Peu avant le vote de la résolution par le Conseil de sécurité, Seif al-Islam a tenté un baroud d’honneur par voie diplomatique.
Les troupes régulières ont stoppé net leur offensive devant Benghazi, qu'ils se préparaient à prendre d'assaut dans la nuit de jeudi à vendredi 18 mars, par l'autorisation accordée par le Conseil de sécurité d'utiliser la force pour protéger les civils libyens.
Kadhafi, dans une dernière tentative désespérée d'empêcher le vote d'une telle résolutiuon, avait quelques heures avant le scrutin prévenu les habitants de Benghazi que ses troupes entreraient "dans la nuit" dans la ville "pour mettre fin à la comédie" de l'insurrection et pourchasser "maison par maison, les terroristes".
Il a promis la "grâce à tous ceux qui jetteraient leurs armes dans la rue et regagneraient leur domicile". En revanche il a voué les "terroristes et leurs complies" à une "impitoyable" repression.
Son fils aîné Seif El Islam, qui conduit une campagne d'action psychologique pointue et de grande envergure en direction des pays occidentaux, leur avait même demandé un peu plus tôt de renoncer à cette mesure. "Il est trop tard, dans 48 heures tout sera fini".
Les dirigeants libyens ont été désarçonnés par la décision des Nations unies, accueillie en revanche dans une explosion de joie par la population de Benghazi, qui se préparait au pire.
Dans un premier temps, le vice-ministre des Affaires étrangères El Kaaïm, s'exprimant en arabe à l'intention de Libyens, avait rejeté la résolution de l'ONU comme "ne valant même pas le papier sur lequel elle a étré couchée" et minimisant son impact sur l'offensive des troupes régulières.
Quelques minutes plus tard, s'exprimant en anglais, cette fois, il adoptait un ton beaucoup plus conciliant devant la presse étrangère, affirmant la "disponibilité de la Libye à coopérer avec l'ONU pour la protection des civils" et réclamant la venue d'une "commission d'enquête internationale pour établir la vérité" sur l'insurrection et la répression. Il annonçait en outre, en catamini, dans une tournure de phrase, que l'offensive sur Benghazi n'aurait pas lieu dans la nuit comme annoncé par Kadhafi.
Ce double langage du diplomate – alors que Kadhafi est resté silencieux – reflète le désarroi officiel des dirigeants libyens barricadés dans la caserne Al Azizia à Tripoli.
"Les frappes auront lieu rapidement", a annoncé François Barouin, porte parole du gouvernement français, au matin du 18 mars.
Le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, avait pour sa part indiqué immédiatement après le vote que les "plans militaires" d'intervention étaient prêts.
Le Canada a déjà annoncé l'envoi de six avions F-18 pour participer à l'action militaire envisagée, qui exclut, selon la résolution onusienne, tout engagement terrestre des troupes étrangères sur le sol libyen.
La France, la Grande Bretagne et les Etats-Unis y participeront aussi, tandis que l'Italie a annoncé qu'elle lui ouvrait ses bases aériennes. Du côté arabe, le Qatar et les Emirats arabes – selon des modalités qui ne sont pas encore connues – seront eux aussi sur le pont, mais l'Egypte s'est récusée.
Dans un premier temps, selon les premières indiscrétions obtenues par la presse, des frappes "ciblées" seraient portées aux blindés et aux unités de missiles "grad" pour desserrer l'étau autour de Benghazi et soulager la population. Les aéroports, les batteries anti-aériennes, les systèmes de détection par radars font partie aussi des cibles visées par la résolution. Il n'est pas exclu enfin que des attaques aériennes soient portées contre le bunker d'Al Azizia, d'où Kadhafi tire les ficelles de l'offensive contre les insurgés.
Seif El Islam a pris les devants en défiant la communauté internationale : "nous n'avons pas peur", a-t-il dit dans sa première réaction à la presse.
Que vont faire Kadhafi et son entourage ? De leur réaction dépendra la tournure des événements. S'il est lâché par son entourage et qu'il quitté le pouvoir, c'est le retour à la paix, sinon ce serait la guerre. Elle risque d'être longue et meurtrière dans un pays désertique où les combattants sont à découvert et les villes à portée de canons, sans défense.