Le Centre Carter a publié, le 3 novembre, un rapport intitulé « Une affaire d’État : la privatisation du secteur congolais du cuivre », conclusion d’une enquête de dix années sur les pratiques contractuelles et financières de la compagnie minière de la République démocratique du Congo (RDC) Gécamines, et ses principaux partenaires privés. « En particulier, le secteur minier de la RDC a attiré des milliards de dollars dans des investissements privés, mais ces contrats ont peu profité aux revenus publics », dit le rapport dans son introduction.
L’enquête menée avec le gouvernement, la société civile et les acteurs du secteur privé, est basée sur deux-cents entretiens et sur l’examen de plus de cent contrats miniers, mille documents et des données de l’Initiative pour la Transparence de l’industrie extractive (EITI). Elle couvre une période allant de 2007 à 2014. Les conclusions du rapport sur la privatisation de facto du secteur du cuivre en RDC est sans appel : ni le peuple, ni l’État congolais n’ont bénéficié de la privatisation et la Gécamines est, plus que jamais, un État dans l’État.
En effet, Gécamines, selon le rapport, a utilisé sa position privilégiée pour générer $1,1 milliards de la production du cuivre et du cobalt entre 2011 et 2014. Deux tiers de cette somme, soit $750 millions ont simplement disparu.
L’analyse détaillé montre que « les données du registre des mines montrent que la compagnie possède encore approximativement cent permis d’exploitation, soit plus que ne le permet le Code national des mines », une situation qui lui permet de continuer à garder sa position dominante.
Cette position privilégiée a permis à Gécamines de générer des revenus substantiels provenant de ses partenaires privés et étrangers, soit une moyenne de $262 millions/an en royalties, bonus et autres, de 2009 à 2014. « Ces revenus ne sont pas dirigés vers le trésor public et ils sont largement hors du contrôle public. »
Alors que Gécamines a affirmé que ces revenus contribueraient à la modernisation de la production minière, « en pratique, ils semblent avoir été principalement utilisés pour d’autres buts. Deux tiers environ des 1,1 milliards de dollars que la compagnie a engrangés entre 2011 et 2014 ne peuvent pas être tracés clairement dans les comptes de Gécamines. Ce qui posent des questions significatives sur la destination réelle des revenus de Gécamines », dit le rapport.
Avant les élections de 2006 et celles de 2011, « des compagnies minières nationales ont accéléré leurs activités contractuelles et généré des revenus significatifs qui ont été difficiles à tracer », peut-on encore lire. Les conditions étaient favorables pour des ventes non enregistrées et un détournement des bénéfices. « Il est troublant que Gécamines ait refusé de publier les contrats de plusieurs accords miniers qui ont généré plus d’un demi milliard de dollars en 2016-2017. »
Bien que la RDC soit riche en ressources naturelles, dit le rapport, son peuple figure parmi les plus pauvre du monde. Malgré les milliards de dollars d’investissements privés dans le secteur minier, les revenus sont loin d’avoir généré des « bénéfices publics ». « La RDC a un potentiel pour vaincre l’héritage de la mauvaise gestion et de la corruption qui a contaminé son industrie minière », a écrit l’ancien président américain Jimmy Carter dans l’introduction du rapport. « J’appelle les dirigeants politiques à travailler avec le secteur privé, la société civile, la communauté internationale et autres pour garantir une gestion responsable des ressources naturelles de la RDC ».
Sources : https://www.cartercenter.org/resources/pdfs/news/peace_publications/democracy/congo-