Même les pays favorables à la mise en place d’une zone d’exclusion aérienne en Libye ne savent ni qui peut le faire, ni quand ce sera possible.
Les ministres des Affaires étrangères arabes ont entamé samedi 12 mars une réunion délicate au Caire, en l’absence de la Libye suspendue de toute participation aux activités de l’organisation depuis le début de l’insurrection, afin de fixer leur position au sujet de l'éventuelle création d’une zone d’exclusion aérienne au-dessus de la Libye.
Deux pays ont déclaré leur opposition à toute intervention étrangère en Libye : l’Algérie et la Syrie, l’Egypte, qui compte le plus grand nombre d’migrés arabes en Libye, hésite, le Soudan est réticent. Le Conseil de Coopération du Golfe (CCG) a pour sa part annoncé la couleur depuis quelques jours en déclarant que « le régime de Kadhafi a perdu toute légitimité ».
Amr Moussa, secrétaire général de la Ligue arabe et probable candidat à la présidence égyptienne, a préempté pratiquement les résultats de la réunion, en déclarant à un journal allemand qu’il était en faveur de l’établissement d’une zone d’exclusion aérienne, soulignant toutefois qu’il ne sait pas « qui va le faire et comment on va le faire ».
Les Arabes n’ont pas les moyens militaires d’imposer une telle zone. Les Européens réticents, attendent un éventuel mandat du Conseil de sécurité pour l’envisager. Les Etats-Unis restent dubitatifs.
Une décision de la Ligue arabe en faveur de cette mesure pourrait cependant faire bouger les lignes, alors que le Conseil national de transition, qui chapeaute l’insurrection, multiplie ses appels à la fois en faveur de cette zone et pour être reconnu sur le plan international.
Sur le terrain, la bataille fait toujours rage autour de Ras Lanouf, port pétrolier stratégique à mi-chemin entre Tripoli, où se trouve Mouammar Kadhafi barricadé avec sa famille et ses proches, et Benghazi, bastion de l’insurrection. Les affrontements ont pris l’allure d’une « guerre de mouvement » : la ville prise par les rebelles a été reconquise par les forces régulières, à la suite d’un sévère pilonnage à l’arme lourde et par voie aérienne, puis reprise, partiellement encore, par les insurgés, qui freinent ainsi l’avance à l’est de leurs adversaires.
Selon un expert militaire arabe interrogé par al Jazeera, la bataille ne tournera pas à l’avantage des troupes régulières, parce que ces dernières, très éloignées de leurs bases arrières, sont en train d’épuiser leurs munitions et seront contraintes d’attendre du renfort avant de se lancer à nouveau à l’assaut de la ville pétrolière. Les insurgés affirment qu'elles ont subi de lourdes pertes au cours de leurs opérations d’aller-retour vers la ville.
Pour leur part, les insurgés, ainsi fixés dans la région de Ras Lanouf, n’ont pas réussi à avancer vers Syrte, ville natale de Kadhafi, leur objectif symbolique initial. Ils occupent néanmoins Misrata et plusieurs villes du Jabal el Gharbi pour l’instant épargnées par les bombardements.
Des informations contradictoires circulent sur Zaouiya – dernier verrou avant Tripoli, à l’ouest – où les insurgés se seraient de nouveau installés après l'abandon du centre-ville par les troupes régulières. Les pro-Kadhafi ont annulé une visite qu’ils devaient y effectuer en compagnie de journalistes étrangers.