« La prétendue « autorité morale » de l’Amérique n’est pas perdue. Elle n’a jamais existé. Ce qui est perdu, c’est l’illusion de l’autorité », explique Finian Cunningham, célèbre journaliste nord-Irlandais.
Un univers parallèle ! Le chef du Pentagone, James Mattis « le Chien enragé » se plaint que certains sapent l’ « autorité morale » des États-Unis ! Particulièrement le président russe, Vladimir Poutine…
C’est cet ex-général des Marines qui a forgé la réputation de brutalité de ses troupes d’occupation illégale qui ont rasé la ville irakienne de Falloujah en 2004-2005, et utilisé les bombes « shake‘n bake » (utilisation de phosphore et d’un explosif puissant) pour bombarder les habitants.
L’année dernière, sous les ordres de Mattis, ces crimes de guerre ont été réitérés avec la destruction de Raqqa, en Syrie, par l’US Air Force, provoquant la mort de milliers de civils. Même l’ONG Human Rights Watch, pro-US, a abhorré c’est usage du phosphore blanc pendant la « campagne de libération de Raqqa » soi-disant des djihadistes.
Ce ne sont-là que deux exemples des lourdes archives de crimes de guerre commis pendant plusieurs dizaines d’années depuis l ‘intervention illégale en Syrie à la Libye, de l’Irak au Vietnam, et plus avant la Guerre de Corée au début des années 1950, lorsque les Américains ont tapissé le sol de bombes tuant plus de deux millions de civils, ( 800 000 soldats coréens et 57000 militaires des forces de l’ONU essentiellements américaines, NDT).
Le fait que Mattis se soit plaint au cours d’un discours prononcé à l’École navale, la semaine dernière, que l’autorité morale américaine soit en train de s’éroder à cause de Poutine, révèle l’état d’esprit officiel délirant qui infeste Washington. Selon Mattis, le problème de la régression internationale de la réputation américaine n’a rien à voir avec la mauvaise conduite des États-Unis, même si les preuves ne manquent pas. Non, le problème, selon lui, réside dans le fait que le Russe Poutine est en train de saper l’autorité morale de Washington de façon rampante.
« Poutine vise à diminuer l’attrait du modèle occidental de démocratie et essaye de saper l’autorité morale américaine », a-t-il dit à ses auditeurs, ajoutant que les actions du dirigeant russe « visent, aujourd’hui, non pas à défier nos armes, mais à ébranler et compromettre notre foi dans nos idéaux ».
Le secrétaire américain à la Défense n’explique pas pour quelles raisons il pense que la Russie réussit cette ignoble conspiration visant à abaisser l’Amérique. Pour lui, c’est un fait, simplement. Voilà un thème recyclé sans arrêt par les autorités à Washington et Bruxelles, par d’autres dirigeants occidentaux et, bien sûr, par l’OTAN et ses think-tanks. Tous consciencieusement relayés par les medias.
C’est un classique de l’ « idéologie du déni ». La perte générale de légitimité et de l’autorité des gouvernements occidentaux n’a, apparemment, rien à voir avec leurs propres échecs et transgressions, de l’austérité liée à la faillite économique, à la détérioration des conditions sociales, des guerres illégales conduites par les États-Unis avec leurs conséquences boomerang du terrorisme et de la migration de masse des réfugiés. Oh, non ! Les élites dirigeantes sont en train d’essayer de faire porter à d’autres leur propre culpabilité, principalement la Russie.
Selon les récents commentaires de l’analyste politique américain Randy Martin, il y a une forme de délire collectif au sein des establishments politiques occidentaux et de leurs medias dominants qui s’alignent sur eux. « Dans quel puissant fantasme Mattis et les dirigeants occidentaux comme lui sont empêtrés », dit Martin. « Les États-Unis sapent et compromettent leurs propres croyances et idéaux parce qu’ils ont perdu toute l’intégrité morale à laquelle ils ont pu facilement prétendre grâce à des dizaines d’années d’une conduite internationale criminelle qui leur est propre. La soi-disant autorité morale américaine est le sauf-conduit que l’Amérique s’est attribué pour renverser la démocratie en Ukraine, la remplaçant par des néo-Nazis ; Elle a transformé une Libye économiquement prospère, en un terrain vague, après avoir assassiné son dirigeant Muammar Kadhafi. Elle a financé et ouvertement sponsorisé le groupe terroriste MKO (Moudjahidin du Peuple) en Iran en vue d’un changement de régime. Et elle est impliquée jusqu’au cou dans le soutien à la guerre génocidaire de la coalition saoudienne au Yémen ».
