenant le président Ali Abdallah Saleh.
Cette rébellion, qui dure depuis 2004, a fait des milliers morts et plus de 250 000 déplacés. Elle inquiète l’Arabie Saoudite par sa proximité. En août 2009, les troupes saoudiennes étaient intervenues pour soutenir l’armée de Sanaa. Un cessez-le-feu est intervenu en février 2010, mais des combats ont de nouveau éclaté en juillet près du fief des rebelles dans la province d’Amrane. Cette trêve a mis fin à la "Sixième guerre" entre les rebelles, qui dénoncent une marginalisation politique, sociale et religieuse, et l’armée.
En poussant ses protégés à rallumer le front à la frontière saoudienne, l’Iran compte ainsi lui faire payer le prix de son invasion de Bahreïn pour y soutenir la dynastie sunnite, qui règne dans ce mini royaume jadis revendiqué par le Shah, puis par le régime des mollahs. La position de Bahreïn est particulièrement stratégique, car il abrite également le quartier général de la cinquième force américaine chargée notamment de surveiller l’Iran. Téhéran a également les moyens de riposter à l’initiative saoudienne en fomentant des troubles dans la province orientale saoudienne, riche en pétrole et majoritairement peuplée de chiites. Le régime iranien, qui est devenu grâce à l’occupation américaine de l’Irak, un acteur majeur dans la région, pourrait également être tenté de déstabiliser les autres émirats du Golfe, dont le Koweït, le Qatar et les Emirats arabes unis. Sans oublier le Liban où il dispose, à travers le Hezbollah, d’un allié de poids.