Filiale du groupe BPCE, la Banque Palatine fait partie des nombreuses entreprises françaises qui croient en un avenir prospère au Maroc. Entretien exclusif avec Bernadette de Reynal, directrice de l’International au sein de cette institution.
La Banque Palatine est une institution historique dans le paysage bancaire français. Ce qui est remarquable à notre époque, c’est qu’elle a su, semble-t-il, rester à taille humaine. Pourquoi ce choix ?
Bernadette de Reynal : La Banque Palatine est effectivement une banque historique qui est née avant la Révolution française, en 1780. Elle a eu plusieurs appellations. À l’origine, c’était la banque Vernes, rachetée en 1989 par la banque italienne San Paolo puis par les Caisses d’épargne en 2003.
Au jour d’aujourd’hui, la Banque Palatine est la filiale à 100 % du groupe Banque populaire Caisse d’épargne (BPCE) dédiée aux PME et à la gestion patrimoniale. C’est la banque des entreprises et des entrepreneurs. Nos cœurs de cible sont les Eti (Entreprises de taille intermédiaire). Il est intéressant de noter que, dans le paysage bancaire français, il n’y a pas, en dehors de nous, de banque dédiée à ce segment sur lequel nous nous positionnons fortement. Nous avons un réseau d’une cinquantaine d’agences sur tout le territoire métropolitain.
Vous avez accompagné au mois de mars une délégation d’entreprises françaises au Maroc. Pourquoi avoir choisi ce pays alors qu’une partie du monde arabe est en pleine ébullition ?
Cette mission au Maroc était programmée avant les premiers troubles de décembre. Nous n’avons pas eu d’état d’âme à la maintenir sur le Maroc. La Banque Palatine a une réelle expertise dans l’accompagnement de clients sur le Maroc. C’est un pays que nous connaissons bien, que nous aimons et où nous travaillons depuis de nombreuses années. La situation actuelle dans le monde arabe ne nous a aucunement perturbé. Ceci du fait de notre connaissance historique du Royaume chérifien et de la spécificité de ce pays.
Comment s’est déroulée votre mission?
La Banque Palatine est une banque domestique qui n’a pas de présence par le biais de filiales ou de succursales à l’étranger. En revanche, nous accompagnons nos clients, hommes et femmes d’affaires, partout dans le monde. Ceci est notre vocation de banquier. Nous avons noué des partenariats solides avec les grandes banques des principaux pays où sont actifs nos clients. Ceci est le cas du Maroc notamment avec la Banque populaire du Maroc qui est la première banque des PME. D’où cette idée de croiser nos fichiers clients et de les faire se rencontrer dans une perspective business to business(B2B). Nous avons souhaité aller au-delà des simples relations opérationnelles (transferts, rapatriements, crédits documentaires, etc.) en apportant une valeur ajoutée à nos clients, comme les Eti, en croisant nos fichiers avec ceux de la Banque populaire du Maroc pour initier des rencontres de travail entre clients. Cette mission a été également préparée avec les autorités marocaines et l’ambassadeur du Maroc à Paris, M. Sahel, avec lequel nous continuerons de travailler puisqu’il a le souhait de faire se rencontrer les PME de nos deux pays. Lors des rencontres B2B, l’Agence marocaine de développement industriel (Amdi), qui a de grandes ambitions en matière d’accompagnement et d’appui aux investissements, nous a offert une prestation remarquable, très appréciée, qui a conforté nos clients.
Vous avez parlé du Maroc comme d’un marché en plein développement. Dans quels secteurs ?
Le Maroc est effectivement un pays en plein développement sur presque tous les secteurs. Il présente une économie très dynamique, très organisée, avec des plans de développement aussi bien pour les infrastructures routières, autoroutières, comme portuaires avec Tanger Med (futur premier port de la Méditerranée), des plans de développement sur les énergies nouvelles, également en direction de la famille et des relations humaines, surtout dans un contexte un peu « chahuté ».
Pays en plein développement, le Maroc peut se targuer d’une croissance forte et régulière sur ces dix dernières années. Elle oscille entre 4 et 6% selon les années, le niveau de pluviométrie rythmant l’activité économique de ce pays. Donc un Maroc en croissance régulière et, important, un Maroc stable.
Nos clients – une vingtaine de délégations pilotées par notre président du directoire en personne, Daniel Cariotti ainsi que Thierry Saragossa, membre du directoire en charge des finances, et moi-même directeur international – étaient des dirigeants d’entreprises et des directeurs export, dont quatre femmes. Les secteurs ciblés avaient trois objectifs : recherche de partenaires pour des investissements directs, recherche de fournisseurs ou recherche de nouveaux débouchés. Les principaux secteurs représentés étaient l’énergie, l’électricité, la plasturgie (très demandée), l’industrie agro-alimentaire, les huiles essentielles (cosmétique), les produits industriels, la sidérurgie et les arts de la table. De très belles entreprises et Eti dont le chiffre d’affaire allait de 15 à 500 millions d’euros. Cent pour cent de nos clients nous ont indiqué avoir des pistes très sérieuses et, sur 112 rendez-vous prévus, 108 ont été tenus, signe du succès de cette rencontre. Je tiens à préciser que cette démarche s’inscrit dans la durée. Ce n’est pas un « one shot » !
Parmi les réformes initiées par le roi Mohammed VI, la création d’« emplois productifs pour la jeunesse » est une priorité absolue. Votre banque peut-elle y contribuer et de quelle façon ?
Le hasard du calendrier a voulu que nous soyons arrivés le jour du discours du Roi à la Nation. Nous avons eu le sentiment de vivre un moment historique avec les Marocains. Ceci a été une grande chance pour comprendre de l’intérieur un certain nombre d’attentes et de début de réponses à ces attentes. Ce qui nous a été dit localement c’est que le Roi, pendant les manifestations, a souhaité être très à l’écoute des espoirs de la jeunesse. Effectivement, la jeunesse a de très fortes aspirations en termes de travail et de démocratie. Il semble que ces éléments soient écoutés et, dans l’avenir, entendus. À notre modeste niveau, avec nos chefs d’entreprise qui recherchent des partenariats pour investir localement, il est d’évidence qu’il y aura une suite en termes de créations d’emplois. Je pense par exemple à cette perspective de construction par l’un de nos clients de deux briqueteries pour un montant de cinq à dix millions l’unité!
Le terme en vogue d’« exception marocaine » vous paraît-il également approprié au secteur économique ?
Il y a une vraie exception marocaine liée à l’histoire spécifique de ce pays, liée à la structure de la monarchie, de son souhait d’évolution, ce qui a un impact évident sur le climat des affaires. Ce climat, nos clients l’ont jugé porteur et, en ce sens, on peut parler aussi d’une exception marocaine au niveau économique.