José Bustani, premier directeur général de l’OIAC et instigateur du code de conduite et du programme d’assistance technique, celui qui a doublé durant son passage à la tête de l’organisation le nombre de signataires du traité, a reçu un flot de messages de félicitations. Le Prix Nobel, c’est aussi le sien, tout le monde en a convenu.
En 2001, José Bustani, directeur général de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), était démis de ses fonctions sans autre forme de procès, avec un délai de 24 heures. La « bonne nouvelle » lui avait été donnée par John R. Bolton, alors sous-secrétaire d’État de l’administration Bush puis ambassadeur aux Nations Unies. Raison : son style de management ne plaisait pas au président américain George W. Bush. Bustani, réélu à son poste onze mois plus tôt, refusait de partir. Il fallut une session spéciale, le 22 avril 2002 pour le mettre effectivement à la porte. Le diplomate brésilien disparu discrètement de la scène.
Aujourd’hui José Bustani est ambassadeur du Brésil en France et il parle. Sans doute l’attribution du Prix Nobel de la Paix à l’OIAC lui a-t-elle donné envie de s’expliquer plus avant. La campagne contre lui a commencé à la fin 2001, après l’annonce par l’Irak et la Libye de leur volonté d’adhérer à la Convention sur les armes chimiques (CIAC), le traité international cadre de l’OIAC. Pour en devenir signataire, les pays doivent déclarer leurs stocks et accepter leur inspection et la destruction des armes. Des inspecteurs de l’agence de l’ONU devaient venir visiter l’Irak en janvier 2002.
Les programmes qui avaient été mis en place sous la direction de José Bustani « ont provoqué un tollé à Washington », explique-t-il depuis son ambassade à Paris. Arrivent les menaces transmises par des diplomates américains et autres. Fin décembre, il comprend que les Américains vont se débarrasser de lui, « ils voulaient ma tête ! ». Et, derrière le message, il était clair que l’OIAC dirigée par Bustani était un obstacle aux projets de l’administration Bush d’invasion de l’Irak. On se souviendra des mensonges de Bush et son entourage dont les mensonges du général Colin Powell et sa capsule d’anthrax au Conseil de sécurité, le 5 février 2003, au sujet des armes de destruction massive irakiennes, comme prétexte à l’intervention de la coalition internationale en Irak. José Bustani est catégorique à ce sujet : « Tout le monde savait qu’il n’y en avait pas, une inspection aurait suffi à le démontrer. Cela aurait rendu complètement caduque la décision d’intervention », dit-il. Et il accuse les Etats-Unis d’avoir fait leur possible pour empêcher l’Irak d’adhérer au traité sur les armes chimiques « que, d’ailleurs, il ne possédait pas ! »
José Bustani, premier directeur général de l’OIAC et instigateur du code de conduite et du programme d’assistance technique, celui qui a doublé durant son passage à la tête de l’organisation le nombre de signataires du traité, a reçu un flot de messages de félicitations. Le Prix Nobel, c’est aussi le sien, tout le monde en a convenu. Et il se félicite qu’aujourd’hui, que le scénario irakien n’ait pas pu se répéter en Syrie où des inspecteurs sont sur le terrain, en mission pour préparer le programme de destruction des armes chimiques syriennes, avec la pleine coopération des autorités. « Une évolution fondamentale », estime-t-il.
(Source New York Times https://www.nytimes.com/2013/10/14/world/to-ousted-boss-arms-watchdog-was-seen-as-an-obstacle-in-iraq.html)