En matière de traitement des affections héréditaires comme de la recherche fondamentale sur les maladies génétiques, Habiba Bouhamed Chaabouni est incontournable en Tunisie, tant son dévouement à cette spécialité se confond avec le développement de la discipline dans le pays.
Après un doctorat en médecine obtenu en 1977, la jeune médecin est confrontée, lors d’un stage dans un établissement hospitalier, aux souffrances des familles dont les enfants sont affectés par les maladies héréditaires, d’autant plus que le pays ne dispose pas encore de structures adéquates pour prendre convenablement en charge ces pathologies. Le choix est vite fait : se spécialiser dans le traitement de ces affections, sur le plan clinique comme sur le plan de la recherche fondamentale. Sous son action, le premier service de génétique médicale tunisienne voit le jour en 1993 et assure des consultations des malades grâce à un laboratoire de cytogénétique et un autre de biologie moléculaire.
Chef de service des maladies congénitales héréditaires à l’hôpital Charles Nicolle de Tunis, la généticienne dirige avec brio le laboratoire de génétique humaine de la faculté de médecine de Tunis, et ses compétences ont depuis longtemps franchi les frontières de son pays. En 2006, Habiba Bouhamed Chaabouni est ainsi lauréate du prix Unesco-L’Oréal de la recherche. Distinguée du prix Lazio tra Europa e Mediterraneo pour la recherche scientifique, et proposée au prix Nobel, elle est aujourd’hui le symbole de la réussite de la femme tunisienne chercheuse. Le secret de cette réussite ? « Elle est liée, avant tout, au fait que j’aime ce que je fais et que je crois profondément à l’importance de la recherche, tout en pratiquant la médecine».
Son souhait : qu’il y ait davantage de femmes chercheuses tunisiennes à des postes de décision, et qu’un plus grand nombre de jeunes chercheuses ait l’occasion de s’exprimer en cette année internationale de la jeunesse.
En attendant, Mme Chaabouni anime avec la même passion qu’il y a trente ans, une équipe composée de jeunes dont sa propre fille, qui à l’âge de quatre ans déjà aidait maman, rentrée à la maison avec un paquet de travaux, à découper les chromosomes sur caryotypes. Les gènes de la généticienne n’ont toutefois pas eu les mêmes effets chez ses deux autres progénitures : le fils est ingénieur de son, tandis que l’autre fille est docteur en droit et avocate. Inutile donc de poser à Mme Chaabouni la question qui revient à chaque fois en face d’une réussite professionnelle comme la sienne : est-il possible pour une femme de concilier emploi et vie familiale ? La réponse, dans le cas d’espèce, se passe d’analyses de laboratoire.