Les combattants du groupe terroriste État islamique tentent de pénétrer au Tadjikistan et pourraient déstabiliser toute l’Asie centrale. Les moyens de résister à cette menace ont été débattus le 2 avril, à Douchanbé, lors d’une réunion des ministres des affaires étrangères des États-membres de l’Organisation du traité de sécurité collective (OTSC), qui regroupe la Russie, la Biélorussie, l’Arménie, le Kazakhstan, le Kirghizistan et le Tadjikistan. Kommersant a ainsi pu apprendre que la Russie s’apprête, au cours des prochaines années, à fournir au Tadjikistan un soutien militaire et technique pour un montant d’environ 70 milliards de roubles. Le
Le président tadjik Emomali Rakhmon, qui inaugurait la rencontre des ministres des affaires étrangères des États-membres de l’OTSC, a reconnu que « le terrorisme, l’extrémisme et le narcotrafic se développent extrêmement rapidement dans la zone de responsabilité de l’OTSC, exerçant une action destructrice sur la situation dans la région ». La situation en Asie centrale peut effectivement se tendre à tout moment – et le Tadjikistan occupe la position la plus vulnérable.
Douchanbé est confrontée à des menaces grandissantes, a rappelé le ministre russe des affaires étrangères Sergueï Lavrov, « venant du sud, et liées à la dégradation de la situation en Afghanistan, où, à côté des groupes extrémistes traditionnellement présents (notamment le Mouvement islamique d’Ouzbékistan, le Mouvement islamique du Turkestan et Al-Qaïda), on voit déjà apparaître l’État islamique ».
Les combattants de l’EI, qui ont conquis une série de districts syriens et irakiens et recrutent activement des partisans en Afghanistan, pénètrent déjà aussi au Tadjikistan. La frontière tadjiko-afghane, étendue (sur 1 350 km environ) et mal contrôlée, éveillait déjà des craintes dans le passé : certains territoires qui la bordent du côté afghan sont entièrement contrôlés par les talibans. Aujourd’hui, les plus radicaux des talibans rejoignent l’EI, créant une menace pour toute l’Asie centrale, et par conséquent – aussi pour la Russie.
En 2013, les membres de l’OTSC s’étaient entendus pour fournir un soutien technique aux douaniers tadjiks qui protègent la frontière avec l’Afghanistan. Cependant, le 2 avril, le ministre des affaires étrangères tadjik Sirodjiddin Aslov s’est plaint que « l’état actuel de la situation sur cette question n’est pas satisfaisant » et a affirmé la nécessité de « mesures pratiques » plus actives, soit la fourniture d’armements et de véhicules de transport spécialisés, ainsi que de l’aide pour consolider les points de contrôle douanier. Jusqu’en 2005, cette frontière était protégée par des douaniers russes, avant d’être entièrement transférée sous la compétence de Douchanbé. La Russie, selon les sources diplomatiques de Kommersant, serait prête à renvoyer ses soldats à la frontière, mais il faudrait pour cela une demande officielle des autorités tadjikes. Qui n’a pas été formulée pour l’instant.
Dans le cas d’une montée soudaine de la tension – là aussi, à condition que les autorités tadjikes en fassent la demande –, on pourrait avoir recours aux militaires de la 201e base russe (dont les garnisons sont stationnées à Douchanbé, Qurghonteppa et Kulob), ainsi qu’aux Forces collectives de réaction rapide de l’OTSC. À en croire le secrétaire général de l’OTSC Nikolaï Bordiouja, les sections du bloc n’auraient pas besoin de plus de 72 heures pour déployer l’ensemble de leurs forces dans une zone de conflit et ses alentours.
Les autorités tadjikes espèrent qu’il n’y aura pas de nécessité d’intervention militaire directe de l’extérieur, et comptent sur le fait que la Russie les aide à renforcer leur propre armée.
Moscou et Douchanbé ont signé un programme de modernisation conjointe des forces armées du Tadjikistan à l’été 2014, mais le volume des fonds assignés demeure jusqu’à présent inconnu. Kommersant a appris que la Russie serait prête, au cours des prochaines années, à fournir au Tadjikistan un soutien militaire et technique pour un montant de près de 70 milliards de roubles (environ 1,23 milliard de dollars au cours actuel).
Les armements (depuis des équipements de communication, des armes de tir et des munitions jusqu’à de l’aviation, de l’artillerie et des systèmes de missiles) proviendront principalement des réserves existantes de l’armée russe. Les livraisons n’ont cependant pas encore commencé. Ce qui n’a pas empêché Sergueï Lavrov, en conclusion des négociations du 2 avril, d’assurer : « Nous avons confirmé notre dévouement dans l’exécution de nos obligations face au Tadjikistan dans le cadre du renforcement de ses capacités de défense, autant au niveau bilatéral qu’à celui des décisions de l’OTSC. »
Source : Le Courrier de Russie
Traduit par : Julia Breen , source : Elena Tchernenko, Ivan Safronov. 93
https://www.lecourrierderussie.com/2015/04/tadjikistan-russie-asie-centrale-menace-etat-islamique/