Le négociateur américain, qui avait obtenu d’excellents résultats dans le dossier irlandais, n’a rien pu faire dans celui d’Israël – Palestine.
Le très discret émissaire américain pour le Proche-Orient, à qui l’on prêtait, lors de sa nomination au lendemain de l’élection de Barack Obama, des talents de négociateur inégalés, vient de s’avouer vaincu. Contrairement à la question irlandaise, où il avait réussi à faire bouger les lignes, cette fois-ci il n’a rien pu démontrer que son impuissance. En démissionnant, après plus de deux ans de navettes infructueuses entre Israéliens et Palestiniens, il vient d’infliger un cinglant désaveu de la politique américaine dans cette région.
Le président Barack Obama a rendu hommage dans un communiqué au "promoteur infatigable de la paix", rappelant que l'ancien sénateur s'était engagé pour deux ans quand il a accepté la mission en janvier 2009, à l'âge de 75 ans.
Il a également annoncé que l'émissaire adjoint David Hale assurerait l'intérim.
La nomination de M. Mitchell, au lendemain de l'investiture de Barack Obama, avait été un signe de l'importance accordée par la nouvelle administration à la paix entre Israël et les Palestiniens. Mais très vite cette administration a montré son incohérence et sa faiblesse vis-à-vis de l’intransigeance israélienne. Après avoir posé le gel de la colonisation dans les territoires palestiniens occupés comme préalable à la reprise des négociations de paix, Obama a vite fait machine arrière. Depuis, aucune avancée significative n’a pu être obtenue par Mitchell en vue de relancer un processus de paix moribond. Le renversement de Moubarak en Egypte et la spectaculaire réconciliation inter-palestinienne ont amené les Etats-Unis à changer d’approche. Sans aucune garantie de succès. Et sans convaincre. Depuis que Washington avait opposé son veto, en février dernier, à une résolution du Conseil de sécurité de l’Onu, condamnant la colonisation, et voté par les 14 membres dudit Conseil, le Président Obama avait perdu toute crédibilité dans ce domaine. Ce veto a désespéré Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne et l’a finalement conduit à se rapprocher du Hamas. Ce veto avait également exaspéré le très discret George Mitchell qui ne sentait plus soutenu par les Etats-Unis. La voie de la démission était donc toute tracée.
Le plus surprenant est que cette démission intervient quelques jours avant que Barack Obama ne clarifie sa nouvelle stratégie dans un discours (encore un), adressé le 19 mai au monde arabe.
Le 20 mai, au lendemain de son discours, M. Obama recevra le premier ministre israélien Benjamin Netanyahou, à qui des médias ont prêté l'intention de proposer son propre plan de paix.
Les Palestiniens, de leur côté, recherchent désormais activement la reconnaissance de leur Etat par l'assemblée générale de l'ONU. Tant les Etats-Unis qu'Israël redoutent cette initiative "unilatérale".
Le New York Times a affirmé en avril que la Maison Blanche comptait proposer un Etat palestinien dans les frontières de 1967, et que Jérusalem devienne la capitale commune à Israël et au futur Etat de Palestine. De même source, Washington écarterait l'option d'un "droit au retour" des réfugiés palestiniens.
Aucun élément plus récent n'a filtré quant aux intentions du président Obama. Mais nombre d'observateurs, aux Etats-Unis, pressent la Maison Blanche de soumettre ses propres idées pour la paix.
"La démission du sénateur Mitchell souligne la nécessité, pour le président, de prendre en charge personnellement la politique américaine de paix au Proche-Orient", a encore commenté vendredi Ori Nir, le porte-parole d'Americans for Peace Now, une organisation juive américaine qui milite pour la solution à deux Etats.
Les émissaires, a-t-il ajouté, "ne peuvent se substituer à un engagement présidentiel personnel, qui est la seule façon d'obtenir une avancée vers la paix entre Israéliens et Palestiniens."