Malgré cette litanie de crimes commis par les États-Unis avec l’approbation de ses alliés européens, Washington, dit Martin, « prêche une doctrine bizarre d’ « exceptionnalisme » et s’arroge, d’une certaine manière, un droit moral de dominer le monde. C’est le fruit de cervaaux malades de sociopathes ».
Cette semaine, trois gros titres ont amplifié le déclin de l’autorité morale américaine. Le premier, ce sont ces scènes déchirantes de milliers d’enfants de migrants enlevés à leurs parents à la frontière mexicaine, enfermés de force dans des enclos grillagés, sanglotant sans discontinuer, traumatisés. La politique sans pitié de « tolérance zéro » de l’administration Trump a provoqué l’indignation dans le monde entier. Les Nations unies l’ont jugée « intolérable ». Un éditorialiste du Washington Post a qualifié la politique de Trump de « barbare, infligeant de graves dommages à la base de notre démocratie ».
Deuxièmement, l’administration Trump poursuit sans relâche une guerre commerciale contre la Chine et ses alliés occidentaux. L’imposition unilatérale de tarifs par la Maison Blanche au mépris des lois du commerce international a poussé les autorités européennes à déplorer la façon dont Trump est « en train de saboter le système mondial fondé sur des règles ».
Troisièmement, il y a l’horreur généralisée de la catastrophe humanitaire au Yémen où des millions de civils sont menacés de mourir de faim à cause de l’offensive saoudienne et des Émirats sur le port de Hodeida.
Pour couronner le tout, le retrait américain, cette semaine, du Conseil de l’ONU pour les droits de l’Homme basé à Genève, que l’ambassadrice américaine aux Nations unies, Nikki Haley, a accusé d’être une « latrine à préjugés » contre Israël, a provoqué la consternation face au cynisme avec lequel Washington fait taire ceux qui critiquent son soutien à Israël et son occupation illégale du territoire palestinien.
Dans chacun de ces exemples, la réputation internationale américaine est ternie par sa propre politique, ses décisions et sa façon d’agir. Progressivement, Washington est en train de devenir le régime voyou diplômé que nombre d’observateurs avaient déjà considéré comme tel depuis des dizaines d’années de guerres illégales et de mensonges. La différence, aujourd’hui, c’est qu’il n’est plus possible de ne pas mentionner ou de cacher l’image de voyou par une propagande et des mythes égotiques et avec la complaisance des medias occidentaux pendant autant d’années.
Les protestations de Mattis concernant la perte de l’autorité morale des États-Unis a davantage à voir avec une peur croissante de leur propre nudité. Tel l’empereur qui ne portait pas de vêtements, la laideur de la nudité du pouvoir mondial américain est devenue de plus en plus visible.
Le pouvoir américain n’est certainement pas devenu plus malveillant ou imprévisible au fil du temps. Cela a toujours été le cas ; sauf que dans le passé, sa malveillance était soigneusement dissimulée par des medias efficaces et serviles. Avec le développement de la communication globale, des sources alternatives d’information et d’analyse, l’ancien monopole des medias dont les États-Unis bénéficiaient avec ses laquais occidentaux, n’est plus dominant. L’opinion publique occidentale, en particulier, a davantage de sources d’information pour permettre une évaluation critique, indépendante de leurs gouvernements et de leurs discours officiels. Ce qui explique l’actuel défi auquel le gouvernement américain est aujourd’hui confronté. Les gens voient à travers le voile des mensonges et de la désinformation et en tirent les bonnes conclusions.
L’Empereur n’est pas seulement nu, ses mains sont couvertes de sang des innombrables crimes contre l’humanité et des guerres d’agression atroces qui étaient cachées ou niées auparavant. On peut suspecter que ce qui, en réalité, agite Mattis et autres apologistes des guerres américaines illégales et des conduites malveillantes, c’est que la vérité vraie est dite par des sources alternatives. La prétendue « autorité morale » de l’Amérique n’est pas perdue. Elle n’a jamais existé. Ce qui est perdu, c’est l’illusion de l’autorité.
Source : https://www.rt.com/op-ed/430299-mattis-moral-authority-putin/
Traduction Christine Abdelkrim-Delanne