Cependant, il semblerait que la Jordanie ne soit plus aussi enthousiaste à l’idée de servir de base d’entraînement par la CIA aux rebelles syriens.
En juin 2013, la presse américaine révélait que la CIA entraînait des rebelles syriens en Jordanie et en Turquie, depuis au moins un an. Au même moment, Barack Obama annonçait que les États-Unis étaient prêts à envoyer des armes à l’Armée syrienne libre. La Syrie ayant été accusée d’utiliser des armes chimiques, armer la « résistance » syrienne devenait une urgence pour les va-t-en-guerre américains. La presse expliquait, également, que les rebelles étaient entraînés par groupe de vingt à cinquante pendant deux semaines au maniement des armes anti-tanks et anti-missiles. L’entraînement se déroule à la frontière avec la Syrie, près de Dar’a et ses environs.
En outre, les États-Unis disposaient, alors, d’environ 5000 soldats en Jordanie dans le cadre d’un exercice militaire. Aujourd’hui, 1300 soldats américains y sont toujours stationnés ainsi que des missiles Patriot sol-air.
En juin, Barack Obama a demandé au Congrès d’octroyer $500 millions de dollars pour un nouveau programme d’entraînement des combattants anti-al-Assad, la Jordanie étant considérée comme le candidat favori de la Maison Blanche qui compte sur ses relations étroite avec Amman en terme de sécurité, sur la proximité frontalière avec la Syrie et sur la présence de plus de 600 000 réfugiés syriens – venus s’ajouter aux deux millions de Palestiniens et de 500 000 Irakiens pour une population jordanienne, elle-même hétéroclite, de 6,5 millions.
Cependant, il semblerait que la Jordanie ne soit plus aussi enthousiaste à l’idée de servir de base d’entraînement par la CIA aux rebelles syriens. Le roi Abdullah II, selon certains responsables américains dont se sont fait l’écho plusieurs médias américains on line, s’inquiéterait des réactions de son voisin syrien qui pourrait répondre par des représailles touchant le territoire jordanien. Selon d’autres sources officielles « anonymes », la Jordanie pourrait, néanmoins, se laisser convaincre, Washington disposant de moyen de pression « convaincants ».
Le 12 juillet, le roi Abdullah II rencontrait le vice président américain, Joe Biden, à Washington. Lors de la rencontre, Abdullah II a d’abord alerté Joe Biden sur les dangers de l’escalade contre la bande de Gaza et la Cisjordanie « qui accroît la souffrance du peuple palestinien et sape les efforts pour parvenir à des négociations de paix entre Palestiniens et Israéliens. » Mais, bien sûr, il a aussi et surtout été question de la situation au Moyen-Orient, en premier lieu en Syrie et en Irak. Concernant la Syrie, le roi a insisté sur l’importance de parvenir à une solution politique et a appelé la communauté internationale à répondre au plus vite à la situation humanitaire catastrophique que vivent le peuple syrien et les réfugiés, notamment par une aide aux pays hôtes, comme la Jordanie.
À quoi Biden a répondu en insistant sur « le partenariat stratégique avec la Jordanie et le maintien de la coordination sur toutes les questions régionales d’intérêts communs ». De toute évidence, les deux interlocuteurs n’étaient pas sur la même longueur d’onde, ce qui confirmerait les hésitations de la Jordanie à s’engager dans un nouvel accord avec la CIA.
La Jordanie fut le quatrième pays au monde à signer un accord de libre échange (FTA) avec les États-Unis dont les exportations en biens et services vers ce pays atteindront, selon les prévisions, 3,18 milliards en 2015, avec un fort déficit pour la Jordanie. Lors de sa visite en mars 2012, Barack Obama avait promis une aide de 200 millions de dollars pour faire face à l’afflux massif de réfugiés syriens. En outre, en contre partie de la « collaboration » de la Jordanie à la lutte anti-terroriste, Washington verse plus d’un milliard de dollars par an sous diverses formes. Une aide non négligeable alors que le déficit jordanien dépasse aujourd’hui les trois milliards d’euros, soit 10% du PIB. Soit une économie sous perfusion américaine – et pour partie des monarchies du Golfe – qui s’appuie essentiellement sur le tourisme, le business, quelques industries chimiques comme les engrais ou la pharmacie et les ressources minières en phosphate, et qui, talon d’Achille majeur, importe 96% de son énergie. Dans le domaine sécuritaire, ce sont, également les États-Unis qui équipe gracieusement l’armée jordanienne, des tanks aux avions de combat en passant par les missiles Patriot.
En cas de refus de la Jordanie, Washington pourrait se tourner vers la Turquie où la CIA est toujours active, ou vers les États du Golfe, en premier lieu l’Arabie Saoudite, ce qui pourrait poser, cependant, quelques difficultés, ces pays ne voulant ou ne pouvant accepter une présence militaire américaine directe trop importante.