Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdoğan était en visite en France. Après avoir été reçu vendredi 20 juin à Paris par le président de la République, François Hollande, il a tenu un meeting à Lyon samedi. Ce meeting, organisé dans le cadre de sa tournée politique en Europe, a rassemblé plusieurs milliers de personnes. Il a aussi été fortement décrié par de nombreuses associations.
Légende : Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdoğan reçu à l’Elysée par le président François Hollande
Arrivé en France vendredi, Recep Tayyip Erdoğan a été accueilli par François Hollande à l’Élysée (photo Elysée). Lors de leur entretien, les deux hommes ont discuté de nombreux sujets et notamment de la Syrie. Le président français a ainsi demandé au Premier ministre turc la plus grande vigilance concernant les cas de citoyens français transitant par la Turquie afin de rejoindre le djihad en Syrie, a rapporté l’agence de presse Doğan.
Recep Tayyip Erdoğan a déclaré que la Turquie avait déjà extradé 22 jeunes Français dans cette situation, mais qu’environ 200 autres étaient soupçonnés de se trouver dans la région pour tenter de se rendre en Syrie ou en Irak. La France souhaite établir une coopération resserrée avec la Turquie sur ce sujet.
Manifestations anti-Erdoğan à Lyon
Invité par l’Union des démocrates turcs européens (UETD), Recep Tayyip Erdoğan s’est exprimé devant 15.000 personnes au parc des expositions de Chassieu. La région Rhône-Alpes abrite la plus grande communauté turque de France, soit environ 200.000 personnes. D’après un reportage mené par le site d’information en ligne Rue89 Lyon, le Premier ministre était très attendu par ses supporters venus en grand nombre assister au meeting.
Dans le même temps, à l’appel notamment de la Fédération de l’union des Alévis de France (FUAF), environ 500 personnes selon la police et 1.000 selon les organisateurs se sont rassemblées à la gare Perrache, a rapporté l’Agence France Presse. « Erdoğan : L’assassin n’est pas bienvenu à Lyon. Dictateur de Turquie, Dégage! » pouvait-on lire sur des bannières. « Son gouvernement est autoritaire. Il méprise la démocratie en réprimant dans la violence les manifestations pacifiques et les minorités. Ce n’est pas normal qu’il vienne dans le pays des droits de l’Homme », a déclaré à Mehmet Demirbaş, président du centre culturel lyonnais des Alévis, cité par l’agence.
Adresse aux Turcs de France
Recep Tayyip Erdoğan, lors de son discours (photo officielle), a abordé le sujet de la double nationalité. Quelque 620.000 Turcs résideraient en France, a-t-il observé, et la moitié d’entre eux détiendraient la double nationalité franco-turque. D’après le Premier ministre, ce chiffre devrait être plus élevé. « Vous êtes nos ambassadeurs. Pourquoi le nombre de nos ambassadeurs n’est-il que de 300.000? Je veux qu’il augmente à 620.000 », a-t-il déclaré, ajoutant que les Turcs de France devaient s’intégrer mais pas « s’assimiler ». « N’oubliez pas votre culture, vos traditions et vos croyances », a demandé le chef du gouvernement turc à ses compatriotes. « Ne laissez pas vos enfants s’assimiler », a-t-il poursuivi.
S’adressant à la communauté turque de France, il a également déclaré que la France avait « besoin de gens courageux, honnêtes et travailleurs comme vous ». « L’Europe a besoin de la Turquie, […] de sa population jeune et dynamique. Elle a besoin de la Turquie pour lutter contre le racisme et l’islamophobie », a ajouté le Premier ministre.
Tournée politique en Europe
Avant Lyon, le Premier ministre turc s’était rendu à Cologne en Allemagne en mai dernier puis à Vienne, afin de s’adresser à la communauté turque y résidant. Ces meetings politiques controversés interviennent dans le cadre de la campagne présidentielle du Parti de la justice et du développement (AKP), même si Recep Tayyip Erdoğan ne s’est pas encore porté officiellement candidat. Lors d’une réunion du Conseil de l’AKP à Istanbul samedi, le Premier ministre a déclaré ne pas être inquiet pour la « route présidentielle » de son parti, a rapporté le Hürriyet Daily News. « Qui que soit notre candidat aux présidentielles, le futur de l’AKP est la dernière chose dont nous devons nous inquiéter. L’AKP est un parti avec des limites définies par des principes et non des individus », a-t-il ajouté.
Après le meeting politique de Cologne, qui avait aussi été l’occasion de manifestations, Recep Tayyip Erdoğan a reçu le même accueil jeudi dernier en Autriche. Quatorze personnes ont été arrêtées à Vienne après que des affrontements ont éclaté entre opposants et supporters du Premier ministre turc devant l’Albert Schultz Hall où s’était tenu son meeting politique, a rapporté le World Bulletin. Plus de 7.800 manifestants s’y était rassemblés pour protester contre la venue du Premier ministre et marquer leur désaccord avec sa politique.
Sarah Baqué
Source : www.lepetitjournal.com/istanbul