Selon un récent rapport du Pentagone (les forces aériennes américaines et alliées ont effectué 17157 frappes (chaque frappe larguant un nombre indéterminé de bombes), dont 17787 en Irak et 6370 en Syrie.
L’aviation américaine en a effectué 13360 (7317 en Irak, 6043 en Syrie), les alliés 3470 en Irak, 327 en Syrie. En Irak, sont intervenus, l’Australie, la Belgique, le Canada, le Danemark, la France, la Jordanie les Pays-Bas, et la Grande-Bretagne. En Syrie, l’Australie, Bahreïn, le Canada, le Danemark, la France, la Jordanie, les Pays Bas, l’Arabie saoudite, la Turquie, les Émirats arabe unis et le Royaume uni. Entre le 8 août 2016 et le 2 janvier 2017, selon le rapport du Pentagone, les États-Unis et les forces aériennes de la coalition ont effectué 132782 sorties « en soutien aux opérations en Irak et en Syrie ». Le rapport précise qu’au 15 octobre 2016, le coût total des opérations s’élevait à $10 milliards, soit un coût moyen de $12,6 millions par jour pour les 800 jours de l’opération « Inherent Resolve ». )https://www.defense.gov/News/Special-Reports),
« Je mettrai un terme à cette guerre en Irak de manière responsable et terminerai la lutte contre al-Qaïda et les Talibans en Afghanistan », avait déclaré Barack Obama au lendemain de sa première investiture en tant que candidat du Parti démocrate à la présidentielle, il y a huit ans. Huit ans plus tard, Daesh contrôle de vastes territoires en Irak et, en Afghanistan, al Qaeda déploie ses forces, tandis que les Talibans reprennent du terrain. Il y a cinq ans, les États-Unis de Barack Obama déclenchaient la guerre pour un « changement de régime » en Syrie.
Les frappes aériennes américaines, soutenues par l’Arabie saoudite, la Jordanie et les Émirats arabe unis (excepté Oman) ont commencé dans la nuit du 22 au 23 septembre 2014, par le bombardement d’une vingtaine de sites dont douze raffineries de pétrole dans le gouvernorat de Deir ez-Zor. Moins d’un an plus tard, la Défense américaine reconnaissait, pour la première fois, des victimes civiles et exprimait « ses regrets pour des décès non intentionnels ». En moins d’un an, les États-Unis menaient 95% des 3000 frappes effectuées. Et un an après les premières frappes, État islamique contrôlait la moitié du territoire syrien.
En Syrie, les frappes de la coalition américaine ont été sélectives, épargnant les groupes djihadistes considérés comme les « amis syriens modérés ». Le 6 octobre 2015, l’hebdomadaire français satirique, « Le Canard enchaîné », révélait que « les pilotes américains et alliés de la coalition opérant en Syrie et en Irak ont reçu l’ordre de ne jamais frapper les terroristes du groupe Front al-Nosra, la filiale syrienne d’Al-Qaeda », les « amis » de la France, au sujet desquels Laurent Fabius, alors ministre des Affaires étrangères, affirmait qu’ « ils font du bon boulot sur le terrain ». En revanche, les forces de l’armée régulière syrienne, ne furent pas épargnées, ce que ne précise pas le rapport. Entre autres incidents, le 17 septembre, 62 soldats de l’armée syrienne étaient tués, une centaine, blessés, au cours des frappes américaines, australiennes, danoise et britanniques, sur la ville de Deir ez-Zor. Une « erreur humaine regrettable principalement due à des facteurs humains », selon le général Richard Coe, ancien commandant adjoint de la force aérienne de la coalition en Irak, aujourd’hui inspecteur général du commandement aérien, chargé de l’enquête, acculé par l’ONU à reconnaître les faits. Il ajoutait que les frappes auraient continué si la Russie n’avait pas expressément demandé à leurs homologues américains d’y mettre un terme. Pourtant, les positions de l’armée syrienne étaient connues du commandement américain, d’une part, d’autre part, État islamique était en train de coordonner une large offensive contre l’armée syrienne qui défendait la ville assiégée depuis plusieurs années par les djihadistes. Ce bombardement intervenait au cinquième jour d’une trêve issue d’un accord entre Moscou et Washington.
Autre crime de guerre, les frappes sur Mossoul et autres villes de la région, en Irak, sous commandement américain, depuis le 17 octobre, ont fait des dizaines de victimes civiles, dont une soixantaine de morts parmi les participants à un cortège funéraire dans la ville de Daquq, le 21 octobre dernier. La Syrie et l’Irak ne sont pas les seules victimes des frappes aériennes américaines sur les civils. En Afghanistan, le 3 octobre 2015, un raid aérien sur l’hôpital géré par Médecins sans Frontière, à Kunduz, détruisait l’hôpital, tuait au moins 42 personnes dont 14 employés de MSF, et faisait des dizaines de blessés. Les coordonnées GPS avaient, pourtant, été transmises à la Coalition et aux autorités militaires et civiles afghanes. Selon MSF, « l’ attaque s’est poursuivie plus de 30 minutes après que (nous avons) alerté les autorités militaires américaines et afghanes à Kaboul et à Washington que l’hôpital était frappé ».Les conclusions de l’enquête américaine « reviennent à dire qu’une opération militaire hors contrôle aurait été menée dans une zone urbaine densément peuplée, lors de laquelle les forces américaines ne seraient pas parvenues à suivre les règles de base de la guerre », selon Meinie Nicolai, présidente de MSF. L’organisation n’a pu obtenir l’ouverture d’une enquête internationale indépendante et a déploré la quasi impunité des militaires responsables des frappes.
Le rapport du collectif Airwars (www.airwars.org ), composé de journalistes et de chercheurs, conteste de la façon la plus crédible et documentée possible, dans un contexte où obtenir des données est extrêmement difficile, les chiffres de la coalition internationale et le manque de transparence de son commandement militaire. Entre autres, « la France qui fournissait auparavant un rapport sur chacun de ses bombardements sous vingt-quatre heures », et « est désormais passée à un rapport hebdomadaire, et a, également, significativement limité l’information fournie. Selon le collectif, les douze pays de la coalition qui participent aux raids n’ont reconnu officiellement qu’un tiers des incidents et n’ont enquêté que sur dix d’entre eux, parce qu’ils y ont été obligés.
En Syrie comme en Irak, Barack Obama n’a pas réussi à tenir ses promesses. S’il a hérité des conflits afghan et irakien, il peut inscrire dans son bilan présidentiel, le conflit syrien dont il a été le maître d’œuvre. Cinq ans et plus de 300 000 victimes plus tard, il a permis aux armées djidahistes de tous bords de se développer en nombre de combattants et en terme de capacité militaire, d’exporter le terrorisme dans les grandes capitales occidentales, il a provoqué l’internationalisation du conflit et stimulé les vieux démons de la guerre froide, mettant en péril le fragile équilibre de la paix mondiale. Sa seule victoire aura été l’enrichissement des industriels de l’armement.