Avec 94 000 places, le plus grand stade du continent, le stade de Johannesburg accueillera le match d’ouverture, six matches et la finale.
Il aura coûté 3,4 milliards de rands (340 millions d’euros) aux contribuables. En 2006, la Fifa signait avec le Comité local d’organisation (Loc), où siègent des représentants de la ville de Johannesburg, un contrat de « location » correspondant à 10 % du bénéfice net de la vente des tickets. Mais, selon une enquête du journaliste sud-africain Rob Rose, la ville de Johannesburg a cédé tous les paiements provenant de la Fifa à une société créée en 2009, la National Stadium SA (NSSA), à laquelle elle a confié la gestion de Soccer City pour une période de dix ans après la Coupe. Ce droit, la NSSA l’a acquis à la suite d’un appel d’offres qu’elle a gagné grâce au critère déterminant de société favorisant le black economic empowerment (le pouvoir économique des Noirs).
Or, il est apparu que l’actionnaire majoritaire (50 % des actions) de NSSA, joint-venture de la Global Event Management (Gem) et Intelligent Venue Solutions SA (IVS) – Gem étant contrôlée à 74 % par Diligence Group –, avait peu avant le dépôt de dossier d’appel d’offres cédé 26 % des parts à un certain Gladwin Khangale, un employé noir (vigile) de la société Gem depuis 2001. Aujourd’hui nommé comme l’un des directeurs, l’homme de paille caution BEE de Gem n’a aucune responsabilité dans l’entreprise et végète dans un township.
L’adjudication s’est faite dans la plus totale opacité, malgré les demandes réitérées de transparence des élus de l’opposition et des organisations citoyennes. Le contrat intitulé « Accord pour la gestion du stade », reposant sur un partage des « bénéfices », comprend deux parties. Une « période exclusive » pendant laquelle la Fifa contrôlera la gestion du stade, et l’après-Coupe. Ce volet prévoit une échelle mobile fondée sur les profits réellement générés. Si, par exemple, Soccer City enregistre moins de 10 millions de rands en bénéfices nets, la ville recevra 18 %, 5 % iront à la participation salariale, et 5 % seront affectés à l’entretien du stade. Les 72 % restants seront servis aux actionnaires de NSSA.
Reste la question des bénéfices/tickets versés à la ville par la Fifa. Le contrat prévoit : « Ils seront déposés sur un compte provisionnel ouvert par la NSSA dans une banque et géré par la ville et la société » et seront utilisés pour honorer tous les frais engagés dans la préparation de la Coupe, c’est-à-dire « les salaires, les artisans et les constructeurs, les coûts de maintenance, les ressources humaines, les dépenses de la NSSA », soit un montant estimé à 30 millions de rands. Ils seront également utilisés pour « toutes les dépenses à venir, après la Coupe du monde ». Et si celles-ci dépassent les bénéfices, la ville y pourvoira… Soit, également, les habitants de Johannesburg, riches ou pauvres qui attendent encore l’eau courante, l’électricité, des structures sanitaires, etc.
Le coût de la construction de Soccer City a explosé au fil des mois (plus de 3 milliards de rands), le contrat passé avec les constructeurs ne les engageant pas, entre autres, à livrer un produit fini. On peut donc en conclure que la ville, n’ayant pas les moyens financiers de terminer le stade, a été obligée d’accepter les conditions de l’entreprise privée NSSA et de priver les citoyens des retombées financières de la Coupe du monde dont ils espéraient, légitimement, qu’elles contribueraient au développement et à la réduction des inégalités.