Samedi 14 février, les pétromonarchies réclamaient une résolution Onusienne (1) autorisant une action militaire au Yémen, contre une coalition (menée par les houthis) totalement opposée à la fédéralisation du pays et à l’ingérence quotidienne des ambassades étrangères.
Dimanche 15 février, l’ONU invitait dans une résolution les houthis à lâcher le pouvoir et à négocier sans ouvrir la route à une action guerrière. En attendant les pays du Golfe se préparent à « intervenir militairement …pour leur permettre de «maintenir (leurs) intérêts vitaux» (2). De Sanaa vidée du personnel diplomatique occidental et du Golfe, le Conseil Présidentiel Yéménite a rejeté l’appel de l’ONU et réitéré le droit des Yéménites à décider de leur sort.
La victoire houthie passe pour un élargissement de l’influence iranienne et une revitalisation du nationalisme yéménite face aux plans de division confessionnelle et tribale du pays sous étiquette fédéraliste et une défaite pour les Saoudiens en guerre contre le croissant chiite.
En Syrie la confusion politico-militaire recule. Les acteurs essentiels, Turquie, Qatar, Jordanie, France, USA, Israël, Canada, Saoudiens et Anglais apparaissent clairement maintenant que la fiction de l’Armée Syrienne Libre (ASL) s’est effondrée.
Derrière les nouvelles apparences d’une lutte contre le terrorisme de Daesh, les buts fondamentaux demeurent et ces puissances veulent toujours la tête d’Assad et l’implosion de la Syrie. Israël soigne, arme et conseille Al Nosra et Daesh pour créer une ceinture tampon avec la Syrie. Les USA ont sélectionné avec la Turquie, 1200 « opposants » et en prévoient 5000 fin 2015 pour les entraîner à mieux préciser les cibles des bombardements US. Ce programme doit durer trois ans et augure d’une guerre hémorragique pour l’armée syrienne sur le long terme(4).
Apparemment, l’hémorragie n’a pas vidé l’armée syrienne. Ses offensives-éclairs vers les frontières israéliennes et jordanienne au Sud et d’encerclement d’Alep au nord viennent de ruiner des années d’efforts d’Israël et de la Turquie de consolider des zones « rebelles » destinées à leur être rattachées d’une façon ou d’une autre.
L’armée syrienne censée être exsangue se montre capable de planifier des offensives, de mobiliser des réserves, de s’appuyer sur des forces populaires d’autodéfense. Mieux, face à la coalition des agresseurs, elle a su construire avec le Hezbollah et l’Iran (et la Russie en arrière-plan) une coalition de la résistance. Sur fond de cet échec US, l’Autriche, la Bulgarie, le Danemark, l’Espagne, la Roumanie, la Suède, la République Tchèque, la Norvège et la Suisse veulent renouer le dialogue avec Damas et rouvrir leurs ambassades (5). Nous sommes loin de l’enthousiasme des « Amis de la Syrie », à Tunis, en juillet 2012.
La Ligue Arabe qui a joué un rôle décisif en donnant la caution « d’une demande arabe » à la destruction de la Libye puis à l’agression de la Syrie vient de récidiver (6). Son secrétaire général Nabil El Araby, déclare la Ligue prête à combattre le terrorisme sans préciser si l’Irak et la Syrie sont concernés au-delà du cas libyen qui lui a servi d’amorce. Pour confirmer cette unité martiale, le Qatar a critiqué vertement l’action militaire « unilatérale » qui a visé ses créatures(7).
La Tunisie et l’Algérie refusent toute intervention et appellent à une réconciliation nationale apte à arrêter la violence. Sissi veut frapper sous couverture onusienne car le cancer terroriste libyen frappera au cœur de l’Afrique du Nord tout en offrant le prétexte d’une reconquête coloniale sous fausse bannière. L’ONU refuse une nouvelle intervention et refuse de lever l’embargo sur les armes et Daesh menace d’envoyer 500.000 migrants clandestins à l’assaut de l’Europe en cas d’intervention armée (8).
De tous ces pays frappés de « printemps » arabe, seule la Libye sombre sans retour mais les terres de vieilles civilisations Tunisie, Egypte, Syrie, Yémen, Irak, montrent une remarquable résilience de leur unité et invitent à la pratique d’autres concepts pour réfléchir et comprendre des réalités humaines incompressibles dans les raccourcis « démocratiques » du mainstream.
A.F
Notes
1-https://www.tdg.ch/monde/crise-yemen-pays-golfe-sollicitent-onu/story/31384248
2-https://journalmetro.com/monde/721447/yemen-les-pays-du-golfe-menacent-dagir/
5-https://fr.sputniknews.com/international/20150219/1014793544.html#ixzz3SEFLDOkE
8-https://www.20minutes.fr/monde/1544963-20150219-daesh-menace-envoyer-500000-migrants-europe
Source : https://www.impact24.info/?p=4930