Les Occidentaux reconnaissent, par la voix du ministre français des Affaires étrangères, n’avoir pas les moyens militaires d’empêcher le colonel Kadhafi de reprendre Benghazi
Ajdabyia, dernier verrou avant Benghazi, foyer de l’insurrection libyenne, s’est réveillée en ce matin du 15 mars sous une pluie de bombes, déversée par l’armée régulière du colonel Kadhafi sur la ville.
Selon les correspondants de presse sur place, pas moins de quatre passages ont été effectués par les avions de l’armée de l’air libyenne sur la ville, qui s’attend au pire. Plusieurs voitures de civils fuyant la zone ont été atteintes par les bombes.
Les insurgés repliés de Ras Lanouf, reprise hier 15 mars par les troupes de Kadhafi, ont affirmé leur détermination à défendre Ajdabyia « coûte que coûte », mais la puissance de feu déployée par les troupes régulières rend leur tâche très difficile.
La ville pourrait tomber d’un moment à l’autre, ouvrant la voie à la reconquête de Benghazi, dont la population vit désormais dans la crainte de représailles.
Au cours de la nuit écoulée, du 14 au 15 mars, Zouara, à la frontière tunisienne, a été de son côté soumise à un déluge d’obus qui a fait plusieurs dizaines de victimes, a indiqué un résident à la chaîne de télévision Al Jazeera.
Les habitants de la ville avaient refusé auparavant de baisser le pavillon de l’insurrection : le drapeau vert, noir, rouge frappé de l’étoile et du croissant blanc, et de hisser celui du régime, le drapeau vert.
Kadhafi est entré dans une course de vitesse contre le Conseil de sécurité des Nations unies, qui a ouvert ses discussions sur l’éventuel établissement d’une zone d’exclusion aérienne au dessus de la Libye. Si celle-ci est établie, elle pourrait soulager les insurgés et leur donner probablement un second souffle. Mais les divergences entre les membres sont suffisamment importantes pour qu'aucune décision ne soit prise dans l'immédiat. La Chine – sans s'être prononcée formellement à ce sujet – pourrait jouer de son droit de veto pour contrer toute proposition en ce sens. La Russie a demandé des "explications supplémentaires" sur l'ampleur et les modalités de la mesure. Les Etats-Unis, malgré une vague de critique contre le président Barak Obama, continuent à hésiter. Seules la France et la Grande Bretagne sont en première ligne et partisanes de l'établissement de cette zone d'exclusion.
Le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, a pourtant reconnu mardi 15 mars n'avoir "pas convaincu" ses partenaires du G-8 d’instituer une telle zone, après un dîner de travail lundi 14 au soir avec ses homologues des Etats-Unis, de Russie, d’Allemagne, de Grande-Bretagne, d’Italie, du Canada et du Japon.
Interrogé par Europe 1, il a même ajouté que les Occidentaux « n’ont pas aujourd’hui les moyens militaires » d’empêcher Kadhafi de reprendre Benghazi.